Dans la nuit du 7 au 8 août 2008, à la suite de plusieurs semaines d'escarmouches frontalières, l'armée géorgienne bombarde Tskhinvali, la capitale de la région sécessionniste de l'Ossétie du Sud appuyée par Moscou. Suit une confrontation éclair au cours de laquelle l'armée géorgienne sera littéralement écrasée par la force militaire russe. Un an plus tard, les traces de la guerre sont toujours présentes, sur le terrain comme dans les esprits. Et ce conflit irrésolu reste explosif.

Dans une cour du centre de Tskhinvali, des drapeaux sud-ossète et russe sèchent côte à côte sur une corde à linge. «Sans les Russes, il ne resterait plus rien», lance Zemfira, assise quelques mètres plus loin.

 

Cette femme de 35 ans est reconnaissante envers la Russie d'avoir chassé l'armée géorgienne, qui a lancé une offensive sur Tskhinvali dans la nuit du 7 au 8 août 2008, cherchant à rétablir sa souveraineté sur ce territoire qui lui échappe de facto depuis la chute de l'URSS.

Les immeubles à logements qui entourent sa cour ont pour la plupart été frappés par les violents bombardements géorgiens. Ils ont tout de même eu plus de chance que quelque 420 autres édifices de Tskhinvali, qui doivent être totalement reconstruits.

Seules les façades extérieures des immeubles moins endommagés de Tskhinvali ont été rénovées pour l'instant et de nouvelles fenêtres ont été installées sur la plupart. Mais à l'intérieur, les rénovations promises se font attendre.

C'est que tout est entre les mains des Russes, qui financent entièrement la reconstruction de la petite république rebelle qu'ils ont défendue. Les premiers travaux d'envergure n'ont commencé que le 15 juillet dernier, près de 600 projets attendant l'approbation de Moscou.

Aux crochets de la Russie

Il faut dire que même avant la guerre de l'été dernier, l'Ossétie du Sud, qui compte entre 40 000 et 60 000 habitants selon les estimations, n'a jamais été très développée.

C'est pourquoi Zourab Kabisov, directeur de la Commission de reconstruction, parle surtout de «construction». Selon lui, au-delà de son indépendance politique, la petite république doit se bâtir une indépendance économique. «Nous n'avons jamais eu une production de biens de première nécessité», souligne M. Kabisov.

Pour l'instant, l'Ossétie du Sud vit aux crochets de Moscou. En deux ans, la Russie aura investi 10 milliards de roubles (360 millions de dollars) pour les projets de reconstruction. Elle prévoit dépenser la même somme l'an prochain.

Longtemps, le seul souhait de Tskhinvali a été un rattachement à la Fédération de Russie, afin de rejoindre les frères d'Ossétie du Nord dans une même entité. En entrevue à La Presse cette semaine, le président sud-ossète Edouard Kokoïty a toutefois laissé entendre que l'idée devait être abandonnée, Moscou n'ayant jamais montré d'intentions en ce sens.

«Oui, il y a une volonté de notre peuple de s'unir. Mais les détails sur la forme de cette union, en prenant compte des réalités actuelles, peuvent être multiples», a-t-il expliqué, citant l'exemple de l'Union européenne. Selon Edouard Kokoïty, la Russie n'a jamais eu l'intention d'annexer l'Ossétie du Sud, comme l'en accuse Tbilissi.

Récentes provocations

Les indépendantistes ossètes sont bien conscients de servir de pion géopolitique à la Russie contre la Géorgie pro-occidentale, souligne la journaliste de l'opposition Maria Lipy. «La Russie a combattu à nos côtés pour défendre ses propres intérêts. Mais heureusement, nos intérêts coïncident avec les siens», souligne-t-elle.

Russes, Ossètes et Géorgiens assurent tous vouloir éviter une nouvelle guerre, accusant l'ennemi de se prêter à des «provocations». Les incidents se sont multipliés à la frontière au cours des derniers jours. Frontière actuellement bien protégée par l'armée russe. Du même coup, le spectre d'un conflit armé, qui n'avait jamais vraiment quitté les habitants de Tskhinvali, a resurgi de plus belle.