Le président Donald Trump a dénoncé mercredi une justice «politisée» et a accusé les magistrats qui doivent se prononcer sur son décret migratoire actuellement suspendu de mettre en péril la sécurité des États-Unis.

Le sort de cette mesure anti-immigration, la plus emblématique et controversée de la jeune présidence Trump, est entre les mains de trois magistrats d'une cour d'appel de San Francisco.

Ils doivent rendre un arrêt très attendu d'ici la fin de la semaine.

«Je ne vais pas dire que cette cour est partiale alors que sa décision n'est pas encore tombée. Mais la justice apparaît tellement politisée», a déclaré M. Trump.

Cette critique intervient quelques jours après que le président a qualifié de «pseudo-juge» un magistrat fédéral de Seattle qui a suspendu l'application de son décret, dans un contexte de vives tensions entre exécutif et judiciaire.

M. Trump avait aussi taxé de «scandaleux» la décision de ce juge, James Robart, dans un communiqué de la Maison-Blanche.

Le haut magistrat Neil Gorsuch, nommé le 31 janvier par Donald Trump à la Cour suprême des États-Unis, a estimé «décourageants» et «démoralisants» de tels commentaires présidentiels.

M. Gorsuch a fait ces déclarations lors d'un entretien avec le sénateur démocrate du Connecticut Richard Blumenthal, et le porte-parole du magistrat, Ron Bonjean, en a confirmé la réalité à l'AFP.

S'exprimant à Washington face à l'association des shérifs des États-Unis, le président a dit avoir écouté mardi soir «avec stupéfaction» les débats téléphoniques de l'audience judiciaire consacrée à son décret fermant temporairement l'entrée du pays aux citoyens de sept pays à majorité musulmane.

«Sécurité en péril» 

Le nouveau maître de la Maison-Blanche a lu à la tribune un article de loi adopté il y a 65 ans, stipulant que le président américain était en droit de suspendre l'entrée d'une catégorie d'étrangers s'il estimait que cette arrivée «serait néfaste aux intérêts des États-Unis».

«Un lycéen de niveau médiocre comprendrait cela, n'importe qui comprendrait cela», a insisté M. Trump, en sous-entendant que les juristes en désaccord avec son décret étaient forcément de mauvaise foi.

Il a par ailleurs assuré que les États-Unis étaient «en situation de risque» du fait de la suspension de son décret.

«Je pense que c'est regrettable, c'est un triste jour. Notre sécurité est en péril», a-t-il lancé, avant de dresser un tableau très sombre en matière de criminalité.

«En 2016 le nombre des meurtres dans les grandes villes a continué à grimper avec des taux à deux chiffres. Dans beaucoup de nos principales métropoles, nous avons assisté en 2016 à une hausse des homicides, des viols, des agressions et des fusillades», a-t-il détaillé en évoquant une «sécurité publique en crise».

«Si les États-Unis ne sortent pas victorieux de cette procédure (à San Francisco, NDLR), nous ne bénéficierons plus jamais de la sécurité à laquelle nous avons droit», avait-il tweeté plus tôt.

Donald Trump établit fréquemment un lien entre immigration et hausse de la criminalité aux États-Unis, même si aucune étude sérieuse ne le prouve.

Et, depuis les attentats du 11 septembre 2001, les attaques les plus graves aux États-Unis ont été commises soit par des Américains, soit par des ressortissants ne provenant pas des sept pays visés par le décret. 

«Pente savonneuse» 

Dans sa bataille judiciaire, Donald Trump pourra désormais s'appuyer sur son ministre de la Justice, confirmé à son poste mercredi soir par un vote du Sénat, à 52 voix contre 47.

Jeff Sessions, un ultra-conservateur de 70 ans, fut le premier sénateur à se rallier au candidat Donald Trump pendant les primaires.

Mardi soir, le gouvernement de Donald Trump a exposé ses arguments aux trois juges de San Francisco, lors d'une audience téléphonique d'un peu plus d'une heure.

August Flentje, l'avocat du ministère de la Justice, a assuré que le décret «entrait pleinement dans les attributions présidentielles» et respectait l'esprit de la Constitution.

Dans le camp opposé, le défenseur de l'État de Washington, Noah Purcell, a rappelé que la Justice se devait de «limiter les abus de l'exécutif» et a averti que réinstaurer le décret «replongerait le pays dans le chaos», en référence à l'indignation internationale et aux manifestations qu'il avait déclenchées.

M. Flentje a parfois semblé en difficulté face aux questions des juges, mais Donald Trump «a été satisfait de certains arguments qu'il a avancés», a affirmé mercredi le porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer.

M. Trump «attend désormais avec impatience le débat sur le fond du dossier», a ajouté M. Spicer. «Si le président ne peut exercer le pouvoir que lui confère la loi, cela montrerait que nous sommes sur une pente savonneuse».