Un soldat américain a plaidé coupable, mercredi devant une cour martiale, des meurtres de trois civils afghans, exécutés pour le plaisir avec la complicité présumée de quatre autres soldats de son bataillon, pendant une mission en Afghanistan.

Le caporal-chef Jeremy Morlock est le premier de cinq soldats de la brigade Stryker de la Bravo Company à être jugé pour meurtres dans cette affaire. Il sera également le témoin-clé de l'accusation dans les procès des quatre autres soldats, notamment celui du chef présumé, le sergent Calvin R. Gibbs.

Lors de son procès à la base militaire de Lewis-McChord, près de Seattle, Jeremy Morlock a admis mercredi avoir tué ou aidé à tuer trois hommes lors d'une mission dans la province de Kandahar (sud), et avoir disposé autour d'eux des armes afghanes pour les faire passer pour des combattants ennemis.

À la question de savoir si les tirs avaient pu partir tous seuls, Jeremy Morlock a répondu mercredi sans hésiter: «Notre but était de tuer».

Le militaire a livré des détails sur le premier assassinat. Alors qu'il patrouillait avec un autre soldat, un Afghan s'est dirigé vers eux. Ils se sont alors cachés tous deux derrière un mur, Jeremy Morlock a dégoupillé une grenade de manière à faire croire que c'était l'Afghan lui-même qui l'avait envoyée. Son collègue a alors tiré sur l'Afghan selon un scénario s'apparentant à de la légitime défense.

Outre les meurtres, Jeremy Morlock et ses compagnons d'armes sont accusés d'avoir prélevé sur leurs victimes des «trophées-souvenirs», notamment des ossements, et d'avoir consommé du haschich. Ils auraient aussi passé à tabac un soldat qui avait signalé leurs agissements à sa hiérarchie.

Selon le règlement de la cour martiale, la décision de Jeremy Morlock de plaider coupable doit accélérer la procédure pour passer directement à la seconde phase du procès, à l'issue de laquelle sera fixée la peine.

Morlock est un témoin-clé dans cette affaire, car il avait conduit les enquêteurs vers les macabres «trophées». Un enquêteur avait précisé en novembre dernier avoir retrouvé des doigts prêt du campement de la brigade, grâce à une carte fournie par le soldat.

Lundi, le magazine allemand Der Spiegel avait publié trois photos des accusés avec leurs victimes présumées. Sur l'une d'elles, on voit Jeremy Morlock poser devant un cadavre, dont il tient la tête par les cheveux.

L'armée américaine s'est excusée «pour la souffrance» provoquée par les photos. Les agissements montrés sur ces clichés «nous répugnent en tant qu'êtres humains et sont contraires aux principes et aux valeurs de l'armée des États-Unis», a déclaré l'armée.

Der Spiegel a affirmé de son côté que le Pentagone avait tout fait pour éviter leur publication, craignant qu'elle ait le même effet que les photos prises par les gardiens américains de la prison d'Abou Ghraib, en Irak, qui torturaient et humiliaient leurs prisonniers pour le plaisir.

L'avocat Dan Conway, qui défend l'un des accusés, Andrew Holmes, s'est félicité de cette publication, qu'il réclamait en vain à l'armée pour les faire étudier par un médecin légiste indépendant.

Selon M. Conway, son client, qui apparaît sur les photos de Der Spiegel, est accusé d'avoir tiré sur sa victime présumée avec une mitrailleuse. Il affirme que les photos prouvent que la victime n'a pas été ainsi abattue.

L'avocat assure que «l'on a ordonné à son client d'être sur la photo. Donc il y est. Mais ça ne fait pas de lui un meurtrier».