Le chroniqueur conservateur du Washington Post Charles Krauthammer l'a baptisé le «nouveau come-back kid», laissant entendre que Barack Obama a démontré la capacité du «come-back kid» original, Bill Clinton, de se relever d'un revers prétendument fatal.

Peter Baker, correspondant du New York Times à la Maison-Blanche, a estimé de son côté que le président était arrivé à un tournant de son mandat lui permettant de se poser en «champion du compromis dans une capitale politiquement divisée».

Il s'agit justement du rôle «post-partisan» pour lequel l'ancien sénateur d'Illinois a auditionné lors de la campagne présidentielle de 2008, a pour sa part soutenu Glenn Thrush, journaliste de Politico, quotidien devenu incontournable à Washington.

Les journalistes ont du mal à résister au thème du «retour» d'un politicien après avoir passé des semaines ou des mois à décrire ses déboires. Barack Obama a fourni à plusieurs d'entre eux le prétexte de céder à ce penchant en promulguant vendredi une loi fiscale issue d'un accord de compromis avec les républicains.

Dès le lendemain, le Sénat a fait sa part pour alimenter le thème du «retour» en offrant au président une victoire qui apaisera sans doute un peu la colère suscitée par son compromis fiscal au sein de l'aile gauche du Parti démocrate. Pas moins de 65 sénateurs, dont huit républicains, ont concrétisé une promesse de campagne de Barack Obama en abrogeant la loi qui imposait aux militaires homosexuels de taire leur orientation sexuelle sous peine d'être renvoyés. Ils ont ainsi emboîté le pas de leurs collègues de la Chambre des représentants.

«En mettant fin à la directive "Don't ask, don't tell", notre nation ne se privera plus du service de milliers de patriotes américains contraints de quitter l'armée malgré des années de service exemplaires, parce qu'il se trouve qu'ils sont homosexuels. De même, des milliers d'autres ne seront pas contraints de vivre dans le mensonge dans le but de servir le pays qu'ils aiment», s'est réjoui le président avant le vote final du Sénat.

Barack Obama pourra revendiquer une autre victoire importante d'ici la fin de l'année si le Sénat ratifie le nouveau traité de désarmement nucléaire START conclu avec le président russe, Dmitri Medvedev. Comme dans les cas de la loi fiscale et de l'abolition du tabou gai dans l'armée, le président aura besoin de l'appui d'un certain nombre de sénateurs républicains pour obtenir cette ratification.

Compromis

Le «retour» de Barack Obama ne survivra peut-être pas à l'arrivée d'un Congrès plus républicain et conservateur en 2011, mais il permet au président de finir une année très difficile sur une note plutôt positive et de rappeler aux électeurs son pragmatisme. Il s'est lui-même fait l'apôtre du compromis en promulguant la loi fiscale, qui coûtera 858 milliards de dollars.

«Il y a certains éléments que mon parti n'aime pas. Il y a certains éléments que les républicains présents ici n'aiment pas. C'est la nature même du compromis», a déclaré le président.

Aux yeux de ses partisans et alliés les plus progressistes, il ne s'agissait évidemment pas d'un compromis, mais d'une capitulation. Leur réaction tient à la prolongation pour deux ans des allègements fiscaux de l'ère Bush devant expirer le 31 décembre, y compris pour les contribuables les plus fortunés.

Durant toute sa campagne présidentielle, Barack Obama a promis de ne reconduire que les allégements des classes moyennes, les ménages gagnant moins de 250 000$ par an.

Mais certains commentateurs et analystes considèrent que le président a réussi à arracher aux républicains des concessions importantes à un moment où sa position politique était la plus faible. Charles Krauthammer, qui n'a pas l'habitude de complimenter le chef de la Maison-Blanche, estime même qu'il a eu le meilleur sur ses rivaux.

En échange de la prolongation des cadeaux fiscaux pour les plus riches, le président a obtenu une extension des allocations pour deux millions de chômeurs et un ensemble de mesures en faveur de la classe moyenne qui injecteront 400 milliards de dollars au cours des deux prochaines années dans l'économie chancelante des États-Unis. Après les déboires démocrates aux élections de mi-mandat, personne n'aurait pu prédire qu'il pourrait obtenir un «second plan de relance», pour reprendre l'expression du chroniqueur économique du New York Times David Leonhardt.

Mais il faudra attendre les résultats de l'élection présidentielle de 2012 avant de conclure que Barack Obama est le «nouveau come-back kid».