À quoi ressemblerait une présidence Obama? Le candidat démocrate a placé sa campagne sous le thème du changement pour tourner la page des années Bush mais la Maison-Blanche pourrait bien, s'il est élu, opérer dans un style proche de celui de la précédente administration.

Discipline, efficacité et goût du secret: ces traits caractéristiques de la campagne du sénateur de l'Illinois ne ne sont en effet pas sans rappeler la manière de fonctionner de l'administration Bush.

Evidemment, si Barack Obama devient le premier noir élu président des États-Unis, le caractère historique de son élection éclipsera tout le reste pendant un bon moment.

Sur le fond, son approche des grandes questions, de l'Irak au système de santé tranche radicalement avec celle des huit dernière années. Sur la forme, ce père de deux fillettes de dix et sept ans, qui deviendrait l'un des plus jeunes présidents du pays, apportera vraisemblablement un nouveau souffle. Et son caractère posé et réfléchi peut laisser espérer la fin d'une ère de bourdes et lapsus présidentiels.

Mais comme le président George W. Bush, Barack Obama demande une certaine rigueur à ses collaborateurs, qui doivent savoir tenir leur langue et travailler en groupe. Les divergences sur les questions de stratégie, de politique ou de personne ne sont pas censées être portées sur la place publique, une consigne jusqu'ici soigneusement respectée.

Le style du candidat Obama laisse penser qu'il pourrait gouverner à la manière d'un président-PDG, qui délègue plutôt que de vouloir régler lui-même tous les détails. Là encore une similitude avec Bush. Les deux hommes s'appuient également chacun sur un cercle restreint dans lequel il est difficile de pénétrer.

Bush et Obama incarnent des valeurs très différentes, mais le candidat démocrate «dirige sa campagne avec le même genre d'efficacité méthodique et d'hermétisme que la Maison-Blanche de Bush», explique Julian Zelizer, historien politique à l'université de Princeton. Si Obama est président, «il n'y aura pas de Maison-Blanche insouciante où les gens sont libres de faire ce qu'ils veulent, (...) de parler à la presse».

Obama est connu pour sa loyauté et pour préférer les collaborateurs qui restent concentrés sur leur travail et ne cherchent pas à attirer l'attention. David Plouffe, Valerie Jarrett, David Axelrod... ces stratèges de sa campagne pourraient bientôt avoir leurs bureaux à la Maison-Blanche, mais aucun n'est devenu une célébrité, contrairement à un Karl Rove, ex-éminence grise du président Bush, ou un James Carville à l'époque de Bill Clinton.

Elu président, Obama devra sans doute prendre des décisions sur l'économie avant même son investiture, le 20 janvier, à cause de la crise financière. Le sénateur de l'Illinois prône une action immédiate dans le cadre d'une session parlementaire spéciale qui serait convoquée après l'élection du 4 novembre.

Il souhaite un moratoire sur les saisies immobilières des propriétaires défaillants, des baisses d'impôts pour favoriser les créations d'emplois et les investissements dans les petites entreprises, une extension des allocations-chômage, une aide aux administrations locales, des fonds pour lancer des travaux d'infrastructure et des garanties de prêts renforcées pour les constructeurs automobiles.

Il a également défini trois grands axes pour les 100 premiers de sa présidence: oeuvrer à l'objectif d'un retrait, dans un peu plus d'un an, des troupes de combat en Irak, et commencer à travailler sur un projet de couverture santé universelle et sur un audacieux plan énergétique.

En 20 mois de campagne, il a également promis d'accorder une attention prioritaire à beaucoup d'autres questions: par exemple, une réforme de l'immigration et un réexamen des décrets du président Bush, notamment ceux autorisant les écoutes sans mandat judiciaire et portant sur la prison de Guantanamo et les techniques d'interrogatoire des détenus.

Ces questions pourraient être remises à plus tard à cause de l'urgence de la crise. Il est toutefois peu probable qu'il prenne le risque de reporter son engagement sur l'Irak alors que son opposition résolue à l'invasion du pays a aidé à lancer sa campagne et contribué à son aura.

Obama a promis que le retrait des forces de combat serait une priorité non seulement durant les 100 premiers jours de son mandat, mais aussi lors de la première journée passée à la Maison-Blanche. Les chefs des armées seront convoqués dans le Bureau ovale le 21 janvier, a-t-il affirmé, pour se voir confier par leur commandant en chef une nouvelle mission: «mettre fin à cette guerre, de manière responsable mais déterminée».