Le secrétaire d'État américain John Kerry s'est déclaré lundi «plein d'espoir» que ses discussions à Genève avec le chef de la diplomatie russe Sergei Lavrov débouchent sur un changement en Ukraine.

«Je suis plein d'espoir que c'est le début d'un changement qui signifiera une amélioration pour tout le monde», a déclaré M. Kerry dans une conférence de presse. Il s'est entretenu 80 minutes avec M. Lavrov. «J'espère que cela sera la route pour plus de désescalade et non pour plus de déceptions», a ajouté le secrétaire d'État.

Il y a eu plus tard dans la matinée un court entretien d'une dizaine de minutes entre les deux hommes en marge du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies devant lequel ils sont intervenus.

John Kerry a reconnu que le cessez-le-feu accepté dans les accords de Minsk n'était «pas encore un cessez-le-feu complet», mais «notre espoir est que dans les prochaines heures et certainement dans les prochains jours il le soit», a-t-il dit.

Le secrétaire d'État a également affirmé son espoir de parvenir à une meilleure coopération avec la Russie. «Je pense que le président (Vladimir) Poutine interprète de façon erronée une grande partie de ce que les États-Unis cherchent à faire», a-t-il déclaré.

Il n'a cependant pas exclu de nouvelles sanctions contre la Russie et son économie en cas d'échec de ces tentatives d'arrêter les violences dans l'est de l'Ukraine.

S'exprimant à l'issue de leur entretien, le chef de la diplomatie russe M. Lavrov a quant à lui brièvement fait part de «progrès notables» dans la mise en place des derniers accords de paix signés à Minsk le 15 février, précisant que «le cessez-le-feu s'applique, des armes lourdes sont retirées» de l'est de l'Ukraine.

Le chef de la diplomatie américaine avait dernièrement accusé les responsables russes de lui avoir «menti droit dans les yeux» à propos des combats, augurant d'une discussion animée avec M. Lavrov. Le propos a toutefois été nuancé par un membre de la délégation américaine, parlant sous couvert de l'anonymat: le secrétaire d'État américain faisait référence à «l'appareil russe de propagande», a-t-il dit.

Si les violations du cessez-le-feu sont de moins en moins fréquentes, «il est trop tôt pour savoir si nous sommes au bout de nos peines», a déclaré un responsable américain accompagnant M. Kerry.

Cette rencontre intervient peu après une annonce de l'ONU faisant état de plus de 6000 personnes tuées en Ukraine depuis le début des violences en avril 2014. Le Haut Commissaire aux droits de l'homme, Zeid Raad al Hussein, a dénoncé des «destructions impitoyables concernant les civils et les infrastructures».

Avec la crainte d'une nouvelle escalade, les regards sont en particulier tournés vers Marioupol, port stratégique sur la mer d'Azov et dernière grande ville de la région sous le contrôle de Kiev. L'armée ukrainienne y dénonce depuis des jours une concentration de troupes ennemies et des survols de drones.

Kiev et les Occidentaux accusent Moscou d'armer la rébellion séparatiste et d'avoir déployé des troupes régulières dans l'est de l'Ukraine. La Russie dément toute implication dans le conflit.

Député ukrainien libéré à Moscou

Réagissant à la mort de l'opposant russe Boris Nemtsov, abattu vendredi soir en plein centre de Moscou, le président ukrainien Petro Porochenko a lié ce drame à la situation en Ukraine.

Selon lui, l'ancien vice-premier ministre russe s'apprêtait à «rendre publiques les preuves de la participation des troupes russes au conflit en Ukraine».

Le député ukrainien Alexeï Gontcharenko, arrêté dimanche à Moscou en marge de la marche en hommage à l'opposant russe, a été libéré, la police ne retenant aucune charge contre lui.

M. Gontcharenko était soupçonné d'avoir pris part le 2 mai à l'incendie criminel d'un bâtiment public à Odessa, dans le sud de l'Ukraine, où ont brûlé vives plus de 40 personnes, principalement des insurgés prorusses, après des affrontements avec des combattants pro-ukrainiens.

Arrêté «pour refus d'obtempérer» selon le Comité d'enquête russe, le député a été libéré dimanche dans la soirée, a confirmé lundi à l'AFP son avocat Mark Feïguine.

«Il n'y a aucune charge contre lui, il n'ira pas au tribunal et il s'envole aujourd'hui» pour l'Ukraine, a-t-il précisé.

Réunion sur le gaz

Sur le plan énergétique, l'Union européenne a tenté de désamorcer un nouveau conflit gazier: le géant russe Gazprom a commencé la semaine dernière à approvisionner directement en gaz les zones sous contrôle des rebelles au motif que Kiev avait cessé de le faire.

Le vice-président de la Commission européenne, Maros Sefcovic, a affiché sa volonté d'arracher un accord lundi à Kiev et Moscou pour garantir l'approvisionnement de l'UE, lors d'une réunion dans l'après-midi à Bruxelles avec les ministres russe et ukrainien de l'Énergie.

Cette médiation devait être précédée de pourparlers «dans différentes configurations», a précisé une source proche du dossier.

Près de 15 % des importations totales de gaz de l'UE transitent par l'Ukraine.