Près de deux semaines après la chute de Laurent Gbagbo, le président ivoirien Alassane Ouattara, même s'il proclame que «la guerre est terminée», reste confronté à l'insécurité et à l'activité de groupes armés à Abidjan, qui retardent la normalisation promise.

Si les Forces républicaines (FRCI) du chef de l'État ont progressivement pris le contrôle de la majeure partie d'Abidjan après l'arrestation de l'ex-président le 11 avril, elles ne sont pas encore parvenues à sécuriser les quartiers de Yopougon (ouest) et Abobo (nord).

Vendredi, M. Ouattara a chargé les chefs des forces armées et de sécurité, qui presque tous lui ont fait allégeance, de «demander aux chefs miliciens, (...) au commandant Ibrahim Coulibaly, de venir (les) voir et de déposer les armes», faute de quoi il faudra les «désarmer par la force».

«La guerre est terminée en Côte d'Ivoire», a-t-il insisté.

À Abobo, les FRCI s'étaient affrontées mercredi aux combattants du «commando invisible» de l'ex-putschiste Ibrahim Coulibaly, dit «IB», qui a contribué à l'affaiblissement de l'ancien pouvoir et tient toujours des barrages dans une bonne partie du quartier.

Le même jour à Yopougon (ouest), elles avaient tenté sans succès, lors de combats à l'arme lourde, de déloger les derniers miliciens fidèles à Laurent Gbagbo. De nombreux habitants avaient fui les combats.

Il y a «urgence a reprendre les choses en main», a estimé le Premier ministre et ministre de la Défense Guillaume Soro.

Mais les nouvelles autorités doivent aussi maîtriser leurs propres forces, accusées notamment de pillages et de racket à Abidjan.

Alassane Ouattara a «ordonné» le retour «immédiat» des unités combattantes FRCI dans leurs casernes, et le redéploiement des gendarmes et policiers.

Dans le quartier d'affaires du Plateau, au centre de la capitale économique, non loin du palais présidentiel, administrations et ministères ont été la cible de pillards. Par conséquent, le travail tarde à reprendre, d'autant que les fonctionnaires ne sont pas payés depuis deux mois.

Très attendue pour relancer l'activité économique, la réouverture de l'antenne ivoirienne de la banque centrale ouest-africaine BCEAO et des banques commerciales, qui ont aussi leur siège au Plateau, a été annoncée pour la semaine prochaine mais pourrait prendre plus de temps.

En attendant, le nouveau pouvoir en a profité pour démanteler la «Sorbonne», le plus célèbre des forums des fidèles de Laurent Gbagbo, qui s'y livraient notamment à de violentes diatribes antifrançaises.

Tribune des jeunes idéologues du régime défait, le lieu était aussi un vaste marché informel, un temple du piratage et un lieu de prostitution, au coeur du Plateau.

Autres foyers d'opposants pro-Gbagbo, les universités et résidences universitaires d'Abidjan ont aussi été fermées et vidées de leurs occupants cette semaine.

«Ces locaux étaient devenus des champs de bataille. On y trouve des armes et des miliciens. La plupart des résidents ne sont pas des étudiants», a expliqué à l'AFP Kandia Camara, la ministre de l'Éducation nationale, sans préciser quand interviendrait la réouverture.

Preuve que la situation reste délicate pour le nouveau régime, le chef du parti de Laurent Gbagbo, Pascal Affi N'Guessan, en résidence surveillée dans un hôtel d'Abidjan, a été transféré vendredi soir au QG du chef de l'État. En cause, une entrevue qu'il donnait à des médias.

Tandis que l'ex-président est, selon des sources concordantes, en résidence surveillée à Korhogo (nord), son épouse Simone, un faucon de l'ancien régime, a été transférée vendredi à Odienné (nord-ouest). Elle se trouvait jusqu'alors à Abidjan.