Après huit ans de pontificat, Benoît XVI a cessé d'être pape jeudi à 19 h GMT (14h, heure de Montréal), quand a pris effet sa démission, la première d'un chef de l'Église catholique depuis 700 ans.    

Le pape avait annoncé le 11 février qu'il renoncerait à sa charge sans cérémonie particulière, le 28 février. Benoît XVI avait quitté le Vatican trois heures auparavant pour gagner la résidence estivale des papes à Castel Gandolfo. Dans son dernier salut aux fidèles, il a dit qu'il ne serait désormais qu'un «simple pèlerin».

Larmes et applaudissements d'une foule émue ont marqué jeudi après-midi l'adieu final de Benoît XVI depuis le balcon de sa résidence de Castel Gandolfo avant qu'il n'abandonne officiellement la papauté en début de soirée.

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«Merci, merci pour votre amitié», a lancé le pape de 85 ans en tendant les bras vers la foule depuis le balcon qui domine la place principale du village où se trouve la résidence d'été des papes.

«Be-ne-det-to, Be-ne-det-to» (Benoît en italien), scandait la foule composée de prêtres, de pèlerins et de familles.

Les cloches de Castel Gandolfo avaient auparavant sonné à toute volée pour annoncer l'arrivée du pape à Castel Gandolfo, venu en hélicoptère directement du Vatican.

Les habitants de ce village pittoresque, à une trentaine de kilomètres de Rome, se sont rassemblés pour assister à la dernière apparition en tant que pape de Benoît XVI, qu'ils ont attendu patiemment pendant des heures dans le froid en priant et en chantant.

«Tout s'est passé si vite. Quelle joie de l'avoir vu, mais quelle tristesse aussi de penser que c'était la dernière fois», confie Giuseppina, une serveuse de 23 ans, en essuyant une larme.

C'est du balcon situé au troisième étage de l'imposante façade de sa villa donnant sur la petite place du village que Benoît XVI a salué les habitants, habitués depuis des siècles à côtoyer les successeurs de Saint-Pierre, séduits par la fraîcheur paisible de cette bourgade durant les torrides étés romains.

«Cela signifie beaucoup pour nous que Benoît XVI ait choisi de faire ici ses ultimes adieux, c'est une journée très émouvante», confie Patrizia Gasperini, 40 ans, qui travaille dans une boutique de souvenirs à deux pas des portes de la villa, qui se fermeront à 19 h GMT (14 h, heure de Montréal) pour marquer la fin du règne de Benoît XVI.

«Nous avons eu le privilège de découvrir un aspect différent, plus humain, de sa personnalité au fil des années, et nous nous sommes attachés à lui», explique-t-elle, ajoutant que sa fille de 8 ans, baptisée Benedetta en l'honneur de Benoît XVI (Benedetto en Italien), lui a écrit une lettre d'adieu avec sa classe.

«Merci Benoît, nous sommes tous avec toi!» proclame une inscription en lettres argentées accrochée à côté de la petite église paroissiale, où des hordes de journalistes sont sur les dents.

Selon les résidants du village, Benoît XVI, qui passera ici les deux premiers mois de sa retraite, n'a pas inspiré les émotions intenses ou attiré les foules de son charismatique prédécesseur Jean Paul II.

«Jean Paul II était une personne tellement chaleureuse, il attirait vraiment les jeunes. Benoît XVI est plus réservé, et moins de pèlerins sont venus ici pour le voir», remarque Simone Piloto.

Mais la décision du pape de renoncer au trône de Saint-Pierre à 85 ans, au bout de huit années d'un pontificat tumultueux, a changé l'opinion de certains d'entre eux, selon lesquels il aurait ainsi refusé d'être entraîné dans les scandales dans un climat délétère au sein d'une Église en crise.

«Nous avons découvert que derrière son aspect froid se cache un honnête homme. Il a parlé hier des eaux tourmentées de sa papauté et je crois que maintenant il devrait dire ce qu'il sait», estime Veronica Radoi, 30 ans, qui gère un petit restaurant.

Le centre aux ruelles pavées de Castel Gandolfo a toujours vécu en symbiose avec la résidence papale : les gardes suisses chargés d'assurer la sécurité du pape fréquentent les bars et restaurants locaux, tout comme le personnel à demeure de cette propriété de 55 hectares : jardiniers, agents d'entretien... Une proximité qui facilite les confidences et les rumeurs.

«Je suis née ici, j'ai vu cinq papes aller et venir, mais je ne m'attendais pas à en connaître un sixième», s'émerveille Marisa, 80 ans, qui attend sur une chaise au soleil devant sa maison le début des cérémonies.

«Benoît XVI est un homme bon, mais il a eu une papauté horrible et difficile», ajoute-t-elle en soupirant.

Un fardeau qui a apparemment beaucoup pesé sur les frêles épaules du pape allemand : «Je l'ai trouvé très éprouvé et très fatigué», a confié la maire du village, Milvia Monachesi, à l'issue d'une brève rencontre avec Joseph Ratzinger.