Le réveil a été pénible pour des millions de sinistrés de la côte est, ce matin, qui ont commencé à constater l'ampleur des dégâts causés pas l'ouragan Sandy. Ce fut particulièrement le cas à Atlantic City, où l'oeil de la tempête a touché terre hier soir vers 20 h.

L'eau a monté de plusieurs mètres dans les rues du quartier pauvre de Ventnor Heights au moment où Sandy est arrivée. L'endroit, qui est un peu comme une île à l'intérieur de la presqu'île d'Atlantic City, est bordé par deux baies où l'eau s'est rapidement accumulée pour ensuite inonder la ville. Les fortes bourrasques de vent ont eu raison d'une partie du célèbre Boardwalk (la promenade qui longe la mer). Vers 10 h, ce matin, l'eau débordait encore dans certaines rues.

Comme plusieurs habitants de la côte qui ont décidé de rester chez eux, Coleen Soyer, 46 ans, n'avait pas anticipé la force de la tempête. Lorsqu'il a vu l'eau monter en début de soirée, son fils a tenté de venir la secourir à bord d'une motomarine. Après deux coins de rue, il a abandonné l'idée: les bourrasques atteignaient près de 100 km\h.

Coleen Soyer est donc restée seule dans sa maisonnette blanche, plongée dans le noir comme les 8 millions d'Américains qui ont subi des coupures d'électricité depuis hier.

«J'étais plongée dans l'obscurité la plus totale et j'entendais toutes sortes de bruits étranges : les vagues qui se fracassaient sur ma maison, le bardeau de mon toit qui s'arrachait et le hurlement du vent. Lorsque j'ai voulu vérifier ce qu'il se passait au rez-de-chaussée, j'ai vu tous mes meubles et même le contenu de mon réfrigérateur flotter dans le salon. C'était surréel. Je n'en reviens toujours pas de m'en être sortie vivante! »

Un voisin, Pete Mazzaruli, a aussi regretté sa décision de rester à Ventnor Heights. « J'ai vécu l'ouragan Irene l'an dernier, et Sandy, c'était 1000 fois pire!», a-t-il déclaré en ramassant par terre le drapeau américain qui flotte habituellement au-dessus de sa porte.

À quelques kilomètres de là, dans un quartier plus cossu, Karen Duffy a également été étonnée par l'ampleur de la tempête. Plusieurs pieds d'eau sont entrés dans le sous-sol de sa maison centenaire avec un bruit de cascade. Deux arbres sont tombés sur son terrain, arrachant les fils électriques. «On se sentait comme dans le Titanic qui coule», a-t-elle illustré.

La ville d'Atlantic City a fait l'objet d'une évacuation obligatoire dès samedi 16 h. La route d'accès n'est redevenue accessible qu'aux médias et aux véhicules d'urgence, ce matin, lorsque la marée a commencé à se retirer. Le chemin d'une quinzaine de kilomètres était toutefois jonché de débris lors du passage de La Presse. À Pleasantville, à environ 10 km d'Atlantic City, un bateau se trouvait même en plein centre d'une rue résidentielle.

Le jour n'était pas encore levé sur la côte est américaine que déjà des évacués de Pleasantville tentaient de regagner leur domicile pour constater l'ampleur des dégâts.

Dès 6 h, Berverly Nelson, 71 ans, et sa fille Tammy Elliot sont venues constater les dégâts dès qu'elles ont pu. Elles sont parvenues à convaincre une policière de les laisser accéder à une zone interdite.

«Il y a des dommages dans la maison, mais le plus impressionnant, ce sont les débris partout dans le quartier», a dit Mme Nelson, qui s'est résignée à quitter sa maison à pied hier soir alors que l'eau dans les rues atteignait sa taille. «On n'a jamais rien vécu d'aussi intense. Mais maintenant que c'est passé, je remercie Dieu, qui a fait en sorte que toute ma famille soit toujours vivante. Le matériel, ce n'est pas ce qui compte, dans la vie.»

«Ç'a été une nuit terrifiante, a ajouté Tammy Elliot, chez qui sa mère est allée se réfugier. Il ventait tellement fort, ça faisait hoooouuuuu! Hoouuuuuuuu! Comme des fantômes. J'avais l'impression d'être dans un film d'horreur.»