Les problèmes suscités par l'imposition de restrictions résidentielles aux délinquants sexuels n'émeuvent pas du tout Ron Book, un influent lobbyiste qui a largement contribué au durcissement des lois de la Floride.

Sa croisade a débuté dans les années 2000 après qu'il eut découvert, avec consternation, que sa fille Lauren avait été agressée sexuellement pendant plusieurs années par la gouvernante de la maison.

« Lorsqu'une situation comme celle-là survient, tu peux décider de te laisser submerger par l'émotion ou tu utilises ton énergie pour faire en sorte que les choses changent... Depuis ce temps, je lutte activement pour faire en sorte que la Floride, le pays, voire le monde soient plus sécuritaires pour nos enfants », déclare-t-il en entrevue.

Ensemble, père et fille ont multiplié les pressions sur la classe politique, n'hésitant pas à intervenir énergiquement dans les assemblées publiques pour la contraindre à agir.

Marc Sarnoff, un commissaire de Miami, affirme que M. Book - qu'il décrit comme un « überlobbyiste » - dicte largement l'orientation de la discussion sur la délinquance sexuelle dans la ville. « Tant qu'il ne décidera pas que l'orientation doit changer, elle ne changera pas », relève l'élu.

« Bookville »

Les actions de la famille Book ont notamment mené à l'adoption d'une restriction résidentielle de 2500 pieds qui a entraîné les formations successives à Miami de trois camps de fortune de délinquants sexuels.

Ses détracteurs ont nommé ces camps « Bookville » pour narguer le lobbyiste. « Ça ne m'insulte pas qu'on utilise cette expression. Ce n'est pas moi qui ai fait de ces gens des pédophiles, qui les ai poussés à commettre les crimes qu'ils ont commis. C'est leur comportement qui les a placés dans la situation où ils sont », lance-t-il en entrevue.

Le droit à la sécurité de la population doit primer le droit des « pédophiles » de vivre où ils le veulent, note M. Book, qui utilise fréquemment ce mot pour évoquer les délinquants sexuels, sans égard à leurs crimes réels.

L'idée de restreindre l'accès de la population aux registres des délinquants sexuels lui semble une hérésie. « Si quelqu'un a commis un crime sexuel, je veux pouvoir en être informé », tranche-t-il, pestant contre les pays qui ne suivent pas cette voie.

Le lobbyiste exclut avec colère les études suggérant que les délinquants sexuels ont un faible taux de récidive. « Les personnes qui prétendent que c'est vrai disent des conneries. Elles ont tort », s'emporte-t-il.

Selon lui, les taux avancés sont trompeurs parce que de nombreux délits sexuels ne sont jamais rapportés. « Lorsque des personnes commettent des crimes contre des enfants, elles ne composent pas le 911 pour se dénoncer... Elles récidivent et elles récidivent tant qu'elles ne sont pas prises », tranche M. Book.

« Tout le monde sait que l'on ne peut pas guérir ces gens. On peut les conseiller pour les aider à définir ce qui déclenche leur comportement, mais on ne peut pas les guérir », affirme le lobbyiste, qui défend sans réserve le modèle floridien.

« Le reste des États-Unis devrait prendre exemple sur ce que nous faisons parce que c'est nous qui avons la bonne formule », conclut-il.