Les chasseurs-bombardiers russes ont frappé mercredi pour le deuxième jour consécutif la province d'Idleb alors que l'armée de l'air syrienne menait des raids sur les quartiers rebelles d'Alep, où l'aide alimentaire va manquer après un siège de quatre mois.

Les bombardements aériens et d'artillerie ont tué 35 civils, dont six enfants ces dernières 24 heures dans les quartiers rebelles d'Alep, et 21 autres dans le village de Batbo, à 40 km à l'ouest de la ville, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Dans la province d'Idleb (nord-ouest), six civils dont un enfant ont péri à Kafar Jales.

«Les avions militaires russes ont visé toute la nuit et jusqu'au matin plusieurs régions d'Idleb», province contrôlée par une alliance de rebelles et de djihadistes, a indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane, le directeur de l'OSDH.

«Dans le même temps, l'armée de l'air du régime a bombardé les quartiers est d'Alep», la deuxième ville de Syrie divisée depuis juillet 2012 en secteurs gouvernementaux et rebelles et que le régime entend reprendre entièrement.

Yahya Arja, un secouriste des Casques blancs, a dit avoir «travaillé toute la nuit pour fouiller les décombres et en retirer les martyrs et les survivants».

Dans l'est d'Alep, l'hôpital pédiatrique, qui effectue 4000 consultations par mois, et la Banque du sang, qui produit 1.500 poches de sang pour les hôpitaux, ont été endommagés par des barils explosifs, selon l'ONG Association des docteurs indépendants (ADI). 

«Inexcusables» 

Après un mois d'accalmie, la campagne de frappes a été relancée mardi par l'armée sur les quartiers rebelles d'Alep, coïncidant avec l'annonce par Moscou d'une nouvelle offensive, officiellement contre les djihadistes d'Idleb et de Homs.

L'armée russe possède une puissance de feu considérable grâce aux avions qui décollent du porte-avions Amiral Kouznetsov, arrivé la semaine dernière au large des côtes syriennes.

Moscou a ainsi nettement renforcé le dispositif militaire mis en place depuis plus d'un an pour soutenir le régime du président Bachar al-Assad aux côtés de l'Iran ou du Hezbollah libanais.

Les nouvelles frappes ont été qualifiées d'«inexcusables» par Washington, qui soutient la rébellion dite modérée et a souvent accusé Moscou de viser les insurgés antirégime sous couvert de bombarder les djihadistes.

De son côté, le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konashenkov, lui a répondu en dénonçant une «rhétorique» basée sur des «mensonges», et soutenu que les avions russes n'avaient «pas mené de frappes sur Alep depuis 29 jours».

La reprise des bombardements intervient une semaine après l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Ce dernier a annoncé à plusieurs reprises que sa priorité était la lutte contre les djihadistes et non pas la chute de Bachar al-Assad comme le souhaitait Barack Obama.

Dans sa première réaction à la présidentielle américaine, M. Assad a déclaré que M. Trump serait «un allié naturel» s'il luttait contre «le terrorisme», dans un entretien diffusé mardi soir par la télévision publique portugaise RTP.

Par le terme de «terrorisme», le régime entend toutes les formations armées qui lui sont hostiles, que ce soit celles considérées comme modérées ou les djihadistes, comme le groupe État islamique (EI), qui contrôle de vastes régions en Syrie. 

«Nos dépôts sont vides»

Sur le plan humanitaire, la situation devient de plus en plus critique pour les 250.000 habitants d'Alep-Est, soumis à un siège implacable depuis le 17 juillet. Leurs provisions touchent à leur fin et le Programme alimentaire mondial (PAM) a indiqué à l'AFP avoir effectué dimanche sa dernière distribution.

«Nos dépôts sont vides, nous ne pouvons plus rien distribuer», a affirmé Ammar Qadah, le directeur d'al-Cham al-Insaniya, une association caritative. Des volontaires ont distribué mardi ses derniers maigres sacs d'aides, a constaté un correspondant de l'AFP.

L'ONU avait déjà averti la semaine dernière que les dernières rations alimentaires étaient en train d'être distribuées.

Dans la région septentrionale de Raqa, la coalition arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS) progressait dans le désert vers la «capitale» de facto de l'EI en Syrie.

«Nous avançons même si les mercenaires (de l'EI) minent les villages avant de s'enfuir», a expliqué la commandante Rodi Derek, à Touwaylaa, récemment prise et en partie détruite. Les combats se concentraient mercredi autour du village Tall al-Samane, à 35 km au nord de Raqa.