Le candidat à la présidentielle égyptienne Ahmad Chafiq s'est engagé samedi à ne pas revenir au régime du président déchu Hosni Moubarak, dont il a été le dernier premier ministre, en promettant de poursuivre sur la voie de la «révolution» et en tendant la main aux perdants.

«Je m'engage aujourd'hui auprès de tous les Égyptiens: nous allons commencer une ère nouvelle (...) Ce qui est passé appartient au passé», a déclaré à la presse M. Chafiq, qui doit affronter le candidat des Frères musulmans Mohammed Morsi au second tour les 16 et 17 juin.

«Il n'y a pas de place pour un retour à l'ancien régime. L'Égypte a changé et on ne peut pas revenir en arrière», a-t-il ajouté, cherchant visiblement à dissiper son image d'homme de l'ancien système, accusé vendredi soir par les Frères musulmans de mettre la révolution «en danger».

L'ancien premier ministre avait dû quitter ses fonctions sous la pression de la rue en mars 2011, peu après la démission de M. Moubarak.

Cette élection «historique (...) n'aurait pas pu avoir lieu sans la glorieuse révolution», a-t-il lancé, avant de s'adresser aux jeunes qui ont lancé le soulèvement, citant les «coalitions de jeunes de la révolution et les jeunes du 6-Avril».

«La révolution que vous avez provoquée vous a été confisquée», a-t-il dit, faisant apparemment allusion aux Frères musulmans, vainqueurs des dernières législatives. «Je me suis engagé et je m'engage à vous en rendre les fruits».

M. Chafiq est abhorré par les mouvements de jeunes révolutionnaires, qui le voient comme un symbole de l'ancien régime dont la victoire menacerait leurs idéaux.

Le général, ex-chef d'état-major de l'armée de l'air devenu ministre de l'Aviation civile, s'est posé en rassembleur «prêt à dialoguer avec tous les courants», en faisant un appel du pied aux électeurs de ses rivaux, notamment le candidat de gauche Hamdeen Sabbahi, qui serait le troisième homme de l'élection, et l'islamiste Abdel Moneim Aboul Foutouh.

Il a appelé «ceux qui rêvent et ceux qui sont en colère, les ambitieux et les déprimés, les chômeurs et les travailleurs, les musulmans et les coptes, les islamistes, les libéraux et les gens de gauche» à se rassembler derrière lui.

«Je considère que le message des Égyptiens pendant cette élection est que l'Égypte est à tout le monde, nous construisons et nous ne nous vengeons pas», a-t-il dit. «Que personne ne soit exclu, que personne ne soit écarté».

«Il y a une tendance islamiste et une tendance dite libérale. Je sens que la population est assez mûre (...), que sans pression et sans monopole, l'équation se résoudra toute seule», a-t-il ajouté.

«Le Parlement a son rôle, le chef de l'État son rôle, le gouvernement le sien, il n'y aura pas de confrontation» avec l'Assemblée du peuple dominée par les islamistes s'il est élu président, a-t-il assuré.

De nouveau interrogé sur ses liens avec l'ancien régime, il a répondu avec impatience, visiblement excédé: «Encore? J'en ai marre».

Après la conférence de presse, il a dit à l'AFP être «bien sûr» confiant de remporter le second tour.

M. Chafiq a fait sa campagne sur des promesses de retour à la stabilité et à la sécurité destinées aux nombreux Égyptiens inquiets face à la montée de la crise économique et de la criminalité.

Il est aussi soutenu au sein de la communauté chrétienne copte (près de 10 % de la population), anxieuse de la montée de l'islamisme.