Les puissances mondiales et régionales réunies vendredi dans le groupe de contact sur la Libye ont pleinement reconnu la rébellion, ce qui leur permettra de lui apporter l'aide financière qu'elle réclame pour combattre le régime du colonel Kadhafi.

Le groupe de contact reconnaît désormais le Conseil national de transition (CNT), organe politique des rebelles, comme «l'autorité gouvernementale légitime» du pays, selon la déclaration finale de la réunion du groupe à Istanbul.

«Jusqu'à ce qu'une autorité intérimaire soit en place, les participants ont convenu de traiter le CNT comme l'autorité gouvernementale légitime en Libye», affirme le document.

«Cela veut dire que nous allons pouvoir dégeler un certain nombre d'avoirs appartenant à l'État libyen puisque c'est le CNT qui exerce désormais cette responsabilité», a expliqué le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté en février des sanctions économiques contre le régime de Tripoli, incluant le gel des avoirs de la famille et des personnalités proches du colonel Mouammar Kadhafi. Le CNT réclamait la cession de ces avoirs à la rébellion.

«Le groupe de contact a aussi encouragé les participants à fournir une aide financière substantielle au CNT dans le contexte des lois existantes, y compris à travers des mécanismes autorisant les entités contrôlées par le CNT à exporter des hydrocarbures, en débloquant les avoirs libyens au bénéfice du peuple libyen ou en utilisant ces avoirs comme des garanties pour l'octroi d'une aide financière au CNT», affirme la déclaration commune.

Les participants appellent les pays détenant des avoirs libyens gelés à «ouvrir des lignes de crédit correspondant à 10 à 20% des avoirs gelés en considérant ceux-ci comme collatéraux».

La pleine reconnaissance du CNT est le résultat des assurances fournies par les rebelles, a pour sa part affirmé la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton.

«Le CNT a offert des assurances importantes aujourd'hui, notamment la promesse de poursuivre des réformes démocratiques ouvertes, tant géographiquement que politiquement», a déclaré la secrétaire d'État à la presse, en marge des travaux du groupe.

«Les États-Unis sont impressionnés devant les progrès accomplis par le CNT (...) ce qui renforce notre confiance dans le fait qu'il est le bon interlocuteur», a-t-elle ajouté.

La chef de la diplomatie américaine s'était entretenue dans la matinée avec Mahmoud Jibril, le numéro deux de la rébellion.

Le groupe de contact demande aussi que les rebelles travaillent sans délai à établir un gouvernement de transition.

«Le Groupe a appelé toutes les parties concernées à rechercher les moyens de favoriser la formation d'un gouvernement intérimaire pour assurer une passation de pouvoir en douceur et pacifique avec le plus grand soutien populaire possible», selon la déclaration.

Il réclame de nouveau le départ du pouvoir du colonel Kadhafi «selon des étapes définies qui seront annoncées publiquement».

Le groupe de contact a par ailleurs demandé à toutes les parties de «coopérer avec l'émissaire spécial des Nations Unies (en Libye) et de coordonner avec lui leurs efforts pour contribuer à trouver une solution à la crise».

«Toutes les tentatives pour avoir des médiations secrètes, confidentielles, avec certains pays, car il y a eu des contacts, se sont avérées très contre-productives», a commenté à ce propos le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, sans citer un pays en particulier.

L'émissaire de l'ONU «est habilité à présenter un paquet politique incluant un cessez-le-feu et à négocier avec Benghazi et Tripoli», a-t-il ajouté.

La réunion d'Istanbul réunissait tous les pays participants à la campagne de l'OTAN contre le régime de Mouammar Kadhafi. La Chine et la Russie, invitées, avaient décliné l'invitation.

Une quinzaine de ministres des Affaires étrangères étaient présents à cette réunion d'une journée à Istanbul, ainsi que le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, et la représentante de la diplomatie européenne Catherine Ashton.

Sur le terrain, après cinq mois de combats, les rebelles ont poursuivi vendredi leur offensive sur le front Est, assurant progresser en direction du port pétrolier de Brega, au prix d'au moins trois morts et 73 blessés dans leurs rangs.

Au lendemain de leur offensive sur trois axes depuis Ajdabiya, carrefour routier à 80 km à l'est de Brega, les rebelles ont annoncé avoir dépassé le point situé à mi-chemin entre les deux villes, sur lequel ils butaient depuis des semaines, et avoir saisi une dizaine de véhicules militaires des forces loyales au colonel Kadhafi.