Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta a déploré dans un entretien au Monde mercredi que la communauté internationale «oblige» Bamako «à négocier avec un groupe armé», en référence à la rébellion touarègue du MNLA dont le fief, Kidal, échappe toujours au contrôle de l'État malien.

«La communauté internationale nous oblige à négocier sur notre sol avec des gens qui ont pris des armes contre l'État», a déclaré M. Keïta. «L'État malien est contraint de négocier avec un groupe armé qui s'en vante, dans quelle commedia dell'arte sommes-nous?», a-t-il insisté, en évoquant ainsi la situation anarchique de la ville de Kidal, dans le nord-est du Mali.

Les troupes françaises et africaines présentes au Mali depuis près d'un an, après avoir chassé les groupes islamistes armés qui occupaient le nord du pays, «ont vocation à aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale et sa souveraineté. Nous assistons, hélas, à une situation où la présence de ces troupes a empêché le Mali de rétablir l'autorité de l'État à Kidal, alors qu'il l'a fait à Gao et Tombouctou», les deux autres grandes villes du nord du pays, a déploré M. Keïta.

«La rébellion touarègue du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) est retournée à Kidal dans le sillage des troupes» françaises qui ont chassé les islamistes, mais l'armée malienne a été empêchée de retourner à Kidal, a-t-il accusé. «Pourquoi? Serions-nous des barbares d'une autre époque qui, une fois à Kidal, se mettraient à massacrer tout le monde? L'armée malienne n'est pas une armée de soudards», a-t-il assuré.

Malgré la présence de soldats français et de troupes de la MINUSMA (force de l'ONU), Kidal est en proie à l'anarchie et aux rivalités de groupes armés. L'État malien n'arrive pas à y asseoir son autorité et le MNLA, profondément divisé, n'y contrôle plus rien.

Interrogé sur l'enquête sur la mort des deux journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, tués le 2 novembre par des hommes armés qui les avaient enlevés à Kidal, le président malien s'est dit «presque certain» que Baye Ag Bakabo, trafiquant de drogue touareg lié à AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique), «est bien le responsable de cette tragédie».

Le chef de l'État malien est à Paris pour participer au sommet de l'Élysée sur la paix et la sécurité en Afrique, qui se tient vendredi et samedi en présence d'une quarantaine de chefs d'États et de gouvernements africains.