La Chine se trouve désormais isolée sur le dossier du nucléaire iranien après la volte-face de la Russie et pourrait finalement se rallier à un texte de faible portée après avoir obtenu des concessions occidentales.

L'opposition aux sanctions est traditionnelle dans la politique extérieure chinoise mais une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU qui serait édulcorée pourrait permettre à Pékin de sauver la face tout en protégeant ses intérêts dans les hydrocarbures en Iran, estiment des experts.

Pékin essaie «effectivement d'amoindrir (...) l'impact de toutes sanctions qui pourraient finalement être décidées», estime Sarah Raine, sinologue à l'International Institute for Strategic Studies.

«La question, du point de vue de la Chine, est de s'assurer que ces sanctions auront un effet minimal sur ses intérêts sur place».

Même si elle a finalement voté les trois précédentes résolutions à l'ONU contre son allié -- en 2006, 2007 et 2008-- la Chine reste aujourd'hui le seul des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU opposé à de nouvelles sanctions contre Téhéran.

«Jusqu'ici, à la fois la Russie et la Chine ont pu obtenir des concessions de l'Occident, Europe et États-Unis, en échange d'un durcissement de leur position vis-à-vis de l'Iran», note Samuel Ciszuk, analyste énergétique de IHS Global Insight.

«La Russie n'est plus dans cette position (...) mais la Chine y est toujours, à l'évidence».

À Paris lundi, le président russe Dmitri Medvedev a en effet exprimé son accord pour de nouvelles sanctions contre l'Iran, à condition qu'elles soient bien «ciblées» et «ne visent pas la population» iranienne.

C'est la première fois que Moscou apporte aussi clairement son soutien à de nouvelles sanctions contre l'Iran soupçonné par les Occidentaux de vouloir se doter de l'arme atomique sous couvert de son programme civil, ce que nie Téhéran.

Comme la Chine, la Russie a toujours déclaré préférer la voie de la négociation, mais Moscou a montré des signes d'impatience à la suite de la décision de Téhéran de commencer à enrichir son uranium jusqu'à 20%.

Pékin, qui dispose aussi d'un droit de veto au Conseil de sécurité, a encore réaffirmé mardi qu'il restait «une latitude pour les efforts diplomatiques», comme elle le répète à l'envi ces dernières semaines alors que la pression croît sur Téhéran.

«La Chine n'aime pas se retrouver sous les projecteurs, mais elle n'y est pas aussi mal à l'aise que Washington l'aurait espéré», estime Mme Raine.

La semaine dernière, le chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a dit espérer une résolution de l'ONU condamnant les activités nucléaires de l'Iran dans «les 30 ou 60 jours», avant d'être plus évasive lundi en laissant penser que cela pourrait être plutôt une question de plusieurs mois -- un délai apparemment nécessaire pour convaincre Pékin.

Les États-Unis et Israël ont accentué la pression sur la Chine, y envoyant des délégations de haut niveau récemment.

«Pour les Chinois, il ne peut y avoir des sanctions de large portée», estime lui aussi Willem van Kemenade, auteur d'un livre récent sur les relations entre l'Iran, la Chine et l'Occident.

«Cela ne marche pas parce que les Chinois sont bien plus circonspects» sur la réalité de la poursuite par Téhéran d'un programme nucléaire militaire, poursuit-il.

Toutefois, Pékin, n'est pas prêt à sacrifier ses intérêts supérieurs pour l'Iran, même si ce pays est son 3e fournisseur de pétrole et si les grands groupes chinois y sont bien positionnés dans les hydrocarbures en attendant que la situation de ce pays se clarifie.

«La Chine a de gros volumes commerciaux avec les États-Unis, l'Europe et le Japon, alors que les volumes avec l'Iran portent juste sur 20 milliards de dollars par an», souligne Zhu Weilie, spécialiste du Moyen-Orient à la Shanghai International Studies University.