Les insurgés islamistes shebab ont mené une nouvelle attaque d'envergure jeudi dans le centre de la Somalie contre une base éthiopienne de la mission de l'Union africaine qui tente de stabiliser le pays (AMISOM), les deux camps avançant des bilans fortement contradictoires.

Les shebab, affiliés à Al-Qaïda, ont revendiqué l'assaut contre la base d'Halgan, dans la région de Hiran, et affirmé avoir tué 60 soldats éthiopiens. Addis-Abeba, pour sa part, a assuré que 101 djihadistes étaient morts dans cette attaque, alors que le gouvernement somalien a lui avancé le chiffre de 240 shebab tués, ainsi que 9 soldats de l'AMISOM.

«Les combattants moudjahidines ont pénétré dans la base et ont massacré de nombreux Éthiopiens», ont indiqué les shebab via un communiqué publié sur leur compte de messagerie «Telegram».

Ils ont affirmé avoir tué «60 soldats» éthiopiens, tout en reconnaissant que 16 de leurs hommes avaient péri.

Mais ce bilan a été vivement contesté par les autorités éthiopiennes.

«Il y a eu une tentative par les shebab d'attaquer nos forces dans le centre de la Somalie, mais cette attaque a mal commencé et nos forces ont tué 101 militants et détruit de l'armement lourd», a déclaré à l'AFP le porte-parole du gouvernement éthiopien Getachew Reda.

«Nous sommes encore en train de recenser le nombre de personnes touchées de notre côté, mais leur affirmation selon laquelle ils ont tué 43 soldats éthiopiens (le premier bilan fourni par les shebab avant de parler de 60 morts, NDLR) est un mensonge absolu. C'est le fruit de leur imagination», a-t-il ajouté.

Le ministre somalien de la Sécurité, Abdirisak Omar Mohamed, a pour sa part parlé sur la radio d'État Muqdisho de 240 shebab tués «sur la base attaquée et dans ses environs».

«Il n'y a aucune victime du côté de l'armée somalienne, mais 9 soldats de l'AMISOM sont morts et six autres ont été blessés, et cela est dû à la première explosion», a-t-il ajouté.

Les bilans de ce type d'attaque sont impossibles à vérifier de manière indépendante. Les shebab ont coutume d'exagérer les bilans de leurs opérations et l'AMISOM ne communique en général pas le nombre précis de victimes dans ses rangs.

Celle-ci a cependant confirmé que l'attaque avait eu lieu, soutenant qu'elle avait été repoussée par l'armée éthiopienne, avec l'aide de l'armée somalienne.

Voiture piégée

La version de l'AMISOM a été confirmée par les autorités locales. «Des éléments violents ont tenté de pénétrer dans la base de l'armée somalienne et de l'AMISOM, mais ils ont été repoussés et leurs corps sont partout», a déclaré Guhad Abdi Warsame, un haut responsable local.

Des témoins ont affirmé que l'attaque avait commencé quand un shebab s'est fait exploser au volant d'une voiture piégée en vue de démolir l'entrée de la base. «Il y a eu une énorme explosion et des échanges de tirs soutenus ont ensuite débuté», a déclaré Osman Adan, qui habite à proximité du camp.

Les shebab ont mené plusieurs attaques d'ampleur contre des bases de l'AMISOM lors de l'année écoulée en utilisant ce modus operandi. En janvier à El-Adde (sud de la Somalie), ils ont revendiqué la mort de plus de 100 soldats kényans, des informations invérifiables, mais jugées crédibles par plusieurs sources sécuritaires à Nairobi.

Avant cela, les islamistes avaient attaqué fin juin 2015 une base burundaise à Lego, puis un camp ougandais à Janale, dans le sud de la Somalie.

L'attaque de jeudi est la première menée sur une base de l'armée éthiopienne, réputée pour son efficacité.

Quelque 22 000 soldats africains sont actuellement déployés en Somalie dans le cadre de la mission de l'UA. Ils soutiennent le fragile gouvernement somalien contre les shebab, qui ont juré sa perte.

Confrontés à la puissance de feu supérieure de l'AMISOM, déployée en 2007, les shebab ont été chassés de Mogadiscio en août 2011.

Ils ont ensuite perdu l'essentiel de leurs bastions, mais ils contrôlent toujours de vastes zones rurales d'où ils mènent des opérations de guérilla et des attentats-suicides, souvent jusque dans la capitale. Ces derniers mois, ils ont revendiqué des opérations spectaculaires, tant à Mogadiscio que contre des bases de l'AMISOM.