Le travail des enquêteurs, notamment français, attendus samedi sur le site de l'écrasement d'un avion ayant fait 118 victimes dans le nord du Mali s'annonce délicat en raison de la désintégration de l'appareil.

«Il est aujourd'hui difficile de pouvoir récupérer quoi que ce soit, et même pour les corps des victimes, je pense qu'il est très difficile de pouvoir les récupérer parce que nous avons vu seulement des morceaux de chair humaine qui jonchaient le sol», a estimé le général Gilbert Diendiéré, chef d'état-major particulier à la présidence burkinabè.

Il faisait partie de la délégation du président burkinabè Blaise Compaoré qui s'est rendue vendredi après-midi dans la zone de Gossi, à environ 100 km de Gao, la plus grande ville du nord du Mali, où l'avion s'est écrasé jeudi.

«Les débris étaient éparpillés sur une distance de 500 mètres, mais nous avons constaté que cela est dû au fait que l'avion s'est écrasé d'abord (au) sol et a certainement dû rebondir pour aller plus loin», a-t-il ajouté.

Les restes de l'appareil, un McDonnell Douglas MD83, avaient été repérés jeudi soir par un hélicoptère de l'armée burkinabè dans la zone de Gossi, proche de la frontière avec le Burkina Faso.

Des images tournées sur le site par des soldats burkinabè et français montrent des débris métalliques difficilement identifiables, éparpillés sur des dizaines de mètres, avec des flaques d'eau par endroits.

À Bamako, une source officielle avait indiqué que le président malien Ibrahim Boubacar Keïta s'était aussi rendu sur le site de l'accident. Mais tard vendredi soir, la télévision publique ORTM a rapporté qu'il s'était en fait rendu à Gao, d'où M. Keïta a exprimé aux pays d'origine des victimes de l'écrasement la «vive solidarité» du Mali. «Nous venons nous incliner sur les dépouilles de ces disparus», a-t-il dit.

Vingt gendarmes et policiers français, de même qu'une équipe du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) français, sont attendus sur place dans la journée de samedi. Ils devront notamment s'atteler à l'identification des victimes.

L'accident s'est produit jeudi, 50 minutes après le décollage de Ouagadougou de l'avion affrété par Air Algérie auprès de la société espagnole SwiftAir, à destination d'Alger. À bord se trouvaient 118 personnes : 112 passagers - dont 54 Français et 23 Burkinabè - et six membres d'équipage, tous espagnols.

«Il n'y a hélas aucun survivant», a déclaré le président français François Hollande lors d'une brève allocution télévisée.

Cependant, a-t-il indiqué, «une boîte noire a été récupérée» par des militaires français dépêchés sur le site et «acheminée vers Gao». Selon lui, toutes les hypothèses, notamment climatiques, sont étudiées pour expliquer cet écrasement.

«Je suis anéanti»

En plus des Français, Burkinabè et Espagnols, les victimes proviennent de plusieurs pays, dont le Canada, le Liban et l'Algérie, qui a décrété un deuil national de trois jours.

L'accident a décimé des familles entières, laissant leurs proches inconsolables. Dans la commune de Gex (est de la France), on pleure la perte de 10 membres d'une même famille, sur trois générations.

«Je suis anéanti», a témoigné Seydou Cissé, un Malien de Roubaix (nord de la France) après avoir appris la disparition dans l'écrasement de son ami et compatriote Bakary Diallo, un réalisateur.

Le Burkina Faso va transporter dans la zone de Gossi des proches des victimes, a annoncé vendredi son ministre de l'Administration territoriale et de la Sécurité, Jérôme Bougouma. Ces proches, qui doivent être désignés par la compagnie, seront transportés par petits groupes en hélicoptère à partir de samedi.

Les familles des victimes françaises seront reçues par le président François Hollande au Quai d'Orsay.

En raison de la catastrophe, un sommet qui devait réunir samedi aux Comores les dirigeants de quatre pays de l'océan Indien et François Hollande a été reporté sine die.

Selon la secrétaire d'État aux Français de l'étranger, Fleur Pellerin, en visite vendredi à Ouagadougou, «il n'y avait pas de personnes suspectes parmi les personnes enregistrées à bord», d'après les enquêtes menées par les autorités burkinabè et des renseignements en possession de la France.

La région de Gao reste une zone dangereuse où des jihadistes continuent à sévir, de même que d'autres bandits et trafiquants armés profitant de l'immensité de cette zone en partie désertique, difficile à contrôler.

Les soldats français y sont implantés depuis le début de leur intervention, en janvier 2013, pour chasser du nord du Mali les groupes liés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Les jihadistes avaient occupé la région pendant près de dix mois entre 2012 et début 2013.

L'Association internationale du transport aérien (Iata) a indiqué vendredi qu'elle allait «tout mettre en oeuvre» pour améliorer la sécurité aérienne, après une semaine noire au cours de laquelle trois écrasements d'avions ont fait plus de 460 morts.