Les autorités éthiopiennes ont démenti mardi que neuf blogueurs et journalistes récemment arrêtés aient été visés pour leurs activités dans les médias, assurant qu'ils étaient accusés «d'activités criminelles graves».

Le blogue Zone9, inaccessible en Éthiopie, affirme sur son site que six de ses contributeurs et trois journalistes indépendants ont été arrêtés les 25 et 26 avril et inculpés pour avoir «travaillé avec des militants des droits de l'Homme étrangers (...) et avoir incité à la violence via les médias sociaux pour déstabiliser le pays».

Le Comité de protection des Journalistes (CPJ) a dénoncé «une des pires opérations de répression de la liberté d'expression» en Éthiopie et Amnesty International a estimé qu'elle s'inscrivait dans «une tendance déjà ancienne d'arrestations et de harcèlement de militants et défenseurs des droits de l'Homme, de journalistes et d'opposants».

«Ils sont suspectés de crimes graves et la police enquête», a réagi mardi le porte-parole du gouvernement éthiopien, Getachew Reda, interrogé par l'AFP, sans donner de détails sur les chefs d'accusation pesant sur eux.

«Nous ne prenons pas d'ordre de Human Rights Watch» (HRW), a ajouté M. Getachew, alors que l'ONG de défense des droits de l'Homme a appelé à la libération des personnes arrêtées.

Leslie Lefkow, directrice adjointe pour l'Afrique de HRW, a estimé que ces arrestations «montraient une fois encore que quiconque critique le gouvernement éthiopien serait réduit au silence».

Lundi, une porte-parole du département d'État américain, Jen Psaki, a indiqué que Washington était informé de ces arrestations et avait «réitéré (son) inquiétude de longue date sur la restriction des libertés de la presse et d'expression en Éthiopie».

Le secrétaire d'État américain John Kerry doit se rendre en Éthiopie dans le cadre d'une tournée en Afrique cette semaine et devrait, selon Mme Psaki, aborder le sujet avec le gouvernement éthiopien à Addis Abeba.

«Le moment choisi pour ces arrestations - quelques jours avant la visite du secrétaire d'État américain - est éloquent en ce qui concerne le mépris de l'Éthiopie pour la liberté d'expression», a estimé Leslie Lefkow.

HRW a appelé M. Kerry à réclamer aux autorités éthiopiennes la libération de «tous les militants et journalistes arbitrairement arrêtés ou condamnés au cours de procès inéquitables».

Plusieurs journalistes, militants et opposants ont été condamnés ces dernières années en Éthiopie, sur la base d'une loi antiterroriste controversée, dont le caractère vague permet, selon ses détracteurs, d'étouffer la liberté d'expression et de museler les opposants.

Environ 200 membres du parti Semayawi («bleu» en amharique), une des rares formations d'opposition en Éthiopie, ont par ailleurs été autorisés à manifester dimanche, sous haute surveillance policière, après l'arrestation d'une vingtaine de ses militants, pour réclamer «plus de libertés et une vraie démocratie».