Le Conseil de sécurité des Nations unies devrait adopter mardi un projet de résolution prévoyant des sanctions à l'encontre des responsables de violences en Centrafrique, où la tension reste vive entre communautés chrétienne et musulmane.

Plusieurs convois de combattants de l'ex-coalition Séléka, parmi lesquels des chefs rebelles, ont par ailleurs quitté la capitale Bangui sous escorte militaire durant le week-end.

«Ces sanctions visent des individus qui nuisent à la paix et à la stabilité et entravent le processus de transition politique en Centrafrique, en alimentant les violences, en violant les droits de l'Homme et le droit international humanitaire ou en participant au pillage des ressources de ce pays», a déclaré lundi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères français, Romain Nadal, lors d'un point de presse.

«La mise en place de sanctions est complémentaire des poursuites judiciaires à l'encontre d'auteurs de violations des droits de l'Homme. Tous les auteurs d'exactions devront répondre de leurs actes. La lutte contre l'impunité est un élément fondamental de la réconciliation», a-t-il jugé, soulignant que le Conseil de sécurité se réunissait «à l'initiative de la France».

Dans le centre-ville de Bangui, les populations demeuraient tendues lundi, après les tirs et tentatives de pillages concentrés la veille autour du «PK 5», poumon commercial de la capitale, avec ses centaines de magasins appartenant pour la plupart à des musulmans.

Les populations musulmanes ne sont pas toujours rassurées par le départ des Séléka, craignant en particulier le harcèlement et les attaques des milices chrétiennes «anti-balaka» (anti-machettes).

Selon Peter Bouckaert, directeur des urgences de Human Rights Watch (HRW), l'un des convois emmenant les ex-Séléka a quitté la capitale centrafricaine dimanche accompagné d'une lourde escorte, se dirigeant vers la ville de Bossembélé, au nord de Bangui.

Une centaine de camions de marchandises arrivés à Bangui

Parmi eux, se trouvait notamment le général Mahamat Baher, figure et chef de renseignement de l'ex-rébellion, a-t-on appris de même source, soulignant que les ex-combattants, pour beaucoup originaires de pays voisins comme le Tchad et le Soudan, sont actuellement en négociation avec la force africaine (MISCA) en vue de préparer leur départ.

Contactée, la MISCA a refusé de confirmer ou démentir ces informations.

Par ailleurs, selon des témoignages d'habitants proches du camp Kasaï, l'un des plus gros de la ville, «les ex-Séléka qui s'y trouvaient ont fui avec leurs armes, désertant les lieux (...) par plusieurs vagues successives, gagnant la colline surplombant le camp. Au petit matin (dimanche), ils ont pris en otage des habitants pour les conduire loin du camp et en direction de la sortie nord».

Samedi, des militaires français étaient visibles aux abords du camp Kasaï où ils sont entrés dans la matinée pour «enregistrer les combattants» cantonnés depuis le 5 décembre et le début de l'opération Sangaris, ont expliqué des riverains.

Parallèlement lundi, un important convoi de marchandises est entré dans la capitale centrafricaine, a constaté un journaliste de l'AFP. Venus du Cameroun voisin, une centaine de camions sont entrés dans Bangui pour approvisionner les soldats de la force Sangaris et de la MISCA, mais également l'immense camp de déplacés de Mpoko, situé aux abords de l'aéroport, où vivent plus de 100 000 chrétiens ayant fui les violences.

À peine nommé samedi par la présidente Catherine Samba Panza, le nouveau premier ministre, André Nzapayeké, a fort à faire sur le front des violences interreligieuses et de la crise humanitaire sans précédent qui touche le pays, avec des centaines de milliers de déplacés, dont 400 000 à Bangui, soit la moitié de la population de la ville.

Priorité numéro un: «arrêter les exactions» dans le pays, a indiqué le premier ministre dans un entretien diffusé dimanche par RFI, se plaçant ainsi sur la même ligne que la présidente élue lundi pour remplacer Michel Djotodia.

M. Djotodia, poussé à la démission le 10 janvier sous pression internationale, avait renversé en mars 2013 le régime de François Bozizé à la tête de la coalition rebelle Séléka, à dominante musulmane, responsable d'exactions répétées contre la population majoritairement chrétienne du pays, déclenchant une spirale de violences intercommunautaires dont les civils sont les principales victimes.