Le Soudan a annoncé samedi libérer plus de deux millions de barils de pétrole confisqués au Soudan du Sud pour sortir de l'impasse sur le partage des revenus pétroliers, principale pomme de discorde entre les deux pays depuis l'indépendance proclamée par Juba en juillet dernier.

Les représentants du gouvernement soudanais, engagés dans de très laborieuses négociations avec leurs homologues sud-soudanais à Addis Abeba, ont assuré que trois superpétroliers retenus à Port Soudan et contenant un total de 2,2 millions de barils de pétrole sud-soudanais pouvaient désormais prendre la mer.

«Les bateaux sont prêt à partir immédiatement (...). En ce qui concerne le gouvernement soudanais, la décision a déjà été transmise» aux autorités locales, a déclaré à la presse Said Khatib, membre de la délégation soudanaise.

Le gouvernement soudanais retient depuis le 1er décembre une partie du pétrole exporté par le Soudan du Sud via son territoire - sa seule voie de sortie à l'heure actuelle -, en invoquant l'impossibilité de s'accorder avec les autorités sud-soudanaises sur un tarif pour ce transit.

Le gouvernement sud-soudanais estime que cette ponction, qu'elle évalue à 815 millions de dollars, constitue «un acte de piraterie d'État sur des biens en transit et une violation grave du droit international».

Les autorités sud-soudanaises n'étaient pas immédiatement joignables pour réagir à l'annonce de la délégation soudanaise.

Du pétrole toujours détourné par Khartoum

Outre les trois vaisseaux retenus à Port-Soudan, Khartoum «a également détourné 1,7 million de barils de l'oléoduc (traversant son territoire) vers ses raffineries», a précisé à l'AFP Awad Abdul Fatah, secrétaire d'État soudanais au pétrole. Khartoum n'a pas évoqué une restitution de ce pétrole à ce stade.

Ces ponctions ont conduit à son tour le Soudan du Sud à ordonner il y a une semaine la suspension totale de sa production de pétrole, estimée à 350.000 barils/jour. Selon les autorités du Soudan du sud, la moitié des puits sont déjà fermés.

Le Soudan du Sud a hérité des trois-quarts de la production pétrolière de l'ancien Soudan lors de son indépendance proclamée le 9 juillet dernier, mais il est contraint à ce jour de passer par le Soudan pour l'exporter.

Juba a cependant signé mardi un accord de principe visant à construire un autre oléoduc passant par le nord du Kenya et débouchant sur l'Océan indien via le port de Lamu, sans préciser le mode de financement d'un projet aussi conséquent.

Les négociations sur les modalités de partage de la manne pétrolière, menées pour l'essentiel à Addis Abeba, siège de l'Union africaine (UA), sont dans une quasi-impasse depuis des mois, et une rencontre entre les deux présidents, le sud-soudanais Salva Kiir et le soudanais Omar el-Béchir, avait à nouveau échoué vendredi dans la capitale éthiopienne.

Le geste annoncé par Khartoum vise à «pouvoir signer l'accord général (sur les revenus du pétrole) et arrêter la fermeture» des puits de pétrole sud-soudanais, a déclaré Said Khatib.

Les États-Unis et la Chine - ce dernier pays achetant 5% de ses importations de pétrole aux deux Soudan - ont exhorté les deux pays voisins, qu'une guerre de deux décennies a opposés, à vite trouver un terrain d'entente.

Le différend a dominé la préparation d'un sommet de l'Union africaine convoqué pour dimanche et lundi.

Ce sommet se déroulera dans le tout nouveau siège de l'UA, construit et payé par la Chine pour 200 millions de dollars, et qui sera inauguré samedi par Jia Qinglin, membre du comité permanent du bureau politique chinois et numéro quatre de la hiérarchie chinoise.

Le 18e sommet de l'UA devrait être dominé par la bataille pour la présidence de la Commission, l'organe exécutif de l'organisation, entre le sortant, le Gabonais Jean Ping, et la sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, ministre de l'Intérieur, ancienne ministre des Affaires étrangères et ex-épouse du président Jacob Zuma.