L'armée soudanaise a annoncé dimanche avoir tué Khalil Ibrahim, chef d'un des plus importants groupes rebelles de la région du Darfour, trois jours après que ce groupe a affirmé marcher sur Khartoum pour renverser le régime.

Ibrahim, 54 ans, dirigeait le Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM), le plus militarisé des groupes rebelles du Darfour, région de l'ouest du Soudan ravagée par la guerre civile.

Il a été blessé dans les accrochages jeudi dans la région frontalière entre les États du Darfour-Nord et du Kordofan-Nord, et il «est décédé samedi soir», a expliqué le porte-parole de l'armée, Sawarmi Khaled Saad, ajoutant qu'il avait été enterré peu après son décès.

Ces affrontements ont également fait 30 morts et un nombre indéterminé de blessés parmi les rebelles, a assuré M. Saad. «Douze véhicules ont été détruits dans les affrontements, ainsi que quatre camions et un camion-citerne transportant du pétrole», a-t-il ajouté.

Le JEM a confirmé dimanche la mort de son chef, tout en précisant qu'il avait été tué vendredi par un raid aérien.

«Nous, le Mouvement pour la justice et l'égalité, annonçons à la nation soudanaise que le chef du mouvement et commandant de ses troupes, Khalil Ibrahim Mohammed, a été tué le 23 décembre à 3H00 du matin», a déclaré à l'AFP le porte-parole du JEM, Gibril Adam Bilal, basé à Londres.

Ibrahim a été tué dans son camp par un avion de combat, sur les indications d'un «espion», a expliqué M. Bilal, ajoutant qu'un garde du leader avait également été tué dans le raid et démentant tout affrontement entre les forces rebelles et l'armée soudanaise.

Malgré cette perte, le JEM restera fidèle au programme de son chef: «changer le régime par tous les moyens, y compris les moyens militaires», a-t-il assuré.

L'épouse du chef rebelle et sa fille ont tenté de tenir une cérémonie de deuil à leur domicile dans le sud de Khartoum, mais la police le leur a interdit, a indiqué un témoin à l'AFP.

Les combats se poursuivaient dimanche dans la zone frontalière entre le Darfour-Nord et le Kordofan-Nord, a annoncé le ministre soudanais de l'Information, Abdallah Ali Massar.

Vendredi, M. Saad avait attribué aux forces de Khalil Ibrahim une attaque contre des civils dans le Kordofan-Nord, où elles auraient également pillé les propriétés de chefs locaux.

Jeudi, le JEM avait affirmé que ses troupes avançaient vers l'Est, en direction de Khartoum. Selon M. Bilal, les rebelles avaient atteint En Nahoud, à 120 km à l'est du Darfour, dans l'État du Kordofan-Nord, et continuaient à progresser dans le but de faire tomber le régime du président Omar el-Béchir.

Khalil Ibrahim avait soutenu le coup d'État du président Omar el-Béchir en 1989, avant de tourner le dos au gouvernement et de fonder à la fin des années 1990 un groupe de dissidents en dénonçant la «domination» des Arabes sur la vie politique et économique.

Exilé aux Pays-Bas, il avait annoncé la formation du JEM, de tendance islamiste, dont la base est limitée à la branche Kobe des Zaghawas, un groupe ethnique présent au Soudan et au Tchad.

Le JEM a refusé de signer l'accord de paix du Darfour de mai 2006, estimant que «les mesures sur le partage des ressources et du pouvoir ne répondaient pas de façon adéquate aux causes profondes de la rébellion: l'iniquité structurelle entre le centre (Khartoum) et les régions périphériques», selon International Crisis Group (ICG).

Il n'a pas non plus signé un accord de paix signé en juillet à Doha entre Khartoum et le Mouvement de libération pour la justice (LJM, une coalition de petites factions darfouries rebelles).

En mai 2008, plus de 200 personnes avaient été tuées lors d'une attaque du JEM à Omdurman, ville jumelle de Khartoum. Plusieurs rebelles ont été condamnés à mort pour cette attaque.

Au moins 300 000 personnes ont été tuées et 1,8 million déplacées depuis le début en 2003 de la guerre au Darfour, selon une estimation des Nations unies.