De nombreux habitants de Kauda, dans le Kordofan-Sud, se sont réfugiés dans des grottes pour fuir les bombardements et ceux qui sont restés dans la ville, un bastion rebelle dans cette région des Monts Nouba, ne croient pas que l'accord avec le gouvernement va ramener la paix.

Amar Amoun, parlementaire de l'opposition du Kordofan-Sud se réjouit de la signature d'un accord-cadre entre le gouvernement de Khartoum et la branche nordiste des ex-rebelles du Mouvement populaire de libération nationale (SPLM).

«Mais je suis beaucoup plus sceptique en ce qui concerne l'engagement du Parti national du congrès (NCP, au pouvoir à Khartoum) d'aboutir à un accord de paix définitif», nuance-t-il.

Derrière lui, l'explosion d'une bombe lâchée par un avion MiG trouble le silence de la ville isolée au coeur des Monts Nouba.

«L'expérience nous a appris que le NCP signe les accords de paix mais ne les respecte jamais», explique M. Amoun.

«Nous faisons partie de ce pays et nous devons être traités comme des citoyens à part entière du Soudan du nord», ajoute-t-il.

Il réclame «une citoyenneté basée sur l'égalité des droits culturels, religieux et ethniques, qui doit être inscrite dans la Constitution».

Le Kordofan-Sud, unique État pétrolier du Nord, est en proie depuis le 5 juin à de violents affrontements entre les Forces armées soudanaises (SAF, nordistes) et la branche nordiste du SPLM, qui auraient fait des centaines de morts.

Les Nouba - une ethnie africaine et animiste ou chrétienne, implantée de longue date dans le nord du Soudan, arabo-musulman - se sont battus aux côtés des sudistes pendant la guerre civile (1983-2005).

Kauda, l'un des bastions des rebelles à 115 km à l'est de Kadougli, capitale du Kordofan-Sud, a subi de lourds bombardements et ses habitants se sont réfugiés dans des grottes aux alentours.

«Le marché est vide maintenant parce que les gens ont peur», dit Abil Abrahim, l'un des rares vendeurs dont l'échoppe est encore ouverte.

Les bombardements sur Kauda ont fait des morts et un dispensaire géré par une ONG allemande a reçu 47 personnes blessées dans des frappes aériennes.

«Je n'ai pas confiance dans cet accord de paix, la communauté internationale devrait mettre plus de pression sur le NCP», déclare Joseph Jacob, l'unique docteur de cette clinique nichée dans les grottes des Monts Nouba.

Les bilans sont difficilement vérifiables compte tenu de la difficulté pour les ONG de circuler et d'accéder à certaines régions du Soudan.

Comme dans d'autres régions périphériques, tel le Darfour, le manque d'infrastructures et les discriminations ethniques ressenties alimentent le ressentiment à Kauda, où M. Amoun veut voir dans la lutte des Nouba un exemple pour les autres minorités soudanaises.

«Nous allons continuer la lutte pour réclamer l'auto-détermination, avec un gouvernement propre qui respecte notre religion et notre culture. Ce n'est pas seulement pour les Nouba que nous luttons, c'est pour tous les autres qui sont marginalisés au Soudan», explique-t-il.

De son côté, Cola, un ancien combattant du SPLA, la branche armée du SPLM, doute aussi qu'aucun accord avec Khartoum ne tienne. Il est resté en ville pour pouvoir répliquer en cas d'arrivée des troupes du gouvernement, même si ici rare sont ceux qui y croient.

«Je ne pense pas qu'il y aura un jour à nouveau la paix avec ces gens-là», soupire-t-il.