Le président soudanais Omar el-Béchir, déjà soupçonné par la Cour pénale internationale internationale (CPI) de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité au Darfour, fait désormais l'objet d'un mandat d'arrêt pour génocide, une «victoire» pour les rebelles de cette région du Soudan.

Les juges de première instance ont ordonné lundi qu'un second mandat d'arrêt, pour génocide, soit délivré à l'encontre du président soudanais, en plus du mandat d'arrêt lancé contre lui pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité le 4 mars 2009. Il s'agit du premier mandat d'arrêt pour génocide de la CPI depuis son entrée en fonction en 2003.

«Nous sommes très satisfaits de la décision de la CPI. Il s'agit d'une victoire pour le peuple du Darfour et de l'humanité tout entière. Cela donne espoir au gens du Darfour que justice sera faite», a réagi Ahmed Hussein, porte-parole du Mouvement pour la justice et l'égalité, le plus militarisé des groupes rebelles du Darfour.

Les juges de la CPI ont estimé dans leur ordonnance qu'«il y avait des motifs raisonnables de croire que M. Béchir avait agi avec l'intention spécifique de détruire, en partie, les groupes ethniques des Four, Masalit et Zaghawa», les trois principales ethnies du Darfour, une région en proie à la guerre civile depuis 2003.

Les magistrats ont retenu trois chefs d'accusation de génocide à l'encontre  de M. Béchir, 66 ans : «génocide par meurtre, génocide par atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale et génocide par soumission intentionnelle de chaque groupe ciblé à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique».

La chambre d'appel de la CPI, estimant que les juges de première instance  avaient commis une «erreur de droit», leur avait ordonné le 3 février de réexaminer leur décision de ne pas retenir l'accusation de génocide contre le président soudanais. Le procureur Luis Moreno-Ocampo avait fait appel le 6 juillet 2009.

Dans le premier mandat d'arrêt contre M. Béchir, celui-ci est soupçonné d'être pénalement responsable, en tant qu'auteur indirect ou coauteur indirect, de cinq chefs d'accusation de crimes contre l'humanité, à savoir meurtre, extermination, transfert forcé, torture et viol.

Il est également soupçonné de deux chefs d'accusation de crimes de guerre : le fait de diriger des attaques intentionnelles contre des civils et le pillage.

Pour l'accusation, le président soudanais est responsable du meurtre d'au moins 35 000 civils des trois ethnies entre 2003 et 2005, et de l'expulsion et du viol de centaines de milliers d'entre eux.

Le procureur de la CPI enquête depuis 2005 en vertu d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Darfour, région en proie depuis 2003 à une guerre civile qui a fait 300 000 morts et 2,7 millions de déplacés, d'après l'ONU. Khartoum parle de 10 000 morts.

M. Béchir, au pouvoir depuis 21 ans, est le premier chef d'État en exercice à faire l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI, premier tribunal international permanent chargé de juger les auteurs de crimes de guerre, crimes contre l'humanité et de génocide, le crime le plus grave du droit international.

Les juges ont demandé au greffier de la CPI de «préparer une requête supplémentaire de coopération sollicitant l'arrestation et la remise d'Omar el-Béchir» qui sera transmise au Soudan, à tous les États parties au Statut de Rome et à tous les membres du Conseil de sécurité de l'ONU qui ne sont pas parties au Statut, le traité fondateur de la CPI.