Le chef de la junte guinéenne, Moussa Dadis Camara, blessé par balles jeudi par son aide de camp et évacué au Maroc, se trouve vendredi dans un état «difficile mais pas désespéré», a déclaré le médiateur dans la crise guinéenne, le président burkinabè Blaise Compaoré.

«Actuellement, nous sommes bien sûr «accrochés» à l'évolution de la santé du président Dadis pour mieux organiser l'avenir» de la Guinée, a déclaré à Ouagadougou vendredi après-midi à la presse M. Compaoré. «Ce que nous avons eu comme information il y a de cela une heure par son médecin personnel, c'est que Dadis est dans une situation qui est difficile certes mais qui n'est pas désespérée», a-t-il ajouté.

«Je crois qu'il va subir probablement une opération parce qu'il a reçu effectivement des balles et cela nécessite des opérations», a ajouté le chef de l'État burkinabè.

À la question de savoir si le capitaine Camara était conscient, il a répondu par l'affirmative.

Le capitaine Camara, chef de la junte arrivé au pouvoir en Guinée le 23 décembre 2008 après la mort du président Lansana Conté, a survécu jeudi à une tentative de meurtre de son aide de camp le lieutenant Aboubacar Sidiki Diakité, dit Toumba.

Le capitaine Dadis Camara a été évacué au Maroc vendredi matin.

Assurant qu'il n'était parti que «pour un contrôle complémentaire», un porte-parole de la junte avait alors déclaré : «Le chef de l'État va bien, il a pris son petit déjeuner et a réuni ses différents chefs d'état-major».

La junte avait aussi assuré jeudi soir que le capitaine Dadis se portait «bien», en refusant de commenter les informations circulant à Conakry sur une blessure à la tête.

Mais une source gouvernementale sénégalaise a évoqué «une blessure assez profonde» et un militaire burkinabè a assuré que le capitaine guinéen avait «reçu des éclats de balles dans la tête».

«Comme c'est un peu délicat, il n'a pas voulu d'intervention (médicale) à Conakry», a ajouté cet officier, précisant qu'il avait été acheminé au Maroc dans un avion affrété par le président burkinabè Blaise Compaoré, chargé d'une mission de médiation en Guinée.

Le Sénégal avait également envoyé jeudi soir un avion à Conakry pour pouvoir transporter, si nécessaire, le chef de la junte guinéenne vers Dakar. Mais l'appareil médicalisé est finalement revenu sans lui.

Quant à son agresseur présumé, Toumba, il se trouvait vendredi «dans un endroit sûr», selon son entourage, refusant d'en dire plus.

Un peu partout, les Guinéens spéculaient vendredi sur l'état de santé réel du capitaine putschiste, porté au pouvoir par l'armée le 23 décembre, au lendemain de la mort du dictateur Lansana Conté (1984-2008).

Cette tentative de meurtre intervient deux mois après le massacre d'opposants qui réclamaient la fin de la «dictature militaire» et exigeaient que le chef de la junte ne soit pas candidat à la prochaine présidentielle.

Toumba est sur la sellette depuis cette tuerie, car il a été désigné par de nombreux témoins comme un meneur de la répression sanglante qui a fait au moins 150 morts selon l'ONU.

«Tous les témoignages ont indiqué que les meurtres ont été exécutés par des membres de la garde présidentielle (...) et que l'officier commandant les + bérets rouges+ dans le stade était le lieutenant Aboubacar Diakité, dit Toumba», avait écrit l'organisation Human Rights Watch (HRW) dans un rapport.

Trois commissaires mandatés par l'ONU pour enquêter sur ce massacre étaient arrivés le 25 novembre à Conakry, et devaient normalement achever vendredi leur première mission sur le terrain.

Un calme apparent régnait dans la capitale, mais deux importants barrages militaires étaient établis aux sorties de la presqu'île de Conakry.

À Paris, le secrétaire d'État français à la Coopération Alain Joyandet a estimé que «l'éventuel retrait de Dadis Camara ne solutionne pas tout», sans pouvoir donner d'indications sur son état de santé.

L'agression de Dadis «prouve que le climat là-bas est délétère et qu'on a besoin d'urgence d'un plan de sortie de crise qui conduise à des élections», a-t-il dit.