Le piratage au large des côtes somaliennes est contrôlé par la criminalité organisée attirée par la perspective de fortes rançons, ont souligné mercredi des représentants d'Interpol en marge de la 78e Assemblée générale de l'organisation internationale réunie à Singapour.

Les pirates disposent d'une logistique de plus en plus sophistiquée qui leur permettent de s'emparer de navires toujours plus au large des côtes, ont relevé ces policiers.

«Il s'agit de criminalité organisée», a déclaré à l'AFP le directeur exécutif des services de police d'Interpol, Jean-Michel Louboutin, ajoutant que des non Somaliens étaient «certainement» impliqués dans cette activité.

Il a estimé que la présence d'une flotte internationale pour sécuriser le golfe d'Aden était insuffisante pour résoudre le problème, qui a aussi des dimensions sociales et économiques.

Le responsable australien de la sécurité des transports, Mick Palmer, a souligné les moyens de plus en plus perfectionnés dont disposent les pirates pour s'emparer des navires et de leur équipage.

«Leur armement est de plus en plus perfectionné, leurs attaques ont lieu toujours plus au large, jusqu'à 1200 milles maritimes», «et ils bénéficient d'une assistance sophistiquée pour localiser de gros navires de commerce», a-t-il relevé.

Selon le responsable australien, les simples pirates somaliens ne touchent qu'un faible pourcentage des rançons -environ 10000 dollars sur une moyenne de deux millions de dollars par opération- et la criminalité organisée rafle le reste.

Un demi-million de dollars serait ainsi versés à ceux qui transportent la rançon, habituellement par hélicoptère, jusqu'au bateau piraté, et la même somme reviendrait aux négociateurs.

«Il y a beaucoup d'argent à se faire avec la piraterie.» Mick Palmer, responsable de la sécurité australienne.

Il a jugé essentiel de s'en prendre à l'ensemble de la filière pour combattre efficacement la piraterie car «aucun criminel ne fait des affaires pour perdre de l'argent», a-t-il dit.

Outre la rançon payée, les compagnies maritimes perdent en moyenne sept millions de dollars à chaque bateau piraté, immobilisé en moyenne durant 70 jours.

Un représentant de la police somalienne, le général Abdi Hassan Awaleh, a déclaré aux médias que la présence «illégale» de navires étrangers pratiquant une pèche «sans limites» avait poussé les pécheurs somaliens à se tourner vers la piraterie.

Le policier somalien a ajouté que l'absence de gouvernement en Somalie entre 1991 et 2004 avait également contribué au problème.

M. Louboutin a indiqué qu'Interpol s'efforçait d'apporter à la Somalie une expertise technique, notamment pour constituer une base de données et un ficher d'empreintes digitales des suspects.

«Il est très important de comprendre qu'il ne s'agit pas que d'un problème militaire» a-t-il dit.

Un thonier géant espagnol, l'Alakrana, a été capturé le 2 octobre entre la Somalie et les Seychelles, avec 36 marins à son bord. Les pirates réclament une rançon de quatre millions de dollars et exigent la libération de deux des leurs arrêtés par la marine espagnole.

Les pirates somaliens détiennent actuellement 4 navires étrangers et 111 marins, selon l'ONG Ecoterra International, qui suit les questions de piraterie dans le Golfe d'Aden et l'océan Indien.