Face à la détermination du président nigérien Mamadou Tandja de se maintenir au pouvoir, l'opposition observe mercredi une «Journée pays mort» alors que son chef de file a été brièvement interpellé la veille par la gendarmerie.

Dirigeant du Front de défense de la démocratie (FDD), Mamadou Issoufou a été relâché mardi soir après environ une heure d'interrogatoire.

«On l'a questionné sur les récentes déclarations de l'opposition demandant aux forces de l'ordre de plus obéir aux ordres du président Tandja», a indiqué mercredi à l'AFP un proche de l'opposant sous couvert d'anonymat.

À Niamey, les activités économiques tournaient plutôt au ralenti mercredi matin après l'appel de l'opposition et des syndicats à une «Journée pays mort» pour protester contre la volonté du président Tandja de rester au pouvoir au-delà de son mandat légal.

On ne se bousculait pas dans les trois principaux marchés de la capitale, notamment «le Grand marché» et le «Petit marché» où de nombreux commerces avaient tiré le rideau de fer, a constaté un journaliste de l'AFP.

«J'aurai mieux fait de rester à la maison, il n'y a pas de clients», dit Abdou Soulé, un commerçant non gréviste.

Dans les quartiers populaires, boucheries et petit commerces étaient en revanche ouverts comme à l'habitude.

La circulation était fluide au centre ville où l'on pouvait voir des taxis.

«C'est une affaire de politiciens, moi je cherche de quoi manger», affirme à l'AFP un chauffeur de taxi.

«Ce pays va très mal, et ça risque d'être pire avec les menaces des sanctions des bailleurs de fonds», prévient en revanche Elhadj Sani, un militant «anti-référendum».

La plupart des banques et compagnies d'assurances ont ouverts leurs portes mais étaient désertes pour la plupart. En fin de matinée, seuls quelques poignées de clients se pressaient aux guichets d'une des plus importantes banques de la ville.

Le mouvement est en revanche largement suivi dans l'administration, notamment les ministères.

À Zinder, la seconde ville du pays, «les boutiques et étalages du grand marché sont fermés. Les gens ont respecté notre mot d'ordre, nous sommes satisfaits», indique un communiqué de la section du FDD lu sur une radio locale.

Selon plusieurs radios privées l'opération «pays mort» a été «diversement suivie» dans d'autres villes comme Dosso et Tillabéry (ouest).

Pour le FDD, il était «trop tôt» en milieu de journée pour tirer un bilan de l'opération déclenchée pour coïncider avec l'ouverture en Libye d'un sommet de l'Union africaine (UA).

Interrogé à la radio nationale, le ministre de l'Intérieur, Albadé Abouba, a de son côté jugé que «ces appels aux grèves et la journée 'pays mort' témoignaient du désarroi» de l'opposition.

Décidé à rester au pouvoir après 10 ans à la tête du pays, Mamadou Tandja a dissous le parlement, puis la Cour constitutionnelle qui s'opposait à son projet de référendum le 4 août pour modifier à son profit la constitution et ainsi briguer fin 2009 un troisième mandat.

Il s'est également arrogé des «pouvoirs exceptionnels» qui lui permettent de gouverner seul par décrets et ordonnances.

La France, ancienne puissance coloniale, ainsi que l'Union européenne ont fermement condamné mardi les dernières décisions du président nigérien.

Le secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Abdou Diouf, a de son côté exprimé sa «très forte inquiétude», faisant état de «menaces qui pèsent sur la paix et la stabilité» au Niger, pays membre de l'OIF.

L'ancien président sénégalais a appelé à «un retour au strict respect des principes de la démocratie et des règles de l'État de droit».