Sauf erreur, un orateur hué par les délégués d'une convention républicaine, ça ne s'était pas vu chez les républicains depuis 1964. Cette année-là, le gouverneur de New York Nelson Rockefeller avait été chahuté par la foule après avoir critiqué l'extrémisme de Barry Goldwater, candidat présidentiel du parti, qui devait subir une dégelée en règle face à Lyndon Johnson.

Hier soir, Ted Cruz n'a pas critiqué Donald Trump. Mais il a soulevé la colère de plusieurs délégués en refusant d'appuyer ce dernier et en appelant les républicains à voter selon leur conscience.

Situés tout juste en face de la tribune, les délégués de New York ont été les premiers à faire entendre leur colère, scandant «Nous voulons Trump!» et «Respecte le serment!», une allusion à la promesse faite par les candidats à l'investiture républicaine d'appuyer le vainqueur de la course.

Trump a choisi ce moment pour faire une entrée inattendue dans le Quicken Loans Arena, comme pour faire de l'ombre à son ancien rival. Selon cet article du New York Times, il entretenait un mince espoir de recevoir l'appui du sénateur du Texas, même s'il avait lu avec déplaisir plus tôt dans la journée le texte de son discours, qui ne contenait qu'une seule mention de son nom (pour le féliciter de son investiture).

Pourquoi Trump a-t-il invité Cruz à s'adresser à la convention républicaine sans obtenir une assurance d'appui en retour? Pourquoi a-t-il permis à Cruz de mettre en relief les divisions au sein du GOP au moment où ce dernier veut projeter une image d'unité? Cela fait partie des mystères de cet événement dont l'organisation fleure l'amateurisme depuis le premier jour.

Autre question : le discours de Cruz lui servira-t-il de tremplin pour l'élection présidentielle de 2020 ou le confinera-t-il à la catégorie des plus grands traîtres de l'histoire du GOP?

«Je n'ai rien dit de négatif envers Donald Trump. Et je ne vais pas le faire», s'est-il défendu ce matin en conférence de presse, ajoutant qu'il écoutera avec attention ce soir le discours du candidat républicain.

Plus tard, il a ajouté cette phrase qui témoigne de son ressentiment à l'égard de Trump : «Je n'avais pas l'intention de me comporter comme un chiot servile et de dire merci beaucoup pour avoir sali ma femme et mon père.»

Chose certaine, le discours de Cruz a relégué au second plan celui de Mike Pence, un discours solide et susceptible de plaire à la fois aux militants républicains et à certains cols bleus démocrates dont Trump aura besoin pour triompher en novembre. Contrairement à d'autres orateurs, le gouverneur de l'Indiana a réussi à insérer une pointe d'humour dans ses attaques contre Hillary Clinton, un ingrédient essentiel en politique.

«Hillary Clinton veut un nouveau titre, et j'en voudrais un aussi si j'étais secrétaire du statu quo», a-t-il notamment déclaré.