«Qu'est-il arrivé au président Trump qui nous a demandé de présenter une entente et qui a promis d'en assumer les conséquences? Qu'est-il arrivé à ce président Trump?»

Le chef de la minorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a posé ces questions après que 49 sénateurs - 44 démocrates et cinq républicains - ont bloqué la tenue d'un vote sur un projet de budget provisoire destiné à éviter un «shutdown», la fermeture partielle de l'administration fédérale.

Le sénateur Schumer aurait peut-être obtenu une réponse à ses question s'il s'était adressé au «président Kelly». Je parle de John Kelly, chef de cabinet de la Maison-Blanche, dont les positions en matière d'immigration sont aussi «restrictionnistes» que celles du conseiller de la Maison-Blanche Stephen Miller et de son ancien patron, le ministre de la Justice Jeff Sessions.

Pour la deuxième fois en l'espace de huit jours, le général à la retraite a tué dans l'oeuf l'amorce d'une entente entre Donald Trump et des sénateurs désireux de régulariser le statut des «Dreamers». Il a contribué jeudi dernier à retourner le président comme un gant après que ce dernier a manifesté de l'intérêt envers un accord de principe conclu par groupe bipartite de sénateurs. Il a convaincu le chef de la Maison-Blanche qu'il serait incapable de «vendre» cet accord au Parti républicain.

Le même scénario s'est reproduit hier. Après leur réunion à la Maison-Blanche, Donald Trump et Chuck Schumer ont tous les deux parlé de «progrès» et adopté un ton positif voire optimiste, le président évoquant même «une excellente réunion préliminaire». Le démocrate s'était notamment montré ouvert au financement du mur à la frontière mexicaine en échange de la régularisation des Dreamers. Selon cet article du New York Times, les deux hommes ont continué à échanger au téléphone après cette rencontre mais les négociations ont pris fin quand John Kelly a pris l'appareil et énuméré une longue liste d'objections à l'accord que le président et le sénateur étaient en train de négocier. Stephen Miller a sans doute participé à la rédaction de cette liste.

Michael Wolff, dans son livre Fire and Fury, dépeint Donald Trump comme un homme qui épouse souvent l'opinion de la dernière personne à laquelle il a parlé. À la Maison-Blanche, cet homme est souvent John Kelly.

Quoi qu'il en soit, dès l'aube, Donald Trump s'est empressé ce d'imputer à l'opposition la responsabilité de la paralysie du gouvernement. «Les démocrates sont bien plus préoccupés par les immigrants illégaux que par notre grande Armée ou la Sécurité à notre dangereuse frontière Sud», a-t-il tweeté. «Ils auraient pu facilement conclure un accord mais ils ont préféré jouer la carte du shutdown à la place.»

Un premier sondage ABC News/Washington Post indique que 48% étaient prêts à imputer à Donald Trump et aux républicains du Congrès la responsabilité de la fermeture des agences fédérales contre 28% qui étaient prêts à blâmer les démocrates du Congrès. L'écart se réduira peut-être si le «shutdown» se prolonge.

En attendant, les élus du Congrès sont de retour au travail aujourd'hui pour tenter de trouver une solution qui permettra de mettre un terme à cette énième illustration du dysfonctionnement de Washington. Le sénateur républicain d'Arizona Jeff Flake a évoqué la possibilité de tenir un vote sur un projet de budget provisoire pour financer les agences fédérales jusqu'au 8 février, date qui coïnciderait avec la tenue d'un vote sur l'accord de principe sur l'immigration présentée la semaine dernière par les sénateurs Lindsey Graham et Dick Durbin. Semble-t-il que le chef de la majorité au Sénat Mitch McConnell serait ouvert à un tel scénario.

Mais qu'en penserait le président Kel... euh... Trump?