Testés dans quelques aéroports dans le monde, mais très controversés parce qu'ils dessinent à l'écran le corps dévêtu, les scanners corporels pourraient envahir massivement les zones d'embarquement suite à l'attentat manqué perpétré à l'approche de Detroit vendredi.

Des experts suggèrent que cette tentative d'attentat aurait pu être évitée si les contrôles dans les aéroports se faisaient à l'aide de scanners corporels plutôt que de portiques de sécurité.

Le suspect a tenté de faire sauter l'Airbus de la Northwest en mélangeant un liquide inflammable contenu dans une seringue avec de la penthrite, un explosif très puissant qu'il avait caché le long de sa cuisse, deux composants qui ne peuvent pas être détectés à l'aide des portiques de sécurité classiques.

Lundi, le ministre britannique de l'Intérieur, Alan Johnson, a indiqué qu'il envisageait d'installer «aussi rapidement que possible» des scanners corporels dans les aéroports du Royaume-Uni pour pouvoir parer ce type de dispositif indétectable avec les moyens conventionnels.

Aux Etats-Unis, ces scanners sont déjà à l'oeuvre dans 19 aéroports, mais aussi dans une poignée de palais de justice ou de prisons, selon l'autorité américaine des transports (TSA).

Et lundi la Travel Industry Association a demandé dans un communiqué la mise en place de «nouvelles techniques pour scanner» les passagers comme «les scanners corporels», «une technologie prometteuse».

Semblables à des cabines, les scanners corporels transmettent des fréquences dont les ondes traversent les vêtements et dessinent sur l'écran le corps dévêtu, en trois dimensions. Si l'image ne fait pas apparaître tous les détails du corps elle reproduit néanmoins très fidèlement la courbure d'un sein...

L'appareil testé dans plusieurs aéroports d'Europe devait être expérimenté pour la première fois en France, à Nice. Le projet avait été enterré suite aux réserves émises par Bruxelles, qui avait écarté fin 2008 l'idée de recourir à ces scanners dans tous les aéroports de l'Union européenne.

L'eurodéputée Martine Roure avait salué la décision, jugeant «disproportionné de soumettre tous les passagers à ce type de contrôle au nom de la lutte contre le terrorisme».

L'attentat manqué de vendredi pourrait rapidement changer la donne.

D'autant que les attentats ou tentatives d'attentat en vol appellent souvent une innovation technique: les portes de cockpit blindées après le 11-Septembre; les chaussures passées aux rayons X et les briquets confisqués après la tentative de Richard Reid d'allumer l'explosif dissimulé dans sa chaussure ou l'interdiction des liquides en cabine suite à la mise au jour en 2006 d'un complot destiné à faire sauter des avions avec des explosifs liquides.

Interrogé par l'AFP, Bruce Hoffman, expert en terrorisme à l'université de Georgetown, estime que les «scanners corporels» sont les seuls capables de détecter le type de dispositif utilisé vendredi.

Si le penthrite était «hermétiquement emballé dans du plastique, même des chiens n'auraient pas pu le détecter», dit-il.

Même son de cloche chez Douglas R. Laird, l'ancien directeur de la sécurité de Northwest, selon lequel «si vous n'utilisez pas un scanner corporel, vous ne pouvez pas savoir ce qu'une personne a sous ses vêtements».

Néanmoins, pour Jimmie Carol Oxley, universitaire américaine experte en explosifs, le prélèvement de particules sur un passager ou dans son bagage, déjà pratiqué de façon aléatoire dans certains aéroports, permet aussi de déceler les explosifs de type penthrite.

En outre, les scanners corporels coûtent plus d'un million de dollars, quand un rayon X vaut moins de 50 000 dollars, selon M. Laird.