Le gouvernement espagnol a défendu mercredi la démarche entreprise par le juge Baltasar Garzon de demander des informations sur les disparus de la Guerre civile et du franquisme avant l'ouverture éventuelle d'une enquête.

La demande d'information officielle lancée par le juge Garzon, qui entrouvre pour la première fois la porte à une enquête sur les disparus du franquisme, a suscité les critiques de la droite et le scepticisme de nombreux juges en Espagne.

Le ministre socialiste de l'Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba, est venu mercredi à la rescousse du juge de l'Audience nationale, soulignant que le fait de recenser les morts ne conduisait pas à rouvrir les plaies du passé mais au contraire à «les refermer».

«Je ne comprends pas ce qui doit nous amener à ne pas aider les fils et petits-fils à savoir définitivement où sont enterrés leurs parents», a estimé le ministre sur la radio Punto Radio.

Le leader de l'opposition de droite, Mariano Rajoy s'est prononcé contre la démarche du juge, se déclarant opposé à la «réouverture des plaies du passé par qui que ce soit», tout comme il s'était prononcé contre la loi de la «Mémoire historique» votée en octobre 2007 pour réhabiliter les victimes du franquisme.

Plusieurs associations de magistrats se sont déclarées sceptiques sur les fondements juridiques de la démarche alors que le juge Garzon a lancé cette procédure à la suite de demandes d'associations de victimes, avant même de s'être prononcé sur le caractère recevable de celles-ci.

Miguel Angel Gimeno, porte-parole de l'association progressiste Juges pour la démocratie, souligne en particulier qu'une cause au pénal ne peut prospérer lorsqu'on sait que personne ne pourra s'asseoir sur le banc des accusés.

Une loi d'amnistie, votée en 1977, durant la «transition» vers la démocratie, avait jusqu'à présent empêché toute poursuite pour les crimes liés à la Guerre civile et au franquisme, prescrivant les crimes découlant «d'actes politiques» commis avant décembre 1976.

«Ce n'est pas un problème de compétence mais de capacité à inculper d'un point de vue pénal», souligne-t-il mercredi dans les colonnes du journal ABC.

Le représentant ajoute que s'il s'agit de crimes de droit commun, il y a prescription, si longtemps après les faits, et que si la qualification de crimes contre l'humanité est retenue, il ne sera pas possible non plus de juger, car on ne peut juger pour un crime dont le concept n'existait pas à l'époque des faits.

Dans une décision rendue publique lundi, le juge Garzon a demandé à plusieurs institutions espagnoles des renseignements sur des milliers de personnes encore portées disparues à la suite de la guerre civile espagnole (1936-39) et du franquisme (1939-75), en réponse aux demandes d'une dizaine d'associations de familles de victimes.