La présidence française de l'Union Européenne milite pour un rapprochement de l'Europe et de l'Afrique dans les négociations sur le climat pour mieux «convaincre le reste du monde» et lutter contre «le caractère irréversible» du réchauffement planétaire.

Intervenant lors d'une réunion du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) à Cotonou, le ministre français de l'Ecologie Jean-Louis Borloo a lancé mardi un appel pour une alliance Europe/Afrique.

«Je suis venu vous demander que nous nous aidions mutuellement à convaincre le reste du monde. Il faut changer le caractère irréversible du changement climatique», a-t-il lancé devant ses homologues représentant quelque 14 pays de l'Afrique de l'ouest.

L'objectif est de «parvenir à une déclaration commune Europe/Afrique avant la réunion de Copenhague», a-t-il précisé.

La Conférence de Copenhague de décembre 2009 doit aboutir à un accord mondial pour la réduction des émissions de CO2 après 2012 à l'expiration de la première phase du protocole de Kyoto.

Une alliance Europe/Afrique, étendue aux états insulaires du Pacifique du sud, représenterait la majorité des voix dans les négociations des Nations Unies sur le climat, a plaidé le ministre. «Si les premiers pollueurs et les premières victimes (du changement climatique) se mettent d'accord, cela fait une tenaille», a-t-il commenté devant quelques journalistes.

Et pour donner des gages à ses interlocuteurs africains, il a émis l'idée de «recentrer sur l'Afrique» les fluxs financiers provenant des mécanismes de développement propre (MDP).

Les MDP permettent aux pays développés de compenser une partie de leurs émissions de CO2 en investissant dans un projet «propre» au sud portant notamment sur l'énergie ou la reforestation.

Or, les MDP ne bénéficient pratiquement pas à l'Afrique, qui n'en recueille que 2% contre 45% en Chine, selon les experts de l'ONU. Monique Barbut, la présidente du FEM, applaudit à l'idée du ministre français: les sommes dégagées par la taxation des émissions devraient profiter «aux pays qui souffrent le plus du changement climatique», a-t-elle commenté.

Car «ne pas s'occuper des problèmes posés par le changement climatique en Afrique, c'est reculer une échéance sociale grave: on ne pourra pas échapper aux migrations écologiques», a-t-elle ajouté.

La faiblesse des investissements MDP en Afrique s'explique, selon elle, par le fait que les entreprises s'intéressent aux gros projets susceptibles de générer d'importantes quantités de crédits carbone, alors qu'en Afrique il s'agit généralement de micro-projets.

Elle suggère de regrouper plusieurs projets, 10 à 15, au sein d'un seul programme éligible à un financement MDP. La proposition de Jean-Louis Borloo a été bien accueillie par ses interlocuteurs africains, notamment le ministre sénégalais de l'Environnement, Djibo Ka qui a dit «l'approuver parfaitement».

Dans les négociations sur le climat, l'Afrique siège au sein du G-77, coalition de quelque 130 pays du sud dont les grandes économies émergentes comme la Chine.

Devenue, selon un institut néerlandais, le premier émetteur de C02 dans le monde devant les États-Unis, la Chine ne cesse par ailleurs de renforcer sa présence économique et ses investissements en Afrique, notamment dans les forêts et les matières premières.

«Avoir l'Europe d'un côté et l'Afrique de l'autre, représentée par le G77, ce n'est pas très pertinent», a souligné M. Borloo, en faisant valoir les divergences d'intérêt au sein du G77 entre des économies en surchauffe comme la Chine et des nations africaines qui comptent parmi les plus démunies.