Le marché prend au sérieux les oppositions à l'achat d'Astral Media (T.ACM.A) par le conglomérat BCE (T.BCE). Les actions d'Astral ont touché un bas niveau de 46,52$ à la Bourse de Toronto, en cours de séance hier, un écart de 7% par rapport aux 50$ pièce offerts par BCE. Elles ont fermé à 47,05$, en baisse de 3,25% sur la veille. À l'approche de la clôture de la transaction, le doute est permis.

L'opération publique d'achat (OPA), qui devrait se concrétiser au second trimestre de l'année en cours, a déjà été acceptée avec une immense majorité de 99,8% par les détenteurs d'actions subalternes d'Astral, lors d'une assemblée extraordinaire expéditive. L'arrangement a également été déclaré équitable pour les actionnaires d'Astral par la Cour supérieure du Québec.

L'arrangement demeure toutefois conditionnel aux approbations du Bureau de la concurrence et du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Le Bureau de la concurrence a déjà commencé l'examen du dossier. Les audiences du CRTC débutent le 10 septembre.

Le projet de 3,4 milliards fait face à un front commun des PDG de Québecor, Cogeco et Eastlink, Pierre Karl Péladeau, Louis Audet et Lee Bragg, qui expriment leurs craintes dans de pleines pages de journaux. Avec 79 chaînes télé, 107 stations de radio et 100 sites web, les parts de marché de BCE grimperaient de 29% à 38%, ce qui est supérieur à la limite de 35% fixée par le CRTC, une concentration dangereuse pour les concurrents et les consommateurs, plaident-ils.

Rogers et Telus demandent également au CRTC de ne pas approuver la vente d'Astral à Bell Canada. Dans des mémoires déposés le 9 août, elles argumentent séparément que Bell détiendrait une position dominante en télévision de langue anglaise.

Tournure politique

Le dossier a pris une dimension politique ces derniers jours. Le député péquiste Maka Kotto a déclaré samedi que son parti s'engageait à employer tous les moyens à sa disposition pour empêcher ce qu'il a décrit comme une prise de contrôle de Toronto sur les canaux de diffusion du Québec.

Le chef libéral Jean Charest a pour sa part reconnu qu'il avait certaines préoccupations par rapport à cette transaction que le ministre responsable du développement économique avait déjà transmise au Bureau de la concurrence. Il a assuré que, si le CRTC donnait le feu vert à BCE, son gouvernement exigerait des garanties concernant les emplois, le siège social et le fonctionnement de l'entreprise.

Le leader de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, a fait part d'inquiétudes similaires. «Je pense que cette transaction est mauvaise pour le Québec et pour Montréal», a-t-il déclaré lors d'un point de presse vendredi.

La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et Option consommateurs ont aussi joint leur voix au concert de protestations.

Si cette transaction avait lieu, Bell possèderait plus d'une cinquantaine de chaînes spécialisées au Canada, l'une des parts de marché les plus importantes en Occident. Bell deviendrait également propriétaire de nombreuses stations de radio, de l'un des plus importants réseaux d'affichage publicitaire au pays et consoliderait son statut de leader de l'industrie des télécommunications.