Le premier ministre Philippe Couillard ignorait tout des allégations d'agression sexuelle qui pesaient sur Gerry Sklavounos, député expulsé du caucus libéral jeudi.

M. Couillard a déclaré vendredi que sa formation avait agi rapidement lorsque des informations l'ont mis en cause dans une plainte pour agression sexuelle.

À Toronto, pour un conseil des ministres conjoint avec les membres du gouvernement ontarien, M. Couillard a répondu brièvement aux questions relatives au comportement de M. Sklavounos au cours des dernières années.

«Je n'étais pas au courant, a-t-il dit lors d'une conférence de presse. La première fois que j'ai entendu parler de M. Sklavounos et des événements (...), c'est mercredi soir lorsqu'on parlait d'un membre de l'Assemblée nationale, le lendemain d'un membre du Parti libéral du Québec. On a rapidement agi de façon très décisive, tout le monde l'a constaté.»

Jeudi, M. Couillard a annoncé que M. Sklavounos s'était retiré du caucus libéral en raison d'informations qui le mettent en cause dans une plainte pour agression sexuelle.

À Longueuil, la victime présumée de M. Sklavounos, Alice Paquet, a déclaré vendredi que le maintien en poste du député, qui siégera comme indépendant, envoie un message négatif.

«Il continue de prendre des décisions, déjà ça c'est horrible, a-t-elle dit. Qu'on prenne la décision à l'Assemblée nationale qu'il reste là, le message qu'ils lancent en ce moment c'est que c'est correct, que ce n'est pas grave que quelqu'un prenne des décisions. Il a violé, il m'a violée.»

Selon la jeune femme, il est aberrant que M. Sklavounos soit demeuré dans ses fonctions malgré une première plainte déposée contre lui par le Parti québécois il y a quelques années.

«On ne veut pas de ce genre d'homme dans notre Assemblée nationale», a-t-elle dit.

Dans une entrevue au Journal de Montréal, jeudi, M. Sklavounos a nié avoir agressé sexuellement Alice Paquet.

La Coalition avenir Québec (CAQ) a demandé vendredi aux libéraux de faire la lumière sur une plainte déposée contre M. Sklavounos par les péquistes, alors qu'ils étaient au pouvoir.

La députée caquiste Nathalie Roy a déclaré que le cabinet du whip libéral avait dû intervenir auprès de M. Sklavounos en raison de son comportement envers une attachée politique péquiste, entre 2012 et 2014.

Dans un point de presse à l'Assemblée nationale, Mme Roy a affirmé que les libéraux doivent révéler ce qu'ils ont fait à la suite de cette plainte, formulée par le whip du gouvernement péquiste, Marjolain Dufour.

Mme Roy a également invité le personnel de l'Assemblée nationale à porter plainte dans le cas où il aurait subi du harcèlement sexuel ou psychologique de M. Sklavounos.

La députée a exprimé son trouble devant un reportage publié vendredi par le quotidien Le Devoir, qui fait état de situations où d'ex-militants libéraux et d'employés de l'Assemblée nationale auraient constaté le comportement «insistant», «déplacé» et «cruiseur» de M. Sklavounos.

«Ce qui est très troublant, on nous parle ici de propos, de gestes, de textos inappropriés qui auraient été faits et commis à l'égard... On parle de jeunes pages, de jeunes stagiaires, de personnel politique», a-t-elle dit vendredi.

Mme Roy a estimé que devant la gravité des allégations qui pèsent sur lui, qui n'ont pas encore donné lieu à des accusations, M. Sklavounos devrait songer à quitter son poste de député de Laurier-Dorion, à Montréal.

«Il y a une enquête policière qui est actuellement en cours pour des crimes contre la personne, alors c'est grave, les crimes contre la personne, a-t-elle dit. Ce que j'ai dit à M. Sklavounos, c'est que je crois qu'il devrait réfléchir très sérieusement à la possibilité de démissionner de son poste. Et je lui laisse ça en son âme et conscience parce que ce sera impossible pour lui de continuer à travailler dans les circonstances.»

La ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, a déclaré à Montréal que M. Sklavounos avait pris la bonne décision en se retirant du caucus.

«C'est une situation qui a été excessivement difficile pour le caucus jeudi, a-t-elle dit en marge d'un événement à Montréal. Nous voulons que la justice suive son cours.»

Mme St-Pierre n'a pas été en mesure de dire si elle avait observé des gestes déplacés de M. Sklavounos au cours des dernières années.

«Ça ne veut pas dire que parce que quelqu'un vous fait un compliment qu'il est en train de vous faire des propositions, a-t-elle dit. C'est un homme qui est très attachant mais là, il y a des choses graves qui sont alléguées contre lui et il a pris ses responsabilités.»

Par ailleurs, à Québec, l'auberge Louis-Hébert, où Alice Paquet travaillait quand elle a rencontré M. Sklavounos, qui y logeait, a déclaré qu'aucune atteinte à ses employés n'était tolérée.

«Les actes allégués sont profondément bouleversants et jamais notre établissement ne cautionnera pareils agissements, a dit l'entreprise dans un communiqué. D'ailleurs, nous ne tolérerons d'aucun client un manque de respect, de droiture ou de civisme envers nos employés, aussi important ou influent soit-il.»

Archives La Presse Canadienne

Gerry Sklavounos

PHOTO FRANCOIS ROY, LA PRESSE

Des manifestants se sont présentés devant les bureaux du député Gerry Sklavounos aujourd'hui. Celui-ci fait face à des allégations d'agression sexuelle.