À pareille date l’année dernière, Emma Raducanu était inconnue du grand public. Cette année, elle débarque dans la Grosse Pomme avec le titre de championne en titre des Internationaux des États-Unis. Malheureusement, les 12 derniers mois auront été rudes pour la Britannique.

Le 11 septembre de l’an dernier, les New-Yorkais commémoraient le 20e anniversaire du tristement célèbre attentat terroriste du World Trade Center. Pour mettre un petit baume sur cette journée chargée d’émotion, deux jeunes joueuses inattendues, remplies de promesses et portées par l’espoir s’affrontaient en finale sur le court central du stade Arthur-Ashe.

Emma Raducanu a disposé de Leylah Fernandez en deux manches pour devenir la première joueuse issue des qualifications à remporter un tournoi du Grand Chelem. Elle n’avait que 18 ans.

Grâce à cette victoire, les portes de la célébrité se sont ouvertes. Dior, Tiffany & Co., Evian, British Airways, Porsche, Vodafone et HSBC ont tous fait de la jeune étoile montante leur tête d’affiche.

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Emma Raducanu au Met Gala à New York en septembre 2021

Raducanu a gagné près de 2,5 millions d’abonnés sur Instagram et elle est devenue l’une des joueuses préférées des partisans à travers la planète, puisqu’elle est née au Canada, qu’elle a grandi en Grande-Bretagne et qu’elle parle couramment le mandarin et le roumain.

Cependant, ses performances dans l’année qui a suivi n’ont pas été à la hauteur des espérances qu’elle avait suscitées.

Une question de stabilité

Depuis son titre aux Internationaux des États-Unis, Raducanu n’a remporté aucun autre tournoi et a travaillé avec quatre entraîneurs différents. Cette saison, elle cumule une fiche négative de 13 victoires et 15 défaites. Jamais elle n’a collé plus de deux victoires consécutives.

« Ce qui est surprenant, c’est qu’elle avait quand même de bonnes structures, le même coach qui la suivait depuis qu’elle était toute jeune, et là, elle gagne l’US Open et elle change d’entraîneur », souligne Séverine Tamborero, entraîneuse de haute performance, directrice du programme des 15 ans chez Tennis Canada, autrice et analyste.

Raducanu se cherche, et pour une jeune joueuse de 19 ans propulsée ainsi au rang de vedette internationale, ça fait partie du processus. Il demeure tout de même curieux qu’elle ait balayé d’un revers de la main aussi rapidement un passé qui lui avait permis d’atteindre ce statut.

« Avec le recul, je me demande si ce n’était peut-être pas une erreur de vouloir changer très rapidement quelque chose qui semblait vouloir fonctionner. Je trouve qu’on sous-estime la relation que peuvent avoir une athlète et son entraîneur et on sous-estime les conséquences d’une rupture de ces relations-là », a ajouté Tamborero.

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Emma Raducanu a une fiche négative de 13 victoires et 15 défaites cette saison.

Ultimement, elle croit que ce sont ces changements « drastiques » et « la difficulté de s’adapter à ses nouveaux repères » qui ont handicapé la droitière depuis sa conquête.

Raducanu a un talent hors du commun. Elle est actuellement au 11e rang du classement mondial et à son meilleur, elle peut battre n’importe qui. Son jeu de jambes est exceptionnel et son arsenal de coups est renversant.

Toutefois, ce ne sont pas ses habiletés qui sont remises en question. Selon Tamborero, « elle ne s’est pas donné les moyens et les outils pour essayer de maintenir une année potable ».

Des attentes gigantesques

Même si gagner un tournoi du Grand Chelem est une réalisation extraordinaire, ce n’est en rien un gage de succès. Toutefois, les attentes qui accompagnent un tel triomphe sont inévitables, comme pourraient en témoigner Naomi Osaka et Bianca Andreescu.

Il faut arrêter de penser que gagner un [tournoi du] Grand Chelem ou [tout autre] tournoi dicte une saison. Être bon, c’est une chose. Être bon tout le temps, c’est autre chose.

Séverine Tamborero

Entraîneuse renommée et certifiée, surtout auprès de jeunes espoirs féminins, Tamborero offrirait trois conseils à Raducanu, si elle était dans son entourage, sur le point d’amorcer la défense de son titre.

D’abord, être honnête et ne pas éviter ce qui se passe. Elle doit être franche avec tout le monde et admettre que cette saison ne se passe pas comme elle l’aurait souhaité, mais que son objectif demeure de gagner le tournoi pour une deuxième année consécutive. Ensuite, rester elle-même, car c’est comme ça qu’elle a surpris tout le monde l’an passé. Puis gérer ce tournoi comme n’importe quel autre tournoi, car « il ne faut pas laisser le passé dicter ce qui va arriver ».

L’avenir est brillant pour Emma Raducanu, mais elle seule peut savoir comment réaliser plein de nouveaux possibles.