La dernière fois que le volet féminin de l’Omnium Banque Nationale (OBN) a eu lieu à Toronto, en 2019, Bianca Andreescu avait terminé le tournoi le trophée entre les mains. C’est une version améliorée d’elle-même qui se présentera dans son patelin, sur son terrain, là où elle a déjà écrit l’histoire. Ce qui semblait impossible il y a quelques mois à peine.

Il s’en est passé, des choses, depuis trois ans. Une pandémie a perturbé l’ordre mondial, les États-Unis ont changé de président et le Canadien de Montréal a atteint la finale de la Coupe Stanley.

Entre-temps, Bianca Andreescu est passée de la 4e à la 120e place au classement mondial. Blessures, absences et déceptions se sont accumulées et ont marqué la jeune carrière de la Canadienne depuis son triomphe aux Internationaux des États-Unis.

« En 2019, je n’étais peut-être pas la fille la plus en forme sur le circuit, j’étais souvent blessée, a confié Andreescu lors d’un entretien avec La Presse. Mais mon mental était si fort que j’étais capable de surmonter plusieurs épreuves. »

C’est cette force qui lui a notamment permis de surprendre tout le monde, à son retour au jeu à Stuttgart, en avril, six mois après avoir joué son dernier tournoi.

Depuis, elle a rivalisé avec certaines des meilleures joueuses au monde tant sur terre battue que sur gazon, mais surtout, elle a atteint une finale au sixième tournoi qu’elle a disputé, à Bad Homburg. Un exploit peut-être surprenant pour plusieurs dans les circonstances, mais qu’elle croyait réalisable.

« Je le croyais et je savais que ça allait arriver à un moment ou un autre. Je pense que j’étais prête à faire une finale. »

Rester en santé

Pendant qu’elle était loin des projecteurs, l’athlète de 22 ans s’est entraînée extrêmement fort pour être le plus en forme possible. Évidemment, cela fait partie de la description de tâches des athlètes de pointe. Néanmoins, les heures passées dans le gymnase et le temps alloué à revoir son programme de rééducation auront été bénéfiques.

Andreescu est réapparue, et quelques matchs ont suffi pour observer une différence dans son jeu. Elle était devenue plus agile, plus flexible et plus endurante.

Je me sens très bien. Je me sens mieux que jamais.

Bianca Andreescu, lors d’un entretien avec La Presse il y a quelques jours

L’idée derrière cette transformation était d’éviter les blessures le plus possible et, en tel cas, de récupérer plus rapidement. Or, à son premier match au tournoi de San Jose, mardi, elle s’est inclinée sèchement, en deux manches, contre Shelby Rogers. La fin du match a été pénible pour Andreescu, qui a confirmé avoir ressenti des douleurs au dos.

Elle sera à Toronto pour l’Omnium Banque Nationale, mais sa préparation n’a évidemment pas été optimale. Tant sur le plan physique que moral. D’autant que ce tournoi était relativement important, puisqu’il s’agissait de sa première compétition sur surface dure depuis le tournoi d’Indian Wells en octobre dernier.

« Avec ce que j’avais fait à Wimbledon, je ne voulais pas prendre trop de temps de repos avant Toronto. Je voulais jouer des matchs avant. »

Les yeux rivés sur l’OBN

Maintenant que son prochain arrêt sera dans sa région natale, Andreescu a l’intention de défendre son titre devant partisans, parents et amis. Cependant, elle refuse que la conquête devienne son seul indice de réussite. « Je veux me concentrer sur le processus, parce que c’est de cette manière que j’ai obtenu mes meilleurs résultats dans le passé. Je veux juste en profiter et ne pas me faire d’attentes. »

D’ailleurs, en ce qui concerne les attentes, Andreescu valse sur une fine ligne. Elle ne sait pas comment elle sera accueillie par les amateurs torontois, trois ans plus tard.

D’un côté, il y a moyen de se dire que puisqu’elle est encore dans sa phase de retour au jeu et qu’elle demeure l’une des favorites de la foule, les partisans seront plus indulgents à son égard. De l’autre, puisqu’elle est la championne en titre et que les gens savent qu’elle sait comment triompher, il est possible qu’elle subisse plus de pression qu’à l’habitude.

« Je ne sais pas trop à quoi m’attendre. […] Peut-être que les gens vont s’attendre à ce que je gagne encore, même considérant les derniers mois. Ce qui n’est pas une mauvaise chose, car c’est chouette que les gens croient encore en moi », a-t-elle répliqué.

J’aimerais arriver sans pression, juste avoir du plaisir et faire de mon mieux, mais peut-être que ce ne sera pas le cas.

Bianca Andreescu

Cependant, l’une des seules certitudes qui existent est qu’il lui sera difficile de ne pas se mettre elle-même trop de pression sur les épaules. « Je sais que c’est facile à dire, mais c’est difficile à faire. »

Andreescu a encore soif de victoires. À la différence qu’elle sait aujourd’hui comment y parvenir et qu’elle ne le fait plus par ambition personnelle, mais « pour les amateurs, mon équipe, ma famille et mes amis ».

Elle sait que le succès peut être éphémère. Elle sait que son corps demeure fragile. Sauf que Bianca Andreescu est plus heureuse, épanouie et optimiste que jamais. Une victoire qui n’est pas comptabilisée dans les statistiques, mais qui est possiblement sa plus grande en carrière jusqu’à maintenant.