Les médiateurs internationaux ont poursuivi mercredi leurs négociations pour arracher un accord de trêve à Israël et au Hamas à Gaza, où la mort et la faim sont désormais le lot quotidien de la population civile après cinq mois de guerre.

Réunis au Caire, les États-Unis, le Qatar et l’Égypte espèrent obtenir un accord avant le ramadan dans le territoire dévasté et assiégé, où les bombardements israéliens incessants ont fait 86 morts ces dernières 24 heures, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Déclenchées par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre, les opérations de représailles de l’armée israélienne ont plongé la bande de Gaza dans une crise humanitaire catastrophique : 2,2 des 2,4 millions d’habitants sont menacés de famine et 1,7 million ont été contraints de fuir leur foyer selon l’ONU.  

Face à cette guerre dévastatrice qui entre jeudi dans son sixième mois, les États-Unis, principal allié d’Israël, réclament avec de plus en plus d’insistance une trêve avant le ramadan, le mois sacré du jeûne musulman qui commence la semaine prochaine.  

« C’est dans les mains du Hamas », a déclaré mardi le président américain Joe Biden, qui a appelé dans le même temps Israël, qui contrôle l’entrée des aides humanitaires à Gaza, à laisser y entrer « plus d’aide ».

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Rafah, le 6 mars 2024

Une trêve serait associée à une libération d’otages enlevés durant l’attaque du 7 octobre et toujours retenus à Gaza en échange de Palestiniens incarcérés par Israël et à une entrée d’une quantité accrue d’aides à Gaza.

Une délégation du Hamas se trouve au Caire alors qu’Israël n’y est pas présent. Les discussions, commencées dimanche, sont « difficiles » selon la chaîne AlQahera News, proche du renseignement égyptien.

Destructions à Khan Younès

Le Hamas réclame, avant tout accord, notamment un cessez-le-feu total, alors qu’Israël affirme vouloir poursuivre son offensive jusqu’à l’élimination du Hamas, considéré comme une organisation terroriste par les États-Unis et l’Union européenne.

Israël exige que le Hamas fournisse une liste précise des otages. Mais le Hamas a dit ignorer « qui est vivant ou mort » parmi eux.

Le 7 octobre, des commandos du Hamas infiltrés depuis la bande de Gaza voisine ont mené une attaque contre le sud d’Israël qui a coûté la vie à au moins 1160 personnes, la plupart des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles.

Environ 250 personnes ont été en outre enlevées et emmenées à Gaza ; 130 otages y sont encore retenus, dont 31 seraient morts d’après Israël, après la libération de 105 otages en échange de 240 prisonniers palestiniens lors d’une trêve fin novembre.

En représailles, Israël a juré d’anéantir le Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007. Son armée a lancé une offensive de grande envergure qui a fait 30 717 morts dans la bande de Gaza, en majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.

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Hôpital de Deir el-Balah, le 6 mars 2024

Mercredi, une quarantaine de frappes israéliennes ont visé Khan Younès dans le sud, la ville de Gaza dans le nord et Deir el-Balah dans le centre du territoire palestinien, selon les autorités du Hamas qui font état quotidiennement des dizaines de morts dans les bombardements israéliens.

Des dizaines d’habitants ont pu entrer dans la journée à Khan Younès, épicentre pendant plusieurs mois des combats, pour inspecter leurs maisons et emporter ce qu’ils pouvaient récupérer au milieu des décombres, après le retrait des troupes israéliennes du centre de cette ville transformée en champ de ruines, selon un correspondant de l’AFP.

Interrogée sur ce retrait, l’armée israélienne n’a pas commenté dans l’immédiat.

Selon l’armée, 247 soldats ont été tués dans la bande de Gaza depuis le début de son offensive terrestre le 27 octobre.

« Food for Gaza »

Alors que l’aide internationale n’arrive qu’au compte-gouttes, le Programme alimentaire mondial (PAM) a prévenu que la faim atteignait des « niveaux catastrophiques » dans le nord du petit territoire palestinien, rendu difficilement accessible par les destructions, les combats et les pillages.

Selon le ministère de la Santé du Hamas, une fille de 15 ans est « décédée de malnutrition » dans cette région, ce qui porte selon lui à au moins 18 le nombre de Palestiniens morts de malnutrition et de déshydratation.

Face à ce qu’elle a décrit comme une « famine généralisée » à Gaza, l’Afrique du Sud a demandé à la Cour internationale de Justice d’imposer des mesures d’urgence à Israël.

À Londres, après une rencontre avec Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, le chef de la diplomatie britannique David Cameron a affirmé que la situation à Gaza « doit changer ». « En tant que puissance occupante, Israël a la responsabilité légale de veiller à ce que l’aide soit disponible pour les civils. »

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Pour tenter de soulager la population, des avions de transport jordaniens, américains, français et égyptien ont procédé à des parachutages d’aide sur le nord de la bande de Gaza.

Et Rome a annoncé le lancement lundi d’une initiative, « Food for Gaza », dont l’objectif est de coordonner l’aide alimentaire avec les agences spécialisées de l’ONU et la Croix-Rouge.

Ces derniers jours, des avions de plusieurs pays, dont les États-Unis, ont largué des aides sur le nord de la bande de Gaza. Mais cela « ne permettra pas d’éviter la famine », selon le PAM.

« La farine (fournie par l’ONU) ne suffit pas. Nous avons des enfants qui ont besoin de lait », a déclaré Mohammad Abou Audeh, un déplacé, dans la ville de Rafah, située dans l’extrême sud de la bande de Gaza contre la frontière fermée avec l’Égypte.

Selon l’ONU, près de 1,5 million de Palestiniens, la plupart des déplacés, sont massés à Rafah, où Israël a annoncé préparer une offensive terrestre pour, dit-il, parvenir à la « victoire totale » sur le Hamas.

Après le rappel par Israël de son ambassadeur à l’ONU, le porte-parole du gouvernement israélien, Eylon Levy, a affirmé que le Conseil de sécurité devrait « désigner immédiatement le Hamas comme une organisation terroriste » et lui imposer des sanctions.