De violents combats entre Israël et le Hamas secouent mercredi la bande de Gaza plongée dans une catastrophe humanitaire pendant que de nouveaux pourparlers en vue d’une trêve s’amorcent au Caire.

Les bombardements israéliens et les combats entre l’armée et le mouvement islamiste palestinien ont fait 118 morts en 24 heures, selon le ministère de la Santé du Hamas.  

Selon l’ONU, 2,2 millions de personnes, soit l’immense majorité de la population, sont menacées de famine dans la bande de Gaza, assiégée par Israël depuis le début de la guerre le 7 octobre.

La situation est particulièrement alarmante dans le nord, en proie « au chaos et à la violence », selon le Programme alimentaire mondial (PAM), qui a suspendu mardi la distribution de son aide dans le nord.

L’aide humanitaire, soumise au feu vert d’Israël, entre à Gaza essentiellement par Rafah via l’Égypte, mais son acheminement vers le nord est rendu presque impossible par les destructions et les combats qui isolent cette région du reste du territoire.

Les autorités israéliennes ont annoncé mercredi l’entrée la veille de 98 camions avec de l’aide humanitaire dans Gaza, tandis qu’un collectif d’ONG internationales (AIDA) a déploré la lenteur du processus d’inspection et le blocage de dizaines de camions pendant plusieurs jours à la frontière.  

PHOTO OMAR KAMAL, AFP

Nombre de camions d’aide humanitaire entrant dans la bande de Gaza chaque jour depuis le 21 octobre 2023 d’après l’Ocha

Le Croissant-Rouge palestinien a appelé mercredi « les institutions de l’ONU à intensifier leur aide, en particulier pour les zones du nord de la bande de Gaza où 400 000 personnes sont menacées de famine ».

Pourparlers au Caire

Selon des témoins, des combats se déroulaient mercredi dans le sud à Khan Younès, mais dans deux secteurs de la ville de Gaza, dans le nord.

« Nous n’en pouvons plus. Nous n’avons pas de farine. Nous ne savons même pas où aller par ce temps froid », a témoigné Ahmad, un habitant de Gaza-ville. « Nous demandons un cessez-le-feu. Nous voulons vivre. »

À Rafah, des images tournées par l’AFP ont montré des Palestiniens inspectant les ruines d’une maison après une frappe.

PHOTO FATIMA SHBAIR, ASSOCIATED PRESS

Des Palestiniens regardent les dégâts après des frappes à Rafah, le 21 février 2024.

Près d’un million et demi de personnes, selon l’ONU, sont massées dans cette ville située contre la frontière fermée avec l’Égypte.

Le premier ministre Benyamin Nétanyahou a annoncé une prochaine offensive terrestre sur Rafah, afin de vaincre le Hamas dans son « dernier bastion » et libérer les otages détenus à Gaza.

Mais selon un sondage publié mercredi, une majorité d’Israéliens (55,3 %) ne croient pas à une « victoire totale » de l’armée contre le Hamas.

PHOTO MOHAMMED SALEM, REUTERS

Rafah, le 20 février 2024

La perspective d’une offensive à Rafah inquiète la communauté internationale, alors que l’Égypte accueille de nouvelles discussions en vue d’une trêve.  

Le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, installé au Qatar, doit discuter mercredi au Caire avec le chef des services de renseignement égyptiens, Abbas Kamel, notamment de la « première phase » d’un plan élaboré en janvier par les pays médiateurs, Qatar, États-Unis et Égypte, a déclaré une source du Hamas à l’AFP à Gaza.

Cette première phase prévoyait une trêve de six semaines, associée à un échange d’otages contre des prisonniers palestiniens détenus par Israël et à l’entrée à Gaza d’une importante quantité d’aide humanitaire.

Le conseiller du président américain Joe Biden pour le Moyen-Orient, Brett McGurk, se rend mercredi en Égypte et jeudi en Israël.

PHOTO SAID KHATIB, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un camp de réfugiés à Rafah, le 21 février 2024

« Nous voulons qu’un accord soit trouvé […] le plus rapidement possible », a dit à la presse le porte-parole du département d’État, Matthew Miller.

Le Hamas réclame un cessez-le-feu, un retrait israélien de Gaza, la fin du blocus israélien et un abri sûr pour les centaines de milliers de civils déplacés par la guerre.

Israël de son côté affirme que son offensive se poursuivra tant que le Hamas n’aura pas été éliminé et les otages libérés.

Et le parlement israélien a massivement voté mercredi une résolution proposée par Benyamin Nétanyahou s’opposant à toute « reconnaissance unilatérale d’un État palestinien », qui reviendrait selon le texte à récompenser le « terrorisme sans précédent » du Hamas.

Ce vote intervient quelques jours après que le Washington Post a indiqué que les États-Unis et plusieurs pays arabes alliés travaillaient à un plan global destiné à établir une paix israélo-palestinienne durable après la fin de la guerre entre Israël et le Hamas, et prévoyant notamment un calendrier pour l’établissement à terme d’un État palestinien.

« Feu vert » à Israël

La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent lancée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés dans le sud d’Israël.  

Plus de 1160 personnes ont été tuées, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.

Ces attaques du 7 octobre ont donné lieu à des violences sexuelles systématiques et préméditées, indique un rapport d’une organisation israélienne publié mercredi.

Les responsables israéliens ont accusé le Hamas d’y avoir multiplié les agressions sexuelles, y compris des viols et mutilations génitales, ce que le mouvement palestinien a toujours nié.

Le peu de récits directs et publics de survivants et l’absence d’expertises médico-légales n’a pas permis jusqu’ici de dresser un tableau clair de ces exactions et de leur ampleur.

Le rapport de l’Association des centres d’aide aux victimes de viol en Israël (ARCCI), qui chapeaute de centres de lutte contre les violences sexuelles à travers le pays, décrit ces exactions comme une partie intégrante des attaques du 7 octobre.

Il souligne à cet égard les «  similitudes » dans toutes les attaques – contre le festival musical Nova, des kibboutz, des bases militaires et sur les personnes qui ont été prises en otage.

En représailles, Israël a juré d’anéantir le mouvement islamiste, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu’il considère comme une organisation terroriste de même que les États-Unis et l’Union européenne.

L’armée israélienne a lancé une offensive qui a fait 29 313  morts à Gaza, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.

D’après Israël, 130 otages sont encore détenus à Gaza, dont 30 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées le 7 octobre.

Mardi, les États-Unis, alliés d’Israël, ont mis leur veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui exigeait un cessez-le-feu « humanitaire immédiat », estimant que cette résolution aurait mis en danger les délicates négociations en cours sur une trêve.

Le Hamas a dénoncé un « feu vert » donné à Israël pour perpétrer davantage de « massacres ».

PHOTO CORIN FAIFE, AFP

Graphique montrant la répartition des vetos mis par des membres du Conseil de sécurité de l’ONU aux résolutions concernant les territoires palestiniens présentées depuis 1970.

En Cisjordanie occupée, où la guerre à Gaza a provoqué une flambée de violence, les forces israéliennes ont annoncé mercredi avoir tué trois combattants palestiniens présumés lors d’un raid nocturne dans le secteur de Jénine.  

Les échanges de tirs sont devenus quotidiens de part et d’autre de la frontière israélo-libanaise, entre l’armée israélienne et le Hezbollah, allié du Hamas. Mercredi, une frappe israélienne a fait deux morts dans le sud du Liban, selon les médias libanais.