L’armée israélienne est parvenue au cœur de Khan Younès, et les combats se sont intensifiés mercredi dans le sud de la bande de Gaza, au moment où le secrétaire général de l’ONU, craignant un « effondrement total de l’ordre public », a invoqué dans un geste rarissime l’article 99 de la Charte des Nations unies.

Ce qu’il faut savoir

Les combats se sont intensifiés à Khan Younès, importante ville du sud de la bande de Gaza où l’armée israélienne a affirmé avoir « percé » les lignes défensives du Hamas.

Le secrétaire général de l’ONU a utilisé pour la première fois de son mandat un pouvoir lui permettant d’« attirer l’attention du Conseil [de sécurité] » sur un dossier.

Le premier ministre Benyamin Nétanyahou a déclaré que les forces israéliennes encerclaient la maison du chef du Hamas à Khan Younès.

Sur le terrain, mercredi, les résidants de Khan Younès et les déplacés palestiniens venus d’ailleurs dans l’enclave tentaient de s’abriter des frappes israéliennes. Mais loin des combats et du manque de vivres dont souffrent les Gazaouis, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a fait appel pour la première fois de son mandat au plus important outil dont il dispose.

En vertu de l’article 99, il a ainsi « attiré l’attention du Conseil [de sécurité de l’ONU] » sur un dossier qui « pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationale ». Citant notamment les « bombardements constants des forces armées israéliennes » et « l’absence d’abris ou du minimum pour survivre », M. Guterres s’est inquiété que la situation se « détériore rapidement ».

Il a invoqué, dans une lettre adressée au Conseil, « une catastrophe qui pourrait avoir des conséquences irréversibles pour les Palestiniens dans leur ensemble et pour la paix et la sécurité dans la région ».

« Le mandat de Guterres est un danger pour la paix mondiale », a réagi sur le réseau social X le chef de la diplomatie israélienne, Eli Cohen, estimant qu’une telle entreprise « constituait un soutien à l’organisation terroriste Hamas ».

Le gouvernement israélien a toutefois approuvé mercredi une « livraison minimale de carburant – nécessaire pour éviter un effondrement humanitaire et l’apparition d’épidémies – dans le sud de la bande de Gaza », a annoncé sur X le bureau du premier ministre. La quantité livrée sera « déterminée au fur et à mesure » en fonction de la situation humanitaire, a-t-il ajouté.

PHOTO ATHIT PERAWONGMETHA, REUTERS

Frappe israélienne sur Gaza

Des appels internationaux se sont par ailleurs élevés pour exhorter l’État hébreu à mieux protéger les civils, venant notamment du G7, qui a rappelé son soutien à une solution « à deux États ».

« Lignes défensives percées »

À Khan Younès, la plus grande ville du sud de la bande de Gaza, l’armée israélienne a affirmé en soirée avoir « percé les lignes défensives » du Hamas et atteint le centre-ville, « éliminé un certain nombre de terroristes » et détruit environ « 30 entrées de tunnels ».

PHOTO GIL ELIYAHU, REUTERS

Soldats israéliens à l’entraînement dans le plateau du Golan

Des sources du Hamas et du Djihad islamique, autre groupe armé à Gaza, ont indiqué à l’AFP que leurs combattants tentaient de contenir l’avancée des troupes israéliennes.

Tsahal a en outre annoncé la découverte dans le nord du territoire, « au cœur de la population civile », près d’une clinique et d’une école, « d’un dépôt d’armes très important », y voyant une « preuve supplémentaire » de l’utilisation par le Hamas de « boucliers humains ».

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Des Palestiniens quittant la ville de Khan Younès

Elle a par ailleurs affirmé avoir tué à ce jour « la moitié des commandants » du Hamas.

Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, dans une vidéo diffusée par son bureau, a déclaré que les forces israéliennes « encerclaient la maison de [Yahya] Sinouar », chef du Hamas.

Au cours des 24 dernières heures, les corps de plus de 200 Palestiniens tués dans les bombardements ont été transportés dans les hôpitaux, selon le ministère de la Santé du Hamas et des sources hospitalières.

« Où voulez-vous qu’on aille ? »

À la nuit tombante, d’épais nuages de fumée noire et des flammes continuaient de s’élever de la bande de Gaza. Dans la journée, des traînées dessinées par des roquettes tirées du petit territoire palestinien vers Israël ont aussi émaillé le ciel.

Engagée depuis le 27 octobre dans une offensive terrestre contre le Hamas dans le nord de Gaza, en parallèle à sa campagne de frappes aériennes dévastatrices, Tsahal a étendu ses opérations au sol à l’ensemble du petit territoire palestinien surpeuplé.

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Camp de fortune érigé à Rafah

Ce faisant, des Palestiniens ayant fui Khan Younès ont érigé à Rafah un camp de fortune – des tentes avec des toiles, des bâches en plastique et des lattes de bois. Pour leur survie : des branches ramassées ici et là pour faire du feu, de la semoule dans des gamelles pour unique nourriture.

« Où est-ce que vous voulez qu’on aille, bon sang ? », s’est emporté Khamis Al-Dalou. « On a quitté Khan Younès, et maintenant, nous sommes dans des tentes à Rafah, sans toit, sans murs. »

Selon le ministère de la Santé du Hamas, 16 248 personnes, à plus de 70 % des femmes, des enfants et des adolescents, ont été tuées depuis le 27 octobre dans la bande de Gaza par les bombardements israéliens. L’ONU a pour sa part calculé que 28 % du territoire de Gaza tombait désormais sous le coup des ordres d’évacuation quotidiens israéliens.

Avec l’Agence France-Presse