(Jisr Al-Choghour) Au moins 13 personnes, dont des enfants, ont été tuées dimanche dans des frappes aériennes russes sur une région rebelle du nord-ouest de la Syrie, l’attaque la plus meurtrière de l’année dans ce pays ravagé par la guerre, selon une ONG.

Neuf civils, dont deux enfants, ont été tués dans ces raids aériens sur la province d’Idlib, notamment dans un marché aux fruits et légumes de cette ville, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).  

Quatre autres personnes ont été tuées dans une autre frappe près d’Idlib, selon la même source.

« Ces raids russes sont les plus meurtriers en Syrie cette année et constituent un massacre », a déclaré à l’AFP Rami Abdel Rahmane, le directeur de l’OSDH basée au Royaume-Uni.  

Les forces russes, alliées du régime syrien, ont mené ces frappes dans la province d’Idlib en riposte à des attaques de drones rebelles qui avaient tué quatre civils, dont deux enfants, la semaine dernière, a indiqué M. Abdel Rahmane.

Dimanche, « six civils ont été tués à Jisr Al-Choghour et trois combattants rebelles ont été tués à proximité par des frappes aériennes russes », selon le directeur de cette ONG, qui s’appuie sur un large réseau de sources en Syrie.

Un journaliste de l’AFP sur place a vu des nuages de fumée au-dessus du site de l’attaque et des ambulances transportant des blessés depuis le marché.

PHOTO ABDULAZIZ KETAZ, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des camions endommagés par les frappes dans un marché de Jisr Al-Choghour

Ahmed Yazigi, un membre de la défense civile à Jisr Al-Choghour, une ville contrôlée par les rebelles, a fait état de neuf personnes tuées, sans préciser si des combattants se trouvaient parmi elles.

M. Yazigi a dénoncé « une attaque directe contre un marché populaire, source de revenus essentielle pour les agriculteurs ».

« Indescriptible »

Saad Fato, ouvrier de 35 ans ayant survécu au raid a déclaré à l’AFP avoir passé sa matinée à essayer de sauver les blessés.

« Les raids russes nous ont visés pendant que je portais des tomates », a-t-il affirmé.  

« C’est indescriptible tant il y avait des morts, blessés et entrailles » de victimes, a-t-il ajouté, les mains pleines de sang de blessés qu’il essayait de sauver.

PHOTO WHITE HELMETS, FOURNIE PAR REUTERS

Des membres des Casques blancs se portent volontaires.

Un civil, un combattant du Parti islamique du Turkestan (TIP) et deux enfants de combattants du TIP ont aussi été tués par une frappe près de la ville d’Idlib, a indiqué Rami Abdel Rahmane.

Les membres du TIP majoritairement issus de la minorité musulmane ouïghoure de Chine se sont rendus en Syrie après 2011 pour aider les formations djihadistes, dont Hayat Tahrir al-Cham (HTS), dominé par l’ex-branche locale d’Al-Qaïda.

Au moins 30 civils ont été blessés dans les frappes russes, a indiqué M. Abdel Rahmane, précisant que ce bilan était probablement provisoire.

« Opérations spéciales »

Dans la soirée, le ministère de la Défense syrien a déclaré qu’« en réponse aux attaques […] ces derniers jours contre les provinces de Hama et Lattaquié, qui ont tué plusieurs civils », ses forces armées ont effectué « plusieurs opérations spéciales en coopération avec les forces aériennes russes ».

Ces opérations ont visé « des positions des terroristes » dans la province d’Idlib, tuant « des dizaines » d’entre eux et détruisant leurs dépôts d’armes et drones aériens, a ajouté le ministère dans un communiqué relayé par l’agence officielle syrienne Sana.

La Russie est le principal soutien du régime du président syrien Bachar al-Assad et intervient militairement en Syrie depuis 2015.

Avec le soutien de la Russie et de l’Iran, le régime syrien a reconquis la plupart des territoires perdus au début de la guerre, déclenchée en 2011 par la répression de manifestations prodémocratie.

La dernière poche d’opposition armée au régime comprend de vastes régions de la province d’Idlib (ouest) ainsi que des territoires limitrophes des provinces d’Alep, Hama et Lattaquié.

Le HTS est le principal groupe actif dans cette région, où sont aussi présentes d’autres factions rebelles moins influentes, soutenues à des degrés divers par la Turquie.

La guerre en Syrie a fait plus d’un demi-million de morts selon l’OSDH, et déplacé plusieurs millions de personnes.