Démission surprise du premier ministre irlandais mercredi, alors que le pays bouillonne. Bilan d’un mandat contrasté. Pendant ce temps, au pays de Galles…

Nom 

Leo Varadkar

Âge 

45 ans

Fonction

Futur ex-premier ministre de la République d’Irlande

Mots clés 

Taoiseach, symbole, fatigue, référendum, élections

Pourquoi on en parle

Parce que personne ne s’y attendait ! À la surprise générale, le premier ministre irlandais et leader du parti Fine Gael, Leo Varadkar, a annoncé mercredi sa démission de la tête du gouvernement de coalition. « Après sept ans, je n’ai plus l’impression d’être la meilleure personne pour ce poste », a-t-il reconnu. Élu premier ministre à l’âge de seulement 38 ans, il était Taoiseach (chef du gouvernement) depuis 2017, avec interruption entre 2020 et 2022.

Métis et homosexuel

Pour la République d’Irlande, c’est une page qui se tourne. Fils d’un médecin indien et d’une infirmière irlandaise, Leo Varadkar a révolutionné la politique nationale en s’imposant comme le premier chef de gouvernement métis et ouvertement homosexuel d’un pays traditionnellement conservateur. « C’était un signal important pour l’Irlande sur la scène mondiale, résume Gail McElroy, professeure de sciences politiques du Trinity College à Dublin. Il a permis de montrer que nous étions une société progressiste, moderne et libérale… C’était un nouveau genre de politicien. »

Grosse fatigue

M. Varadkar a dit démissionner pour des raisons « personnelles et politiques », ajoutant que les personnalités politiques « sont des êtres humains et ont leurs limites ». Pour Gail McElroy, son départ à l’âge relativement jeune de 45 ans est comparable à celui de la première ministre néo-zélandaise, Jacinda Ardern, qui a quitté ses fonctions en 2023 à l’âge de 42 ans parce qu’elle était « vidée ». « Être premier ministre aujourd’hui est exténuant. Varadkar était fatigué. Il y avait des manifestations jusque devant sa propre maison. Ce qui est assez stressant et nouveau dans la politique irlandaise… »

Grosse défaite

Certains analystes lient aussi sa démission à la débâcle du référendum qui s’est tenu le 8 mars dans le pays. Il s’agissait de moderniser la Constitution – rédigée en 1937 – en modifiant les points sur l’importance du mariage et des femmes au foyer. Les Irlandais ont rejeté massivement la proposition, pour des raisons essentiellement techniques. Mais certains y ont vu un vote sanction à l’endroit de M. Varadkar, alors que les tensions montent dans le pays de 5 millions d’habitants. Fin novembre, l’Irlande a été secouée par des émeutes inédites à l’instigation de militants d’extrême droite et par des incidents et manifestations hostiles à l’accueil de migrants, alors que la crise du logement est à son paroxysme. « Le résultat est sans appel, tranche Christophe Gillissen, spécialiste des questions irlandaises à l’Université de Caen. On peut se demander si les électeurs n’ont pas voté contre lui et pas seulement contre le nouveau texte. Apparemment, ça l’a touché assez durement. »

Un bilan contrasté

Au-delà de ce qu’il pouvait incarner sur le plan symbolique en raison de sa double « différence », Leo Varadkar laisse derrière lui un bilan contrasté. Son premier mandat a surtout été marqué par le séisme du Brexit, où il a joué un rôle central dans les négociations pour éviter le rétablissement d’une frontière entre la république d’Irlande (membre de l’Union européenne) et l’Irlande du Nord (nation constitutive du Royaume-Uni). On lui doit aussi l’organisation d’un référendum pour lever l’interdiction de l’avortement en Irlande, chose faite en 2018. En revanche, il n’a pas montré beaucoup de leadership dans la crise du logement qui afflige actuellement l’Irlande, tempête parfaite due au manque de nouvelles constructions et à l’afflux massif d’immigrants, principalement ukrainiens. « Je pense qu’il n’avait peut-être plus l’énergie. Il semblait moins investi. Une sorte d’usure. En tout cas, il n’a pas été à la hauteur », résume Christophe Gillissen.

Sinn Féin au sud, Sinn Féin au nord

À noter que le départ de M. Vardakar survient à deux mois des élections européennes et moins d’un an avant les prochaines législatives irlandaises. Son départ laisse le temps à son parti, le Fine Gael, de se refaire des forces avant les prochaines élections européennes (8 juin), mais surtout avant les législatives irlandaises, prévues dans moins d’un an. Si les sondages disent juste, la victoire semble acquise au Sinn Féin, parti nationaliste dont la raison d’être est la réunification des deux Irlandes. Ce serait la première fois que cette formation politique est au pouvoir au nord et au sud de la frontière. L’actuel ministre de l’Enseignement supérieur, Simon Harris, est le seul candidat à s’être déclaré à ce stade et fait donc figure de favori pour remplacer M. Varadkar comme leader du Fine Gael et de facto premier ministre de la République d’Irlande.

Avec l’Agence France-Presse

Un premier premier ministre noir au Royaume-Uni

Le nouveau chef du Parti travailliste gallois, Vaughan Gething, a été élu mercredi premier ministre du pays de Galles par le Parlement local, devenant ainsi la première personne noire à diriger une des nations constitutives du Royaume-Uni. Avec cette élection de Vaughan Gething, qui est né en Zambie d’un père gallois et d’une mère zambienne, la diversité continue de s’ancrer dans le pays. Le premier ministre britannique, le conservateur Rishi Sunak, est né en Angleterre, mais ses parents sont d’origine indienne. Le chef du gouvernement écossais Humza Yousaf est lui issu d’une famille originaire du Pakistan. Jusqu’ici ministre de l’Économie du pays de Galles, Vaughan Gething, ancien avocat âgé de 50 ans, succède à Mark Drakeford, 69 ans, qui avait annoncé sa démission en décembre après cinq ans en poste.

Agence France-Presse