Nom
Daniela Klette alias Claudia Ivone
Âge
65 ans
Fonction
Ex-terroriste
Mots-clés
RAF, terrorisme, enquête, intelligence artificielle, capoeira, kalachnikov
Pourquoi on en parle
Daniela Klette a comparu jeudi devant un juge de la cour fédérale d’Allemagne, 10 jours après son arrestation qui fait la une des médias allemands. En cavale depuis 30 ans, elle était l’une des fugitives les plus recherchées d’Europe.
Héritière de la « bande à Baader »
La femme de 65 ans est associée à la « troisième génération » de la RAF (Rote Armee Fraktion ou Fraction armée rouge), groupe d’extrême gauche ultraviolent fondé par Andreas Baader et Ulrike Meinhof au début des années 1970. La « bande à Baader » a fait 34 morts dans les années 1970, 1980 et 1990 (magistrats, policiers, soldats et industriels), avant de se dissoudre en avril 1998. « La RAF est profondément ancrée dans l’imagination allemande et le trauma historique de l’Allemagne d’après-guerre », résume Karin Bauer, professeure d’études allemandes de l’Université McGill.
Bombes et armes automatiques
Daniela Klette est accusée d’avoir participé à un attentat à la bombe manqué contre un bâtiment de la Deutsche Bank à Eschborn en 1990, à une attaque à l’arme automatique contre l’ambassade des États-Unis en 1991 à Bonn, ainsi qu’à un attentat à la bombe commis contre un centre de détention en construction qui avait fait 63 millions d’euros de dégâts en 1993. Elle est aussi accusée d’une tentative de meurtre et de divers vols qualifiés, effectués entre 1999 et 2016 avec complices, vraisemblablement pour financer sa vie en clandestinité. « La troisième génération de la RAF usait de la violence avec moins de discernement. Ses membres étaient moins connus du public que ceux de la première génération, qui étaient des icônes de la violence politique », précise encore Karin Bauer.
Fugitive au grand jour
Recherchée depuis des années par les autorités allemandes, Daniela Klette se dissimulait au grand jour. Elle vivait depuis 20 ans dans un studio au cinquième étage d’un immeuble de Kreuzberg, un quartier bourgeois bohème de Berlin. Elle se présentait sous un faux nom, Claudia Ivone, avec un passeport italien, mais n’avait pas changé son apparence malgré les avis de recherche multiples de la police. Selon des voisins interrogés, notamment par le quotidien Bild, elle était agréable et amicale et « disait toujours bonjour », rapporte l’Agence France-Presse.
Une enquête avec l’IA
Le journaliste d’enquête Michael Colborne, du site Bellingcat.com, a joué un rôle important dans la traque de Daniela Klette. C’est lui qui est parvenu à identifier la « dame amicale » du cinquième étage grâce à l’intelligence artificielle, en particulier le logiciel de reconnaissance faciale PimEys. Partant de photos d’époque, il a vieilli le visage de Mme Klette puis tenté de faire « matcher » le résultat à des photos plus récentes se baladant dans le magma de l’internet. « Je ne m’attendais vraiment pas à grand-chose. Je dois dire que mes attentes ont été largement dépassées », confie le journaliste, encore surpris, en entrevue avec DW News. M. Colborne a retrouvé une femme qui ressemblait beaucoup à Daniela Klette sur la page Facebook d’une association culturelle brésilienne à Berlin, où elle faisait partie d’un groupe de danse capoeira. La police, qui a validé son identité avec ses empreintes, n’avait pas pu mener cette enquête numérique, en raison des lois allemandes très strictes sur la protection de la vie privée.
Une grenade, une kalachnikov, une poussée des extrêmes
Selon les médias allemands, Mme Klette n’a pas opposé de résistance à son arrestation. La perquisition de son domicile a cependant permis de découvrir plusieurs armes de guerre et explosifs, dont une kalachnikov, un pistolet mitrailleur, ou encore une grenade bazooka et des photos récentes d’un ancien complice de la RAF, Burkhard Garweg, toujours recherché lui aussi. L’arrestation de Daniela Klette survient alors que les autorités allemandes doivent faire face à une augmentation des groupes extrémistes, de droite comme de gauche. « La plupart des scientifiques estiment que ces développements sont liés à un changement dans les discours et le climat social, par lesquels l’attitude et les positions des extrémistes de droite ont été normalisées, conclut Axel Salheiser, chercheur à l’Institut pour la démocratie et la société civile, à Iéna, en Allemagne. » Cette « poussée draconienne » nourrit non seulement l’AfD, parti d’extrême droite en hausse dans les sondages, mais aussi l’activisme d’extrême gauche, motivé par son combat contre l’AfD et les mouvements néonazis.
Avec l’Agence France-Presse, DW News, Wikipédia, Techjournalism, Businessworld