(Kyiv) « La même » que pour les nazis : le président ukrainien a promis la défaite à la Russie lundi, jour anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale et à la veille de célébrations en grande pompe et sous haute sécurité à Moscou.

Ce qu’il faut savoir

  • Le 8 mai marque la défaite de l’Allemagne nazie lors de la Seconde Guerre mondiale. Or, à Moscou, les commémorations ont lieu le 9 en raison d’une différence de fuseaux horaires.
  • Un peu partout en Russie, les défilés et manifestations du 9 mai ont été annulés, les autorités avançant un risque « terroriste » trop élevé.
  • Trente drones russes ont été abattus au-dessus de Kyiv, dans la nuit de dimanche à lundi.

Les pays occidentaux marquent l’anniversaire de la capitulation allemande le 8 mai, mais Moscou a toujours retenu la date du 9 en raison d’une différence de fuseaux horaires.

Le président Vladimir Poutine a fait de la défaite des nazis un élément essentiel de l’identité et du nationalisme russe, minimisant le rôle des autres Alliés. Et il n’a cessé aussi de placer son invasion de l’Ukraine dans cet héritage, affirmant que son voisin devait être « dénazifié ».

Mais lundi, c’est le président ukrainien Volodymyr Zelensky qui a promis au régime poutinien le même destin que celui d’Adolf Hitler.

« Tout le vieux mal que la Russie moderne ramène sera vaincu de la même manière que le nazisme a été vaincu », a insisté M. Zelensky dans une allocution diffusée sur ses réseaux sociaux peu après une nouvelle attaque nocturne russe, au cours de laquelle plus de trente drones explosifs ont été abattus au-dessus de Kyiv et deux civils tués dans les régions d’Odessa et Zaporijjia (sud).

Il a annoncé dans la foulée que l’Ukraine marquera désormais la fin de la Seconde Guerre mondiale à la manière occidentale le 8 mai et célébrera le 9 la Journée de l’Europe, comme les pays de l’Union européenne (UE) que Kyiv aspire à rejoindre au plus vite.

Au lendemain de cette annonce, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se rendra à Kyiv pour réaffirmer « le soutien sans faille de l’UE à l’Ukraine », a annoncé son porte-parole.

Craintes de Moscou

La Russie prépare de son côté ses commémorations avec, mardi, le traditionnel défilé militaire à l’ombre du Kremlin et un discours de M. Poutine devant des milliers de soldats au garde-à-vous sur la place Rouge.

PHOTO ASSOCIATED PRESS

Des soldats russes défilent sur la place Rouge lors d’une répétition générale en vue du défilé du 9 mai.

Mais après 15 mois de revers sur les champs de bataille, les célébrations en Russie n’auront pas le lustre des années précédentes.

Un peu partout dans le pays, des défilés et manifestations ont été annulés, les autorités avançant un risque « terroriste » trop élevé.

D’autant que les attaques en territoire russe, attribuées à Kyiv par Moscou, se sont multipliées ces dernières semaines et qu’une vaste contre-offensive ukrainienne semble de plus en plus imminente, voire est peut-être déjà en cours.

La plus spectaculaire, même si elle fait l’objet encore de beaucoup de questions, a été une attaque au drone contre le Kremlin la semaine dernière.

Il y a eu également des frappes contre des installations énergétiques russes, des sabotages de voies de chemin de fer et de multiples tentatives d’assassinat ou assassinats de personnalités, comme celle qui a blessé samedi l’écrivain nationaliste Zakhar Prilépine.

Le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a donc justifié l’annulation d’une partie des célébrations du 9 mai : « Quand on a affaire à un État commanditaire du terrorisme, de fait, il ferait mieux de prendre des mesures préventives. »

La Russie a en outre lancé, dans la nuit de dimanche à lundi, des dizaines de drones explosifs contre son voisin. Dans l’ensemble, les dégâts sont limités, les quelque 35 appareils ayant visé Kyiv ayant été abattus, selon l’administration militaire de la ville.

Cinq personnes ont cependant été blessées et des immeubles endommagés par des débris.

Campagne russe enlisée

Un appartement a notamment été dévasté, ont constaté des journalistes de l’AFP.

« On a eu très peur, car on entendait les drones pour la première fois. Ils volaient très bas. C’était vraiment très effrayant », a commenté un habitant du quartier, Vladyslav.

La région d’Odessa a également été visée, les autorités locales faisant état de la destruction par un missile d’un entrepôt alimentaire et de son gardien tué.

Côté russe, l’administration de la péninsule annexée de Crimée a affirmé avoir repoussé une attaque nocturne de drones ukrainiens contre Sébastopol, port d’attache de la flotte russe en mer Noire.

Dans l’ensemble, la campagne militaire russe est enlisée depuis des mois, l’armée s’étant montrée dans l’incapacité de faire des gains territoriaux lors de son offensive de l’hiver.

Combats « féroces » à Bakhmout

Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, a déclaré lundi que des combats « féroces » se poursuivaient à Bakhmout, dans l’est de l’Ukraine, indiquant que ses troupes recevaient davantage de munitions après avoir menacé de se retirer.

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Le patron du groupe Wagner, Evguéni Prigojine

M. Prigojine, en conflit ouvert depuis des mois avec la hiérarchie militaire russe, avait promis vendredi de retirer ses combattants, en première ligne dans cette ville ukrainienne que les forces russes assaillent depuis août dernier, s’ils ne recevaient pas plus de munitions de la part de l’armée.

Il avait ensuite annoncé dimanche avoir reçu « la promesse » que ses hommes seraient approvisionnés.

« D’après les premières informations, nous commençons à recevoir des munitions », a déclaré M. Prigojine dans un enregistrement audio diffusé sur Telegram par son service de presse.

Selon lui, les forces russes ont avancé de 130 mètres au cours de la journée écoulée à Bakhmout, ville de l’est de l’Ukraine épicentre des combats depuis l’été et aujourd’hui en grande partie détruite.

« Les combats [à Bakhmout] sont féroces. Les groupes avancent et continueront à avancer », a-t-il ajouté, affirmant que les troupes ukrainiennes ne contrôlent plus que 2,36 km2 de la ville.

L’état-major ukrainien a de son côté simplement rapporté que les « hostilités se poursuivent dans la ville de Bakhmout », relevant des « actions offensives sans succès » des troupes russes.

La bataille pour Bakhmout, la plus longue du conflit, a été marquée par de lourdes pertes dans les deux camps, malgré l’importance stratégique contestée de la ville.