(Washington) Les États-Unis ont formellement dénoncé lundi la « détention arbitraire » d’Evan Gershkovich, journaliste américain détenu en Russie sur des accusations d’espionnage, et ont appelé à sa « libération immédiate ».

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a « déterminé qu’Evan Gershkovich est détenu de façon arbitraire par la Russie », selon un communiqué du porte-parole du département, Vedant Patel.

« Le journalisme n’est pas un crime. Nous condamnons la répression continue par le Kremlin des voix indépendantes en Russie et sa guerre contre la vérité », poursuit le communiqué qui précise que le gouvernement américain fournira « tout le soutien nécessaire » au journaliste du Wall Street Journal et à ses proches.

Cette qualification de « détention arbitraire », qui était attendue, déclenche une série de procédures au sein de l’administration américaine et permet notamment aux autorités d’échanger des informations avec les proches du journaliste.

Elle permet aussi de confier le dossier à l’émissaire spécial pour les otages, Roger Carstens, et d’allouer des fonds spécifiques.

Evan Gershkovich est « un éminent journaliste, son arrestation représente une attaque sur la presse libre et devrait provoquer l’indignation parmi tous les peuples et États libres à travers le monde », ont déclaré dans une lettre la rédactrice en chef du Wall Street Journal, Emma Tucker, et le patron de Dow Jones (maison mère du WSJ), Almar Latour, en réaction à l’annonce du département d’État.

M. Blinken avait lui-même qualifié la détention du journaliste d’« injuste », en marge d’une réunion de l’OTAN la semaine dernière à Bruxelles.

Peu auparavant lundi, le porte-parole du département d’État avait souligné que les autorités russes avaient notifié les États-Unis le week-end dernier de la détention du journaliste, tout en continuant à refuser un accès consulaire.

« Le ministère (russe) a fourni une notification de détention, mais toujours pas un accès consulaire en violation de ses obligations », a-t-il affirmé, en pressant les autorités russes à le faire.

« Ridicules »

Le journaliste américain Evan Gershkovich, ancien employé de l’AFP, a été arrêté en Russie le 29 mars. Il a été officiellement inculpé d’« espionnage » vendredi dernier, une accusation que lui et son employeur le Wall Street Journal ont rejeté avec force.

Selon l’agence de presse russe Interfax, M. Gershkovich est plus précisément poursuivi sur la base de l’article 276 du code pénal russe, un chef d’accusation passible de 20 ans de prison.

Cette inculpation ouvre la voie à un procès dont la date n’a pas encore été annoncée.

Le reporter a été arrêté par les services de sécurité russes lors d’un reportage à Ekaterinbourg, dans l’Oural. Les autorités l’ont accusé notamment de recueillir des informations sur l’industrie russe de défense.

Washington a rejeté ces allégations les jugeant « ridicules ».

Le chef de la diplomatie américaine a par ailleurs réitéré un appel à la libération d’un autre détenu en Russie, Paul Whelan, que les États-Unis jugent également emprisonné de façon arbitraire.

L’arrestation du journaliste américain fait suite à un échange intervenu en décembre entre la joueuse de basket Brittney Griner, qui se trouvait en détention en Russie, et le marchand d’armes russe Viktor Bout, prisonnier aux États-Unis.

Washington a plusieurs fois accusé Moscou d’arrêter arbitrairement des Américains pour s’en servir de monnaie d’échange et récupérer des Russes détenus aux États-Unis.