(Paris) Coup de théâtre à l’Assemblée nationale dans la nuit de lundi à mardi où l’examen du projet de loi transformant le passeport sanitaire en passeport vaccinal a fait l’objet d’une suspension surprise, après qu’une majorité de députés ont refusé par un vote à main levée la poursuite des débats.

Cette suspension-surprise saluée bruyamment par l’opposition va faire vraisemblablement dérailler le calendrier d’adoption définitif du texte par le parlement prévu initialement pour la fin de la semaine.

« C’est un camouflet pour le gouvernement », s’est réjoui le député LR Julien Aubert tandis que Jean-Luc Mélenchon, chef de file des « insoumis » s’est félicité d’une « correction » infligée au ministre de la Santé, Olivier Véran.  

Le ministre avait auparavant sollicité l’accord de l’hémicycle pour poursuivre les débats après l’heure normale de clôture de l’Assemblée prévue à minuit.  

« La nuit devant nous »

« On a la nuit devant nous », avait préalablement ironisé Olivier Véran.

Mais cette simple formalité qui devait emmener les députés dans un examen-marathon jusqu’au petit matin, s’est transformée en nouveau couac qui fait désordre en pleine campagne présidentielle.

Il reviendra à la conférence des présidents de groupes parlementaires du Palais Bourbon qui se réunira mardi à 10 heures, d’inscrire la suite de l’examen du texte à l’agenda de l’Assemblée, peut-être dès mardi soir ou mercredi, a avancé une source parlementaire.

Alors que la majorité a déjà été prise à plusieurs reprises en défaut de mobilisation, au fil des 12 textes anticovid examinés depuis le début de la crise, Christophe Castaner, le patron du groupe LREM a appelé les députés à « demeurer présents et mobilisés tout au long de la semaine » dans un message interne.  

Il a fustigé « l’irresponsabilité » des oppositions, d’aucuns au sein du groupe dénonçant un « nouveau coup du rideau » des députés LR, arrivés en force juste avant le vote.

« On a vu des oppositions qui, sur force plateauxde télévision et tweets, nous disent qu’elles sont favorables au passeport vaccinal et soutiennent ce projet de loi et qui dans l’hémicycle, ont fait complètement l’inverse, ont joué l’obstruction et ont voté de façon massive pour que les débats cessent », a dénoncé la présidente LREM de la commission des Lois, Yaël Braun-Pivet.

Dans le viseur de la majorité : l’attitude des LR accusés de soutenir publiquement le passeport vaccinal, mais d’avoir soumis le texte dans l’hémicycle à une flopée de critiques et de votes négatifs.  

« Il y a eu clairement un défaut d’anticipation et de mobilisation », a cependant admis une source parlementaire LREM, déplorant également un « coup » de la présidente de séance, la LR Annie Genevard qui à l’issue du vote-surprise a été interpellée par Christophe Castaner et le ministre de la Santé, Olivier Véran.

Jusqu’alors, les débats autour du projet de loi transformant le passeport sanitaire en passeport vaccinal avançaient à pas comptés en raison de l’hostilité de députés de plusieurs groupes politiques.  

Vaccination des mineurs

Dans un hémicycle chauffé à blanc, les débats s’étaient attardés sur l’épineuse question du passeport vaccinal pour les mineurs dès 12 ans et les restrictions susceptibles de s’imposer aux jeunes non-vaccinés.

À la clef, des escarmouches entre Olivier Véran et quelques députés de droite comme de gauche, et un tacle appuyé visant Martine Wonner, égérie des covidosceptiques.  

« J’ai honte pour vous », avait tonné M. Véran à l’adresse de la députée non-inscrite après des propos jugés diffamatoires sur les conséquences de la vaccination des enfants.

Face au « raz-de-marée » du variant Omicron de la COVID-19, le projet de loi prévoit de transformer le passeport sanitaire en passeport vaccinal pour accéder aux activités de loisirs, aux restaurants et bars, aux foires ou aux transports publics interrégionaux.

Le gouvernement veut encore accentuer la pression sur les près de cinq millions de Français de 12 ans et plus non-vaccinés.

Pour disposer d’un schéma vaccinal complet, il faudra, à partir du 15 février, effectuer sa dose de rappel quatre mois – et non plus jusqu’à sept mois – après sa deuxième dose, sachant qu’une infection équivaut toujours à une injection.

Le passeport sanitaire ne sera pas nécessaire au travail, mais le gouvernement propose de sanctionner d’une amende administrative les entreprises ne jouant pas le jeu du télétravail.

Le projet de loi prévoit aussi l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 31  mars à La Réunion et en Martinique. Mais l’entrée en vigueur du passeport vaccinal sera reportée en outre-mer où le taux de vaccination est plus faible.