Billets, popcorn et preuve vaccinale : ce sont les essentiels à avoir en main quand on va voir un film au cinéma en France, depuis mercredi. Le « passe sanitaire activités » est dorénavant obligatoire pour accéder aux lieux culturels ou de loisirs, au moment où le pays est aux prises avec une hausse des cas de coronavirus.

Munis de leurs « passes sanitaires », les Français pourront notamment fréquenter des salles de spectacle, des lieux de culte et des festivals sans porter de masque.

« […] La quatrième vague, on y est », a déclaré le premier ministre français, Jean Castex, au moment où le variant Delta se propage dans l’Hexagone. Le nombre de contaminations par le virus a augmenté de 140 % en une semaine, a-t-il affirmé sur les ondes de TF1.

Le premier ministre appelle ainsi à relever un « défi collectif », afin que 50 millions de Français aient reçu leur première dose de vaccin à la fin du mois d’août.

Les lieux culturels et sportifs accueillant plus de 50 personnes devront exiger le passeport sanitaire, preuve numérique ou papier qui se décline sous trois formes.

Lacunes

Le passeport sanitaire est actif sept jours après qu’une personne a reçu sa deuxième dose de vaccin, ou quatre semaines après l’administration d’un vaccin qui nécessite une seule injection (Johnson & Johnson).

Le document peut également consister en une preuve d’un test de dépistage de la COVID-19 négatif remontant à moins de 48 heures. Enfin, il peut prouver qu’une personne ayant contracté la COVID-19 est rétablie depuis au moins 11 jours et au plus six mois.

Pour Donald Vinh, infectiologue et microbiologiste au Centre universitaire de santé McGill, ces deux derniers critères constituent des lacunes du passeport sanitaire français.

Même les personnes adéquatement vaccinées peuvent être infectées par le virus et le transmettre.

Si la personne qui est le récepteur du virus n’est pas complètement vaccinée, mais qu’elle remplit un des autres critères […], ça ne veut pas dire que cette personne est immunisée. Elle n’est [plutôt] pas infectieuse.

Donald Vinh, infectiologue et microbiologiste

Le dernier critère du passeport sanitaire, soit le test prouvant le rétablissement d’une personne, présume qu’une personne ayant déjà été infectée par la COVID-19 ne peut plus être atteinte du virus. Mais « on peut être infecté par un autre variant », a mis en garde le microbiologiste.

Le retrait du masque à l’intérieur est d’ailleurs mis en question par André Veillette, professeur au département de médecine de l’Université de Montréal et directeur de l’Unité de recherche en oncologie moléculaire à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM).

« Le [variant] Delta, je pense qu’il change complètement la donne », a-t-il déclaré, en rappelant qu’il se propage plus rapidement.

Dès le mois d’août, l’usage de la preuve vaccinale sera élargi en France. Elle sera exigée dans les hôpitaux, les centres commerciaux, les restaurants et les maisons de retraite. « D’autres lieux pourront s’ajouter à cette liste par la suite si nécessaire selon la situation épidémique », peut-on lire sur le site du gouvernement français.

En raison du décalage dans le processus de vaccination, l’implantation du passeport sanitaire pour les jeunes de 12 à 17 ans est repoussée au 30 août. La preuve vaccinale ne sera toutefois pas exigée dans les établissements scolaires.

« C’est très négatif »

Pour des acteurs du milieu culturel, le passeport sanitaire a déjà un impact considérable.

« C’est très négatif », a lancé Dominique Gosset, directeur du Théâtre de la Contrescarpe, à Paris, en entrevue avec La Presse. « [Pour] nous, ça s’est traduit concrètement par un arrêt des ventes dès lundi soir, ça coïncidait avec les annonces du gouvernement. Maintenant, on a un niveau de ventes très faible depuis 48 heures », a expliqué M. Gosset.

Le directeur de théâtre croit que cette situation s’explique par le fait que de nombreux Français n’ont toujours pas deux doses de vaccin et n’ont donc pas accès au passeport sanitaire.

PHOTO ALAIN JOCARD, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les spectateurs, masqués, font la file avant de faire contrôler leur passeport sanitaire en entrant dans le cinéma Grand Rex, à Paris, pour assister à la projection du film Kaamelott.

Pour éviter les pertes, Dominique Gosset a décidé que sa salle de 110 places n’allait accueillir que 49 personnes, pour ne pas devoir demander le passeport sanitaire.

Les propriétaires des lieux où le passeport sanitaire est exigé devront en faire le contrôle à l’entrée de leur établissement, en balayant les codes QR. Toutefois, la vérification de l’identité de la personne présentant sa preuve sanitaire ne sera pas obligatoire.

Un passeport sanitaire québécois ?

Selon André Veillette, mettre en place une mesure semblable à la preuve sanitaire française au Québec pourrait inciter les gens à se faire vacciner.

Quand ils ont annoncé ce passe sanitaire [en France], les gens se sont précipités pour aller se faire vacciner.

André Veillette, professeur en médecine

Des manifestations contre le passeport sanitaire ont toutefois eu lieu en France.

Le gouvernement du Québec devra éventuellement tendre vers le passeport sanitaire pour favoriser les personnes vaccinées, selon Roxane Borgès Da Silva, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal (ESPUM).

« Au Québec, on a ce problème d’hésitation vaccinale et de ralentissement de la vaccination, mais on a également une capacité de soin qui est plus limitée et plus fragile que la France », a évoqué Mme Da Silva. « On ne peut pas se permettre d’attendre et de voir la quatrième vague arriver, avant de prendre des mesures », a-t-elle ajouté.

Avec l’Agence France-Presse

8 millions

Nombre de vaccins que la France espère administrer au cours des deux prochaines semaines.

Source : Agence France-Presse

96 %

Proportion des non-vaccinés parmi les 18 000 personnes déclarées positives à la COVID-19 mardi, en France

Source : Agence France-Presse

En date du 21 juillet, 56,44 % des Français ont reçu au moins une dose de vaccin, et 46,03 % ont reçu deux doses.

Source : COVID Tracker