Le bilan de l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest approchait mercredi les 10 000 cas pour près de 4900 morts, en plein renforcement des dispositifs de précaution et de la mobilisation internationale.

Faute de perspective d'endiguement rapide au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée, les trois pays frappés de plein fouet, malgré des avancées dans la recherche d'un vaccin, le virus exacerbait les tensions entre population et autorités, dégénérant en émeute mortelle dans l'est de la Sierra Leone, région en quarantaine depuis août.

Malgré une diminution des risques de contagion mondiale, les dispositifs de précaution se renforçaient encore, au départ des pays touchés comme à l'arrivée.

Les autorités sanitaires américaines ont annoncé que toute personne en provenance des trois pays africains concernés serait étroitement surveillée pendant 21 jours, période maximum d'incubation de la maladie.

Le président Barack Obama a fait néanmoins part de son optimisme face à l'évolution de la situation concernant le virus aux États-Unis, évoquant par ailleurs des progrès dans la mobilisation internationale pour organiser la riposte en Afrique de l'Ouest.

«Des dizaines de personnes qui avaient été en contact avec M. Duncan (le patient libérien décédé au Texas), dont sa famille et ses amis, sont désormais hors de danger», a-t-il souligné. «C'est un élément de plus qui montre aux gens à quel point il est difficile d'attraper cette maladie», a-t-il ajouté.

Amber Vinson, la seconde infirmière du Texas Presbyterian Hospital de Dallas à avoir été contaminée par Ebola après avoir été au chevet du patient libérien Thomas Eric Duncan, est guérie de la maladie, a annoncé sa famille.

L'autre infirmière, Nina Pham, reste dans un état stable dans une clinique des Instituts nationaux de la santé (NIH) dans le Maryland. La clinique a indiqué mardi que son état de santé «s'est amélioré et est désormais jugé bon.»

Malgré des nouvelles rassurantes sur l'évolution des cas dans les deux pays occidentaux touchés, le Rwanda a étendu ses mesures de précaution à l'Espagne et aux États-Unis, exigeant que les voyageurs y ayant séjourné dans les trois semaines précédentes communiquent quotidiennement pendant 21 jours leur état de santé.

Et l'aéroport international du Liberia a connecté ses bases de données aux listes des proches de malades, afin de leur interdire l'embarquement, même s'ils ne présentent pas de symptôme et ne sont donc pas contagieux, a indiqué à l'AFP Binyah Kessely, président du conseil d'administration de l'Autorité aéroportuaire libérienne.

«Nous voulons éviter d'être embarrassés à chaque fois que quelqu'un quittera le Liberia pour aller contaminer un autre pays», a-t-il expliqué, en allusion à deux citoyens libériens qui ont introduit le virus au Nigeria en juillet et aux États-Unis en septembre avant d'y succomber.

Au même moment, les Instituts américains de la Santé (NIH) ont annoncé avoir commencé un essai clinique sur 39 adultes d'un vaccin expérimental canadien contre Ebola, dont de premiers lots ont été livrés en Suisse pour être testés par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Mais ils ne devraient pas être opérationnels avant l'année prochaine.

Or, le temps presse: l'épidémie a déjà fait au moins 4877 morts sur 9936 cas enregistrés, selon le dernier bilan de l'OMS publié mercredi.

Et l'organisation escompte plusieurs milliers de cas supplémentaires par semaine à partir de décembre.

Manque de lits

En Sierra Leone, où la grande majorité des nouveaux cas sont désormais signalés dans l'Ouest, comprenant la capitale Freetown, des heurts dans l'Est, épicentre originel de l'épidémie, ont fait deux morts, âgés d'une vingtaine d'années, et une dizaine de blessés, dont plusieurs parmi les forces de sécurité.

L'émeute a éclaté mardi dans la ville minière de Koidu après qu'un groupe de jeunes s'est opposé à un prélèvement sanguin sur une femme de 90 ans, mère d'un de leurs chefs. Cette femme, considérée par les autorités sanitaires comme un cas suspect d'Ebola, est finalement décédée d'hypertension.

Au Liberia voisin, le pays le plus touché, l'OMS a jugé le nombre de cas recensés sous-évalué, en particulier dans la capitale Monrovia.

La décrue semblait en revanche réelle dans la province de Lofa (nord), limitrophe de la Guinée, où sont apparus les premiers cas au Liberia en février.

Le responsable du centre de traitement de Médecins Sans Frontières (MSF) dans la ville de Foya a indiqué à la présidente Ellen Johnson Sirleaf, en visite sur place, que la province pourrait «bientôt être déclarée débarrassée d'Ebola», après trois semaines pratiquement sans nouveau cas, selon la présidence.

Malgré l'augmentation des moyens dans les trois pays, l'OMS souligne que seuls 25 % des quelque 4700 lits nécessaires dans les centres de traitement pour parvenir à l'objectif de l'ONU d'isoler 70 % des malades d'ici le 1er décembre sont actuellement disponibles.

L'OMS signale également le manque de personnel médical étranger pour faire fonctionner ces centres, estimant que les renforts prévus répondent aux besoins de 30 établissements sur 50 programmés.

La Bolivie a décidé de verser un million de dollars à un fonds des Nations Unies destiné à la lutte mondiale contre Ebola, a annoncé mercredi le président Evo Morales.

De son côté, Cuba, qui a déjà déployé 165 médecins et infirmiers en Sierra Leone, en a envoyé 83 vers la Guinée et le Liberia.

La présidente de la Commission de l'Union africaine, Nkosazana Dlamini-Zuma, est attendue à partir de jeudi dans les trois pays les plus affectés afin «que le continent mobilise en toute urgence les ressources humaines si nécessaires», a annoncé l'UA.

En Guinée, les autorités ont annoncé le versement de 10 000 dollars à la famille de chaque agent de santé mort d'Ebola, grâce à l'appui financier de la communauté internationale.