Germain Jeanscott est là depuis 3H00 du matin. La distribution de bâches ne commençait pourtant qu'à 10H30 mais la saison des pluies se faisant de plus en plus menaçante, il ne pouvait rater ça. Même s'il aurait préféré qu'on lui donne enfin une tente.

Devant ce lycée du centre-ville de Port-au-Prince, un des quartiers les plus dévastés de la capitale haïtienne par le tremblement de terre du 12 janvier, ce père de famille de 34 ans estime que des bâches, «c'est pas suffisant».

Arrivé avant l'aurore, il est un des premiers servis. «La majorité des familles sont dans une situation difficile», affirme-t-il.

L'office international des migrations des Nations Unies avait organisé dimanche deux distributions de bâches pour que 1 200 familles puissent couvrir leur refuge d'un «toit» plus imperméable que les draps qui délimitent la plupart des abris dans les différents campements de sans-abri.

Environ 1,2 million de personnes ont été jetées à la rue le 12 janvier, leur maisons détruites ou tellement fissurées qu'elles n'inspirent plus confiance. Selon l'ONU, seules 50 000 familles - soit environ 272 000 personnes - ont reçu du matériel d'urgence pour consolider leurs abris de fortune.

Les organisations humanitaires espèrent pouvoir distribuer des bâches pour 1 500 familles par jour. La plupart des Haïtiens réclament des tentes mais elles ont privilégié ces toiles plastifiées, dont la distribution est plus souple et plus rapide.

Après la grande désorganisation du début, les secours remettent maintenant des tickets aux sinistrés en échange duquel ils peuvent ensuite recevoir un kit de survie comprenant des bâches, un seau, des ustensiles de cuisine et 12 litres d'eau.

Les opérations de distribution restent néanmoins surveillées par des soldats de l'ONU. Les familles bénéficiaires sont choisies par les associations de voisinage et la municipalité de Port-au-Prince. Ce qui n'empêche pas certains de se présenter à la distribution sans le précieux ticket.

Dimanche, cris et bousculades se multipliaient dans la queue et les femmes ont accueilli avec des acclamations l'annonce qu'elles seraient servies avant les autres.

À Canapé Vert, un autre quartier de Port-au-Prince très touché par le séisme qui a fait plus de 217.000 morts, où avait lieu l'autre distribution, Brice Kesnel, 42 ans, attend patiemment.

Ce père de trois enfants a été blessé par des morceaux de béton pendant le tremblement de terre alors qu'il se trouvait chez lui avec son fils de 3 ans. Il vit aujourd'hui dehors avec sa famille.

De l'autre côté de la rue, Calixte Wilson, 59 ans, s'est construit un petit abri pour lui, devant son ancienne maison transformée en tas de gravats. Une bâche bleue lui sert de toit et il a installé son matelas sur des briques de béton. «J'ai perdu quatre personnes de ma famille», dit-il.