Le Japon a adopté mercredi une loi créant un organisme public chargé de verser l'équivalent de dizaines de milliards de dollars d'indemnités aux victimes de la catastrophe nucléaire de Fukushima, dont plusieurs centaines ont exprimé leur colère lors d'une manifestation à Tokyo.

Environ 300 agriculteurs, qui ont tout perdu dans l'accident, avaient fait le déplacement, certains avec des vaches laitières dans des remorques, pour protester devant le siège de l'opérateur de la centrale, Tokyo Electric Power (Tepco), aux cris de «rendez-nous notre vie, rendez-nous un Fukushima vert».

L'accident survenu le 11 mars à la centrale Fukushima Daiichi, à la suite d'un tsunami géant, a contraint plus de 80 000 personnes à évacuer les environs dans un rayon de 20 kilomètres et dans d'autres zones soumises à de trop fortes radiations. Il a également entrainé des conséquences désastreuses sur l'agriculture, la pêche et le secteur du tourisme dont les victimes pourront également réclamer des dommages.

En vertu de la loi votée mercredi par le Sénat, après avoir été approuvée par les députés, le fonds d'indemnisation des victimes sera alimenté par l'État, mais aussi par Tepco et d'autres compagnies productrices d'électricité d'origine nucléaire.

Le texte ne précise pas le montant dont sera doté le fonds, mais souligne que Tepco, dont l'action a perdu plus de 80% de sa valeur, devra ensuite rembourser toutes les sommes versées aux victimes par cet organisme.

Le gouvernement et l'opérateur de la centrale ont été l'objet de vives critiques pour la lenteur avec laquelle les aides et les compensations ont été jusqu'ici distribuées aux personnes déplacées, aux agriculteurs et aux commerçants qui ont tout perdu dans l'accident.

«De plus en plus de gens se suicident à Fukushima», a affirmé à l'AFP Toshihide Kameda, 63 ans, producteur de riz et de légumes de la préfecture de Fukushima. «Nous souffrons d'agonie mentale. Nous ne savons pas quand nous pourrons retourner chez nous et nous ne pouvons plus travailler.»

Mitsuyo Tarukawa, 61 ans, dont le mari s'est donné la mort après l'accident nucléaire, exige que Tepco nettoie le sol contaminé par les radiations. «La terre représente tout pour des paysans comme nous. Sans elle, nous ne pouvons rien faire.»

Beaucoup de manifestants étaient des éleveurs dont le bétail a été contaminé après avoir consommé de la paille de riz ou du foin radioactifs. Un embargo sur la viande de boeuf a été décrété dans la préfecture de Fukushima et dans trois provinces voisines.

Dans un bref communiqué, Tepco a annoncé qu'il allait verser «sans tarder des compensations justes» en accord avec la loi et «avec l'aide du gouvernement».

Sur le site de Fukushima, des centaines de techniciens et ouvriers se relaient depuis bientôt cinq mois pour refroidir le combustible et maîtriser la plus grave catastrophe nucléaire depuis celle de Tchernobyl il y a 25 ans.

L'opérateur a annoncé que des niveaux record de radiations supérieurs à 10 sieverts par heure - une dose mortelle - avaient été enregistrés dans plusieurs endroits de la centrale par un drone lundi et mardi.