Quatre cent quatre-vingt-huit activistes du convoi maritime d'aide à Gaza victime lundi d'un raid israélien meurtrier, sont arrivés dans la nuit de mercredi à jeudi en Turquie, ont annoncé des responsables gouvernementaux.

Trois jours après le raid israélien contre la «flottille de la liberté», des centaines de militants ont atterri dans la nuit d'hier à aujourd'hui à l'aéroport Atatürk.

Le gouvernement turc avait affrété trois avions hier pour ramener près de 500 ressortissants, retenus en Israël depuis lundi. Dix-huit membres turcs de la flottille humanitaire et un Irlandais étaient rentrés plus tôt à Ankara à bord d'avions médicalisés. 

«Personne n'aurait pensé à une telle chose» a raconté un Turc quinquagénaire rentré d'Israël aux caméras de télévision à Istanbul. Sous le couvert de l'anonymat, il s'est dit «étonné» de la brutalité de l'abordage du Mavi Marmara, plus important navire de la flottille.

«Ils ont fait face à la barbarie et à l'oppression, mais ils rentrent avec fierté», a affirmé le vice-premier ministre truc, Bülent Arinç, qui a attendu les «héros» sur le tarmac avec d'autres personnalités officielles.

Les militants seront soumis à «certains tests» pour vérifier des soupçons d'«intoxication» par les Israéliens, a en outre précisé M. Arinç.

«Je n'ai pas vu les bâtons»

Les familles et amis des militants ont attendu toute la journée l'arrivée de leurs proches à l'aéroport d'Istanbul.

Nilüfer Çetin, militante expulsée hier matin avec son fils de 13 mois, espérait voir surgir son mari et ses amis derrière les portes coulissantes. «J'ai réalisé seulement aujourd'hui (hier) ce qui s'est passé, a-t-elle dit. Au moment où l'assaut a été lancé, la seule chose à laquelle je pensais, c'était mon bébé.»

Les membres de la flottille savaient que les forces israéliennes pouvaient les intercepter. Avant le raid, les militants ont discuté des moyens à prendre si jamais ils étaient arrêtés par l'armée. «Il n'a jamais été question de violence. Nous discutions des façons d'évacuer le bateau, nous disions que nous allions nous rendre si nous étions arrêtés», a-t-elle dit. Des images diffusées par la BBC montrent des passagers frapper des soldats israéliens avec des chaises et des bâtons. «Je n'ai pas vu les bâtons. Je ne sais pas d'où ils venaient. Mais il n'a jamais été question d'utiliser des bâtons», a-t-elle assuré.

Selon l'Agence France-Presse, trois des quatre militants turcs tués lundi avaient par ailleurs fait part de leur désir de mourir en martyrs avant leur départ pour la bande de Gaza.

«Israël terroriste»

En soirée, place Taksim, au coeur d'Istanbul, quelque 10 000 personnes se sont réunies pour fêter en héros les membres turcs du convoi maritime. La foule a scandé des slogans comme: «Israël assassin!», «Israël meurtrier, sors de la Méditerranée!», «Israël terroriste!»

Des drapeaux palestiniens et turcs flottaient au vent. L'insigne du Hamas, mouvement islamiste qui contrôle la bande de Gaza, était omniprésent. Quelques drapeaux du Hezbollah libanais étaient aussi visibles dans la foule.

La manifestation a rapidement pris des allures de rassemblement religieux. Les participants ont été invités à la prière à plus d'une reprise et ont eux aussi scandé «Allah akbar» (Dieu est le plus grand).

Chose rare à Istanbul, les hommes et les femmes ont été séparés pour le rassemblement. «C'est pour qu'elles se sentent plus à l'aise, qu'elles soient plus en sécurité», a justifié un homme barbu qui refoulait les hommes de l'autre côté d'une barrière. Il portait un bandeau du Hamas sur le front. Il a refusé de s'identifier.

«Il y a une grande division en Turquie», a dit Figen, manifestante rencontrée sur place. «Regardez autour de vous. Vous voyez d'autres gens comme moi?» a-t-elle demandé en tirant sur ses cheveux blonds. Avec sa tête nue et son t-shirt, la femme de 39 ans détonnait dans la foule. Dans la section «réservée» aux femmes, la grande majorité des participantes portaient un voile multicolore. Quelques femmes en niqab, gantées, ont elles aussi pris part au rassemblement.

La manifestation a été organisée par l'IHH, un des principaux organisateurs de l'expédition d'acheminement d'aide humanitaire dans la bande de Gaza, sous blocus israélien.

Avec l'AFP et AP