La pression politique s'accroît sur la Maison Blanche pour qu'elle prenne davantage en main la direction des opérations de lutte contre la marée noire du golfe du Mexique, jusqu'ici laissées à BP.

Soucieuse de ne pas sembler dépassée par les événements plus d'un mois après le début de cette crise, l'administration du président Barack Obama laisse de plus en plus ouvertement transparaître sa frustration vis-à-vis du géant pétrolier.

Dimanche, le ministre chargé des ressources naturelles, Ken Salazar, a affirmé à propos de BP que «si nous découvrons qu'ils ne font pas ce qu'ils sont censés faire, nous les évincerons comme il se doit».

L'amiral des garde-côtes Thad Allen, qui coordonne les efforts de nettoyage et de comblement du puits d'où s'écoule le pétrole, a toutefois mis un bémol lundi à ces déclarations en les qualifiant de «métaphore», et a reconnu qu'écarter les techniciens de BP ne servirait à rien si personne ne les remplaçait.

«Ce que nous devons faire, c'est faire en sorte qu'ils assument leurs responsabilités», a affirmé l'amiral Allen, convié par le porte-parole de la Maison Blanche Robert Gibbs à participer au point de presse quotidien de la présidence américaine. M. Salazar, a-t-il dit, «exprimait simplement l'immense frustration que nous ressentons tous».

Dès qu'il est apparu évident que la fuite provoquée par l'explosion suivie du naufrage de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon allait provoquer un désastre écologique, la Maison Blanche a insisté sur le fait que BP serait responsable des coûts engagés, selon le principe «pollueur-payeur» inscrit dans le droit américain.

L'Etat fédéral a, pour cette raison, laissé à BP le contrôle des opérations destinées à tenter de reboucher la fuite. La Maison Blanche affirme que les pouvoirs publics ne disposent pas des moyens techniques nécessaires.

Mais cette stratégie de mise en première ligne de cette société, qui se double d'une opération de relations publiques utile pour empêcher des critiques frontales contre la présidence, semble s'essouffler vu le manque de résultat.

Rejetant toute analogie avec la réaction de la précédente administration de George W. Bush face à un autre désastre ayant frappé la même région, le cyclone Katrina en 2005, M. Gibbs avait affirmé dimanche sur la chaîne CBS que «le gouvernement fait tout ce qui est possible, humainement ou d'un point de vue technologique, pour reboucher un trou à 1,6 km de profondeur».

Mais dimanche, le gouverneur républicain de Louisiane, Bobby Jindal, a révélé ne pas avoir encore reçu tous les barrages flottants anti-pollution qu'il avait demandés pour protéger les fragiles côtes de son Etat.

«Plus de 100 km de nos côtes sont souillées» de pétrole, a indiqué le gouverneur. «Soit nous repoussons ce pétrole avant qu'il n'atteigne la rive, soit nous allons devoir passer des mois à nettoyer ce pétrole le long de milliers de kilomètres de marécages, essentiels à la reproduction de la faune», a-t-il prévenu.

Le sénateur républicain de Louisiane David Vitter a accusé samedi les «démocrates de Washington» d'organiser «des opérations médiatiques pour les télévisions au lieu de concentrer leur attention sur le problème», tandis que l'ancienne candidate du parti à la vice-présidence, Sarah Palin, a même assuré que M. Obama avait réagi lentement à cette crise parce que les compagnies pétrolières avaient soutenu sa campagne.

Interrogé sur cette dernière accusation, M. Gibbs a rétorqué lundi que «dans ce pays, il faut un permis pour conduire une voiture, mais malheureusement, on peut aller à la télévision et dire n'importe quoi».